L’élection européenne a été mise sous la pression d’une volonté de bipolarisation par Emmanuel Macron qui chaperonne la liste de Nathalie Loiseau, et par Marine Le Pen qui cornaque un jeune inconnu. Aux électeurs de rejeter cette fausse alternative, en lui préférant le ni-ni : ni Macron, ni Le Pen !
Emmanuel Macron « rempart contre le Front National » ça a fonctionné lors de la présidentielle, permettant l’élection d’un Président jeune et mal connu par de nombreux électeurs qui ont alors déserté, dans la France entière, le PS et les Républicains. Mais les promesses se sont vite envolées !
Entre la violence d’une politique économique qui a accablé le plus grand nombre, ceux-là même qui, par sondages interposés, se sont mis en soutien de la fronde sociale des « gilets jaunes », et la violence de la répression qui n’a pas hésité à manier des armes nouvelles qui ont estropié des dizaines de manifestants afin de dissuader les autres de continuer leur mouvement, le vrai visage d’Emmanuel Macron s’est vite révélé à l’opposé de l’image qu’il avait suggéré : autoritaire, répressif et rétrograde en tout domaine.
En Corse, nous avons bien sûr été obligés de constater cette réalité une fois le masque tombé. Les visages souriants de Jean Guy Talamoni et Gilles Simeoni accueillant Jacqueline Gourault en janvier 2018, quelques jours après leur réélection triomphale à la tête des institutions de la Corse, a laissé place dès le discours prononcé par Emmanuel Macron le 7 février 2018 à l’Alb’Oru de Bastia à une sévère déception. Le « pacte girondin » proclamé à Furiani en campagne électorale a laissé la place au « mur jacobin » que « Jupiter » s’efforce de rendre chaque fois plus hermétique aux revendications légitimes et démocratiques du peuple corse.
Cette politique de fermeture, qui a décidé de replier l’Etat français sur lui-même et son modèle jacobin, est anti-européenne. Elle méconnaît la place des régions et territoires telle qu’elle est la règle dans les autres pays européens, länders en Allemagne, ou régions autonomes en Belgique, Italie ou Espagne. Et elle ferme les portes à la volonté démocratique du peuple corse telle qu’elle s’est exprimée dans les urnes en décembre 2017.
De Marine Le Pen nous n’avons rien à espérer. Députée européenne elle a fait partie, avec son père, Brice Hortefeux, Jean Luc Mélenchon et quelques autres, de la petite escouade (25 sur 700) de députés européens qui ont voté contre le soutien aux langues régionales en Europe, et donc contre la langue corse. Son rang de « poil à gratter » de la politique française peut abuser. Mais la réalité de ses actes c’est l’anti-Corse au nom des valeurs de l’extrême-droite française qu’elle incarne en héritage. Sans compter son alliance avec tout ce qui en Europe reprend les mêmes valeurs et les mêmes procédés, comme on vient de le voir en Autriche où ses alliés n’étaient finalement que des politiciens vendus au régime totalitaire de M. Poutine, dictateur que le Front National fréquente lui aussi assidument depuis des années.
En fait, voter Macron, c’est aider Le Pen, et voter Le Pen c’est légitimer Macron ! L’un et l’autre s’alimentent et leur duo infernal enferme la politique dans une voie sans issue.
L’élection européenne du 26 mai doit donner le signal que cette ère est révolue. Des forces se font entendre qui, notamment à l’égard de la Corse, prônent un véritable dialogue. Le message de Yannick Jadot, tête de liste des écologistes aux élections européennes, a fait écho à toutes les priorités de la majorité nationaliste qui préside les institutions de la Corse. En nous accordant une place éligible pour l’élection d’un député européen, ils joignent le geste à la parole, et il faudra bien sûr les soutenir le 26 mai prochain.
Mais la réunion du groupe des députés « Liberté et Territoires » en Corse a montré que d’autres démarches aussi prenaient corps et que des discours nouveaux étaient enfin tenus.
C’est une évolution à bas bruit pour l’instant, qui peine à se faire entendre dans le fracas des vociférations Macron-Le Pen. Mais une remise en cause profonde commence à s’opérer, qui va fissurer le « mur jacobin » comme en d’autres temps les voix de la démocratie ont progressivement fissuré le mur de Berlin que l’on croyait pourtant éternel tant il obstruait la vie quotidienne des Berlinois.
Nous sommes en Corse, par la spécificité de notre situation et par la place que nous avons prise dans les institutions de l’île, ceux qui sapons le mieux les bases de cette construction étatique du 19ème siècle qu’est encore la France aujourd’hui. C’est reconnu par une part de plus en plus nombreuse de la classe politique qui souhaite libérer la France de ce carcan, et qui veut faire tomber le « mur jacobin ».
Le 26 mai, en votant pour la liste Europe Ecologie de Yannick Jadot, nous contribuerons à cette indispensable évolution, contre le face à face stérile Macron-Le Pen.
François Alfonsi.