Par François Alfonsi
La crise épidémique est crise économique, et elle est aussi crise psychologique et sociale. À l’opposé des conséquences médicales qui affectent davantage les plus âgés, les conséquences psycho-sociales affectent aussi la jeunesse en mal de fêtes et de culture. Car les sorties, les fêtes, les concerts, les spectacles ou les festivals sont bien plus qu’un « secteur économique ». Ils sont le creuset d’une génération, et la génération Covid, si cela dure trop, en manquera cruellement. Vivement le « vaccin » qui nous rendra la convivialité !
Ce vaccin désormais annoncé sera-t-il la fin prochaine de cette crise sanitaire ? Les grands groupes pharmaceutiques qui sont à même de le produire ont affiché leurs progrès scientifiques à grands coups de communication concurrentielle. On peut donc l’espérer, mais il faut encore le vérifier, car on peut très bien faire les frais de la précipitation de ceux qui espèrent engranger le jackpot financier grâce à leur découverte. On imagine la pression qui pèse sur les organismes qui doivent délivrer les autorisations de mise en circulation, car le premier arrivé verra venir à lui tous ceux qui aspirent à être définitivement débarrassés de cette saloperie qui empoisonne le monde entier depuis un an.
Car les effets de la crise sanitaire se ressentent ailleurs que dans les statistiques, ils affectent aussi la vie au quotidien de toute une génération.
Il y a déjà l’image traumatisante des plus petits en cours de récréation à qui l’on interdit tout contact ou presque entre eux. Supprimés les ballons et les jeux, obligatoire la « distanciation sociale », interdits les câlins et les caresses, les bagarres et les mêlées bruyantes et joyeuses, et peut-être même privés de fêtes de noël. Brrr, quelle angoisse !
Pour les adolescents, ce n’est pas mieux : Interdit le défoulement dans les sports collectifs, finies la sortie au stade avec papa ou les grandes virées avec les copains/copines, toujours ce fichu masque-barrière vissé aux oreilles en toute occasion, y compris dans les salles de classe.
Quant aux jeunes adultes, la frustration est perceptible et s’exprime sur les réseaux sociaux. Et on ne peut que la comprendre : qu’aurait été notre jeunesse sans les concerts de Canta u Populu corsu, sans les élans collectifs par lesquels la culture d’une génération se construit ? De quels souvenirs aurions-nous été privés alors qu’ils nous ont ensuite accompagnés toute notre vie ?
Bientôt un an que notre quotidien est pourri par le Covid-19. Heureusement il y a eu la parenthèse de la fin de l’été qui nous a permis de revivre un peu, mais le prix à payer en a été une deuxième vague et un nouveau confinement dont nous sortirons encore plus défaits. Ce qui était une parenthèse ensoleillée, et une expérience vécue avec bonhomie au printemps, est devenue un tunnel bien sombre six mois plus tard. Au bout du tunnel, beaucoup voient la faillite de leurs entreprises ou la perte de leurs emplois, car le « matelas » des réserves financières de l’État est beaucoup moins fourni désormais et il ne peut pas redistribuer à l’infini.
La plupart des jeunes diplômés de l’été voient s’envoler leur espoir d’un premier emploi, pendant que leurs parents en difficulté économique peinent à leur apporter un soutien financier.
Alors comment réfréner notre plaisir d’imaginer qu’il n’y en a plus que pour quelques semaines avant que la vie normale ne reprenne son cours. Quel soulagement de penser que les fêtes de famille seront à nouveau possibles, que l’on pourra se rassembler sans crainte, que ce soit pour prier, tenir une AG, ou retrouver les joies de la danse, que l’on aura à nouveau le plaisir d’embrasser ses proches, de voyager, d’aller au spectacle ou de profiter d’une terrasse de café.
C’est la seule lumière que l’on voit au bout du tunnel : le vaccin ! Un vaccin nommé désir. •