20.000 manifestants ce samedi 08 avril 2017 à Bayonne ont célébré une date qui restera à tout jamais historique pour le Pays Basque : celle du désarmement définitif d’ETA, l’organisation armée créée sous le franquisme en 1959 pour mener un combat clandestin de libération nationale.
Plus d’un demi-siècle après sa création, plus de cinq ans après la conférence internationale d’Aiete qui, en novembre 2011, avait enregistré la volonté d’un processus de paix porté par la société civile basque et soutenu par des personnalités internationales comme Pierre Joxe, Brian Currin, Jerry Adams, Jonathan Powell, etc…, le processus de paix engagé au Pays Basque est entré dans une phase nouvelle.
Il y a six mois l’apparition des « artisans de la Paix » avait montré la voie, des militants très connus du Pays Basque qui s’étaient rendu sur le site d’une cache d’armes dévoilé par ETA pour y détruire les armes qui s’y trouvaient.
Immédiatement arrêtés par les autorités françaises, ils avaient été libérés sous la pression d’une mobilisation sans précédent, et les incriminations à leur encontre de « complicité avec une entreprise terroriste » abandonnées malgré les déclarations très agressives du gouvernement espagnol alors soutenu par le gouvernement français.
A partir de ce premier geste concret qui manifestait la volonté d’ETA d’aller au bout de sa décision d’arrêt de la violence, les Artisans de la Paix, et tous ceux qui se sont impliqués dans la recherche d’un règlement pacifique de la question basque, ont demandé que le désarmement devienne général et s’étende à toutes les caches d’armes détenues par le mouvement clandestin.
Celles-ci se trouvent en territoire français, et l’opération annoncée par l’organisation clandestine a consisté à fournir aux autorités françaises, à la demande des « Artisans de la Paix », et via le « Comité International de Vérification » qui l’a remise aux autorités françaises, la liste de huit caches d’armes disséminées en Iparralde. Dans le même temps, une manifestation de 20.000 personnes a été appelée à Bayonne pour marquer la solidarité des Basques avec cette initiative qui consolide définitivement le processus de paix, et demander le rapprochement et la prise en compte des 337 prisonniers politiques qui restent détenus, dans le prisons espagnoles et françaises, au titre de leur participation à ETA.
Alternatiba, Action Non Violente, le Mouvement pour un Alternative Non Violente, la Communauté de l’Arche Lanza Del Vasto et d’autres parmi lesquels la fondation AFC-Umani créée en Corse à l’initiative des Muvrini, tout ce que la mouvance non violente compte d’organisations, ont été associés à la démarche unilatérale décidée par le mouvement basque, tandis que José Bové, Michel Tubiana, Jean François Bernardini faisaient partie des personnalités associées à l’événement.
Cette initiative a créé une situation nouvelle qui a été actée côté français dans le communiqué du Ministre de l’Intérieur, Mathias Fekl, qui a reconnu un « grand pas » et « un jour incontestablement important ». L’opération de police menée à la suite de l’information donnée a permis de neutraliser un arsenal d’armes de poing et d’épaule, de munitions, d’explosifs et de dispositifs de mise à feu, plus de trois tonnes et demie d’un arsenal accumulé au cours de décennies d’action clandestine.
Côté espagnol, la ligne autiste de Mariano Rajoy s’est à nouveau manifestée, oscillant entre un mépris ostensible et une surenchère d’exigences pour tenter d’échapper à ses responsabilités. Pour Rajoy, en fait, c’est l’existence même du peuple basque qu’il faut annihiler, et non pas l’organisation clandestine ETA. Avec le paravent de la « lutte contre le terrorisme », l’Espagne pouvait bloquer tout dialogue. Le « terrorisme » disparu, ce qui est désormais acté côté français, le refus de dialogue espagnol devient intenable face à la démocratie et face à l’Europe.
C’est cette donne nouvelle que 20.000 basques ont fêté ce 8 avril à Bayonne. ETA s’est effacée. Le combat des Basques pour l’autodétermination va continuer par la voie démocratique et rejoindre ceux qui, comme en Ecosse, en Irlande du Nord et en Catalogne, dessinent l’Europe démocratique du futur.
François ALFONSI