Par François Alfonsi
Dernière séance de votes jeudi 25 avril 2024 : après cinq années depuis mon élection en mai 2019, mon second mandat de député européen a pris fin à Strasbourg.
Un mandat européen est comme une immersion dans un autre espace-temps, où l’horizon est plus large que la carte hexagonale des météos télévisées, et où le temps est rythmé par une actualité dont la perception est bien souvent différente. J’ai vécu, depuis ce point de vue élargi, les évènements de ces cinq dernières années. Elles ont été particulièrement riches.
Cela a commencé avec le Brexit devenu effectif le 31 décembre 2019. Le problème était vital pour l’avenir de l’Union européenne, car le Royaume Uni, État riche et donc « contributeur net » au budget de l’Union, aurait pu entraîner dans son sillage les autres États riches, jusqu’à extinction de l’Union européenne faute de ressources. Il n’en a rien été, et, cinq ans plus tard, le débat n’existe même plus, puisque, dans aucun de ces États, même les plus eurosceptiques des forces politiques ne mettent à leur programme de quitter l’Union européenne. A contrario, les sondages au Royaume Uni montrent que l’opinion britannique elle-même est en train de changer de point de vue.
Au Parlement, en siégeant dans l’Assemblée parlementaire conjointe créée entre parlementaires du Royaume Uni et de l’Union européenne, nous avons accompagné au quotidien ces évolutions décisives pour l’avenir de l’Europe. Mais dans les différents pays, comme en Corse, ce sujet n’a été que peu commenté car il sort du champ naturel des politiques nationales. Par contre, en obtenant que les autorités écossaises, nord irlandaises et galloises deviennent membres observateurs de cette instance, j’ai pu, en tant que représentant du groupe ALE, contribuer aux objectifs politiques du SNP écossais, du Plaid Cymru gallois et du Sinn Fein en Irlande du Nord.
Le même travail a été fait pour que les causes qui nous ressemblent, peuple arménien, peuple kurde, trouvent au Parlement européen l’écho qu’elles recherchent. Car ce Parlement occupe une grande place pour soutenir les forces démocratiques dans le monde. C’est même l’endroit prioritaire où elles veulent s’exprimer pour dénoncer les dictatures qu’elles subissent. Idem pour les minorités nationales d’Europe qui veulent s’affranchir de la tutelle des capitales comme nous le faisons en Corse vis-à-vis de Paris. Par exemple, donner une tribune européenne aux Ladins, petit peuple des Dolomites en Italie : pour eux c’est capital, mais cela compte peu dans les colonnes de la presse corse ou française.
Mais, parfois, ce travail peu visible pour soutenir d’autres qui sont nos frères de combat nous a amené à des rencontres essentielles qui ont permis d’apporter de nouvelles approches pour nous-mêmes. Le meilleur exemple est sans nul doute Scola Corsa née de ces rencontres européennes, au Pays de Galles lors de mon premier mandat, puis au Pays Basque en Occitanie ou en Bretagne lors de ce deuxième mandat.
Mon action s’est inscrite dans le prolongement de la stratégie mise en place, il y a trente-cinq ans, en 1989, par Max Simeoni, autour de trois priorités : rassembler les forces régionalistes, autonomistes et nationalistes au sein de l’Etat français, se projeter dans un projet d’Europe fédérale avec l’Alliance Libre Européenne, et faire entendre la voix de la Corse au niveau européen. Cette stratégie continue par le soutien que j’apporte à la liste Europe-Territoires-Ecologie conduite par Guillaume Lacroix et sur laquelle figurent les candidats RPS en position éligible, Lydie Massard de l’Union Démocratique Bretonne et Maxence Helfrich d’Unserland, ainsi que le candidat corse indépendant Philippe Meynier.
Je remercie tous ceux qui m’ont accompagné durant ces cinq années, et particulièrement mes assistants, Bruno, Claire, Lisana et Camille à Bruxelles, Fabienne et Mathieu en Corse. Et aussi les vingt-cinq jeunes stagiaires que nous avons accueillis à Bruxelles pour s’y former et se passionner. Nous avons été une formidable équipe et nous sommes devenus une véritable famille. •