En réalité tout n’est qu’écran de fumée, et prétexte pour en rester au statu quo. Tous leurs discours sonnent hypocritement faux quand ils disent vouloir faire autrement, « que les ordonnances ne sont pas bonnes », « qu’il faut une loi et pas des ordonnances » et autres balivernes. Ils n’ont en fait qu’un objectif : étouffer dans l’œuf tout processus permettant à la Corse d’aller vers son autonomie.
Camille de Rocca Serra pilote la manœuvre au nom des trois députés de la droite insulaire, avec le sénateur Jean Jacques Panunzi. Leur objectif est de bloquer la réforme, comme en 2003 avec le referendum qu’ils ont saboté. Et gagner ainsi encore 15 ans de statu quo pour les deux départements corses où ils assoient leur domination politique. La droite parlementaire de François Fillon, de son côté, a trouvé avec ce dossier un moyen de mener la campagne présidentielle contre les socialistes. Mais elle a aussi trouvé l’appui des communistes pour bloquer la Collectivité Unique négociée par l’Assemblée de Corse à majorité nationaliste avec le gouvernement. Car le « Front jacobin » n’est jamais loin !
Pour la droite, à la veille de la présidentielle, ce serait le moyen d’infliger un échec politique à la majorité sortante. Et une façon aussi, derrière des discours lénifiants, de donner le « la » pour le futur des discussions sur la Corse une fois la présidentielle passée. Le discours hypocrite des partisans du surplace est toujours le même : comme ils prétextent que ça ne va pas assez loin, ils votent contre, et donc on n’avance pas d’un millimètre! Le vrai discours du « faux-cul » comme l’a lancé Jean Michel Baylet au visage de Camille de Rocca Serra venu sur les bancs du Sénat accomplir son forfait politique. Tant de machiavélisme politicien est consternant, et il illustre la nécessité politique désormais, pour le mouvement nationaliste, après avoir pris les rênes de l’Assemblée de Corse, de faire chuter les chefs de clan qui ont monopolisé jusqu’à présent la représentation parlementaire. Il faut des députés nationalistes dans la future Assemblée Nationale, et non ces représentants de la Corse du passé prêts à tout pour garder la bienveillance des hiérarques parisiens.
Les ordonnances sont-elles menacées par ce vote ? Le gouvernement garde la main, et début février, elles seront présentées pour un vote en seconde lecture à l’Assemblée Nationale. Ce sera le vote décisif pour leur adoption et, au Palais Bourbon, le gouvernement dispose d’une majorité. Mais attention au « Front jacobin » ! Car la majorité est étroite et le « retrait » des plus jacobins, sur fond de fronde à gauche, est un risque toujours possible.
De toutes façons on voit déjà où la victoire annoncée de la droite risque de nous conduire : report de la Collectivité Unique, report des élections de décembre pour donner un « second souffle » à la droite insulaire et espérer ainsi récupérer l’Exécutif de l’Assemblée de Corse en écartant cette majorité nationaliste qu’ils sont résolus à Paris à vouloir faire chuter. La période de transition qui a prévalu depuis décembre 2015, avec le compromis autour de la Collectivité Unique et de quelques dossiers emblématiques comme les Arrêtés Miot ou l’Energie, sera révolue. Avec François Fillon, en tous les cas, ce sera beaucoup plus virulent et il faut s’attendre à des heures conflictuelles.
Autour de lui, c’est droite dure et tradition jacobine. C’est donc dès aujourd’hui qu’il faut croiser le fer !
Par François Alfonsi