par Max Simeoni
Ce texte a été écrit lundi, la veille où Corse-Matin titrait sur toute la Une « L’Ombre d’un recours sur la 2e de Haute-Corse ». Je n’ai rien modifié.
On pouvait craindre une abstention accrue. Elle est restée élevée. On voyait les trois députés Autonomistes réélus en bataillant un peu, le service minimum pour ainsi dire.
Certes Paul André Colombani du PNC, n’a eu aucun nationaliste concurrent, il a donc fait une campagne sans transes.
La marche tranquille de Michel Castellani allait de soi, sans un opposant avec suffisamment de voix dans sa musette pour être capable de mobiliser tous ceux qui sont, pour des raisons diverses, contre l’autonomie ou qui prennent date en vue d’un parcours politique.
Celle de Jean Félix Acquaviva, on l’imaginait relativement facile au départ, faute de bien connaître son outsider… le coup passa si près que le chapeau tomba… 156 voix à peine !
La surprise agréable on la doit à Romain Colonna qui fait un score remarquable inattendu face à Laurent Marcangeli malgré la candidature au 1er tour de Jean Paul Carrolagi, qui a eu l’intelligence et l’honnêteté politique en se retirant, de dire « aucune voix n’ira à Droite ».
Et maintenant à Paris au Palais Bourbon, le Président Macron ne dispose que d’une majorité relative. Où va-il trouver des voix pour la rendre majoritaire ? Pas, semble-t-il, dans les groupes de Mélenchon ou de Marine. Le LR paraît le plus conforme idéologiquement. Or Christian Jacob vient d’annoncer qu’aucun accord n’est envisageable avec Ensemble ! (ex-LREM). Le parti est dans l’opposition à Macron. Se fait-il désirer pour in fine exiger plus en jouant sur sa position de parti charnière faiseur d’un roi « qui est nu » a dit son leader ? J’aurai tendance à penser qu’il mise sur l’effondrement de Macron pour que LR soit le pivot d’une Droite démantelée à reconstruire… que ce soit du fait d’une dissolution à cause d’un Parlement ingouvernable, ou que, cahin-caha, il finisse une mandature chaotique et discréditée par tous les problèmes et les promesses faites d’un changement de méthode et les priorités de l’emploi, de la réforme hospitalière, de l’enseignement, des retraites… la cour est pleine, n’en jeter plus… peu de moyens, et qui diminuent chaque jour…
Le calendrier insulaire sera impacté selon l’expression à la mode, voire même obsolète.
Madame Borne, Première Ministre a donné sa démission au Président Macron qui l’a refusée. Elle avait un gouvernement sur papier qui n’avait pas encore tenu son premier Conseil des ministres. 2 ou 3 d’entre eux sont disqualifiés par anticipation selon la règle voulue par le Président de ne pas perdre leur mandat de député pour conserver le poste de ministre.
Le Président complèterait le gouvernement de Mme Borne d’ici quelques jours qui sera en pool de siéger pour son premier Conseil des ministres. Malgré son échec à la législative, Mr Darmanin sera-t-il encore le Mr Corse de la tractation qui doit parler de tout « sans tabou » avec la large délégation conduite par le Président de l’Exécutif insulaire ? S’il se retrouve ministre de l’Intérieur, il aura fort à faire pour la mise en place du Parlement, des groupes, et la recherche d’un complément de majorité afin que Macron puisse gouverner et ébaucher quelques réformes… en somme résoudre la quadrature du cercle…
Macron pensait avoir évité le pire : plus d’élection pour sa personne, et un volet social politique plus proche des moins pourvus (60.000 précaires, autant sans doute de pré-précaires, en majorité des Corses d’origine dont le nombre est connu mais le chiffre très peu publié…)
L’idée de cette tractation Darmanin a émergé depuis mars dans l’agitation du décès d’Yvan Colonna sauvagement agressé en prison de haute surveillance. Sa date a été différée, les troubles de rue prenant une allure insurrectionnelle, puis pendant la période électorale de la Présidence de la République et des législatives. Darmanin est de retour sur papier pour le moment. Vu des ministères à compléter et une majorité au Parlement qu’il faut trouver, la tractation devra encore sans doute attendre une stabilité de la gouvernance. Frà pocu ? Ma chì lò sà ? Croisons les doigts.
Sur place, les politiques et des socio-économiques sont fébriles. Nombre sont ceux qui veulent être de la délégation à Paris. Dans la capitale c’est la grande incertitude et l’anxiété, voire pour certains politiques l’angoisse. Personne n’est assuré d’avoir ou de miser sur un bon cheval dans une course pleine de hautes haies ou de larges fossés à franchir.
Sur l’île, « Gilles couche-moi sur ta liste », à Paris « la tractation bien sûr… dès que possible ».
Cette mandature des élus « locaux » majoritairement nationalistes a marqué quelques points importants. Je cite en vrac la présidence des îles européennes de Gilles Simeoni, suivie de l’action de François Alfonsi (et d’autres) à Bruxelles a donné aux États européens la recommandation de soutenir les régions sur leurs territoires. Il y avait eu auparavant la Charte des langues régionales et minoritaires du Conseil de l’Europe votée en 1992 et entrée en vigueur en 1998 que la France très minoritaire avait fini par signer sans l’avoir ratifiée, puis en 2002 le rapport de l’Unesco sur le sujet concernant le sort mondial de ces langues. Sans compter sur place l’action constante remarquable des culturels et des enseignants de la langue.
C’est une évidence : « persu a lingua, persu u Populu ». Divisions pour des mandats illusoires, électoralisme de poux montés sur leurs égos (j’exagère à peine, je me défoule…)
La crise de l’État jacobin ne fait que commencer. Un pays, un Peuple ne peut se satisfaire indéfiniment d’un rôle majeur qu’il a joué à un moment de l’histoire.
Le peuple français de la Révolution de 1789 et nous d’un Pasquale Paoli.
Arrêtons-nous de nous gratter et œuvrons à préparer la Corse de demain, celle de nos enfants sur une Île si belle, Kallisté selon les grecs qui s’y connaissaient en beautés. Il faut la mériter. •