Corci à noi

La pyramide de la République est noyée dans le brouillard. Les primaires de droite ont fait chou blanc. Le parti LR peut-il revenir sur le choix de ses électeurs ?

Que le candidat choisi démissionne ou soit inculpé au plus vite !

Juppé refuse d’être le « désigné faute de mieux » et laisser la liberté à des candidatures individuelles revient à dire que le parti Les Républicains n’est plus viable. Pichji in capu !…

Benoît Hamon, l’habituel opposant interne, est la pochette surprise des primaires de la gauche. Il paraît étriqué dans son maillot de champion du parti et de rassembleur de la gauche.

Dans l’île, les relais de la droite ont joué ces primaires comme un course de cheval disputée dans la brume. Chacun son favori, aucun ticket gagnant.

À gauche, ils surnagent après un naufrage.

Profusion de candidatures dispersées, peu propices pour enclencher une dynamique. Les natios devraient être à l’aise. Il n’en est rien. Eux aussi pataugent dans trop de candidats législateurs… à Paris. Ils en sont à bricoler des primaires à la bastiaccia. Dans le centre, silence radio, des murmures… dans le Sud on tire à hue et à dià, dans les coulisses…

 

Comment poursuivre l’entente indépendantiste-autonomiste majoritaire à la CTC ? Elle peut poser des problèmes internes à chaque composante. Chacun sous sa bannière au premier tour et appui au premier en tête pour le second tour ou partage des circonscriptions ? Et échange des suppléants ? Rafistolage laborieux.

Le pire est sans doute à venir dans les élections pour l’Assemblée unique de décembre 2017, dans deux petits mois… Ivresse d’une course à l’éligibilité, coude contre coude et crocs en jambes ?…

On pourrait envisager que l’élection territoriale de fin 2017 étant trop rapprochée, il serait logique de maintenir les élus en place.

Qui peut fonder sur une logique désintéressée qui présiderait aux comportements politiques des rêveurs d’éligibilité, de ceux qui pensent le mériter ou que c’est leur tour ?

En fait, les crises différentes s’entremêlent : planétaire, économique, financière, numérique, flux migratoires, on dira de la mondialisation, de la globalisation, la crise de la Ve République jacobine et la crise insulaire au sein des deux premières.

Si la crise hexagonale est le poisson qui commence à pourrir par sa tête parisienne, les difficultés des natios sont d’une autre nature. Dans l’opposition leurs luttes sur le terrain, leurs idées » ont pu progresser malgré des erreurs.

De nos jours, tout le monde est pour la langue corse y compris les gouvernants de droite et de gauche mais ils y mettent des taquets jacobins. Le bilinguisme, pas de coofficialité. Or sans elle le déclin de la langue est inexorable (rapport de l’Unesco de 2002-2003 sur les langues minoritaires). Elle est le préalable pour mener une action volontariste politique et sociétale.

 

Pour mettre à l’abri le patrimoine naturel des spéculateurs de l’immobilier et du tout tourisme, les lois ordinaires peuvent suffire, le statut de résident est inconstitutionnel, il est discriminatoire, contraire à l’égalitarisme républicain… Nombre de démocraties en usent, la Suisse serait-elle moins démocratique et moins « universelle » que la République française ?

Quant à une fiscalité patrimoniale ou incitative de l’économie, pas de droits fermes reconnus, quelques dérogations temporaires, quelques rallonges de crédits maintenant le système de dépendance, à peu de frais… À telle enseigne que la moindre d’entre elle est perçue comme une victoire, « victoire pour un ballon d’oxygène » ? Et la pression pour le retour au droit commun évite que l’exception ne devienne la règle. Va et vient, qui tient le yo-yo et en joue ?

Si la crise de la Ve République est une crise de régime, il manque à celle de l’île pour poursuivre le projet natio un vecteur tout terrain, une organisation révolutionnaire démocratique. Les béquilles institutionnelles acquises ne sont pas assez solides pour avancer sur le parcours qui reste à faire vers le but à atteindre : la reconnaissance d’un Peuple et de ses droits.

Avoir une conscience de Peuple, de la responsabilité de son avenir menacé ne peut pas se complaire dans un esprit de particularisme îlien avec danses folkloriques autour des urnes.

On tergiverse : comment définir ce « peuple corse » ? Une population qui réside plus ou moins ?

Mettre l’accent sur la notion de Peuple serait dépassé, une tutelle obligatoire, rassurante? Bref on y croit réellement ou plus ou moins. Un Peuple qui voit le danger réagit-il pour l’écarter ou se laisse-t-il délivrer des calmants ? La volonté d’agir ne peut exister valablement qu’avec une conscience lucide. Combattre ou atermoyer en se cherchant des excuses. Maintenir l’idée de Peuple corse, le faire passer de son cadre agro-pastoral agonisant à celui des affaires du tout tourisme, de la spéculation, de la dépossession tout en restant lui-même et maître de son destin est tout simplement un drame historique qui n’a que faire des excitations électoralistes.

 

La première partie du chemin, celle du témoignage, est accomplie, la deuxième est plus raide, plus compliquée. Elle ne peut être que collective et démocratique.

L’institution CTC « spéciale» n’est que de la gestion un peu améliorée dans le cadre général du dogme jacobin. Mieux que rien ? À peine ! La priorité est à l’organisation sur le terrain au sein du Peuple pour l’aider à trouver les ressorts de sa survie dans un cadre général encore plus difficile. Maintenir le lien collectif avec sa terre, réduire l’individualisme, dissiper les miasmes électoralistes. La vérité d’un Peuple et son salut ne sauraient être encadrées par un système qui nie son existence pour le faire disparaître.

par Max Simeoni