Législatives

Élections : un jeu à portée limitée

Élection présidentielle terminée, fin mai les législatives et six mois après les territoriales. Le tourbillon électoral ne fait que commencer avec un Président qui veut réformer en profondeur, qui a donné des investitures, qui en garde quelques unes en attente pour élargir sa majorité sur la droite.

À l’instant où j’écris, les médias annoncent que le Président de la République a pris comme Premier Ministre Edouard Philippe, juppéiste notoire, et que l’on connaîtra demain, mardi 16 mai, le gouvernement.

Balayer l’ancien système revient à dégager tous les personnels qui en ont vécu, seule une poignée d’entre eux pourrait être recyclés s’ils coupent tous liens avec leur parti. L’espoir des laissés pour compte ne peut résider que dans l’opposition classique et c’est dire que le rassemblement dans chacune des anciennes chapelles ébranlées devient une question de survie pour les carriéristes. La bataille des législatives devient cruciale et c’est dans une course de vitesse qu’elle va se livrer.

 

À droite, on a compris et le regroupement est en cours, reste à savoir combien vont se laisser «débaucher», et Marine n’a plus la main…

À gauche le PS est anéanti, il ne peut qu’éviter la noyade…

Mélenchon se place en refondateur d’une gauche plus anticapitaliste, moins sociale démocrate.

Le PS, ce qu’il en reste à cette heure, ne peut pas accepter de n’être que des pièces récupérées à la casse. Ce problème concerne tout le monde politicien français, les habitués des palais parisiens, les notables départementaux, régionaux, les maires des villes… bref tout l’échafaudage qui s’est appuyé sur le centralisme politique parisien jacobin. Vont-ils pouvoir résister à ce que les citoyens ont clairement exprimé: la fin de ce système des partis alternants à Paris et leurs promesses non tenues, leur incapacité à répondre à la crise mondiale… tout ce qu’un Macron veut incarner, la fin d’un monde politicien obsolète? Les citoyens ont bien voulu dire leur ras-le-bol en votant Marine, droite extrême pour des frontières contre l’Europe libérale financière et contre l’envahissement migratoire, et Macron, contre le système des partis alternants avec des hommes nouveaux ou recyclés.

S’il a une majorité cohérente qui le soutient, il pourra essayer de réformer et il faudra payer le prix.

Mais qui paiera ?

Bref en un mot le système est condamné, il s’est autodétruit.

Mais les Français sont-ils prêts à tout déconstruire du haut au bas de la pyramide jacobine des républicains ? Les proximités locales ne sont-elles pas autant d’adhérences qui conduiront aux mêmes comportements? Macron aura changé des têtes fanées dans les ministères parisiens mais pas tout le système des mauvaises herbes…

 

Et nous, les natios, peut-on se réjouir et attendre une véritable ouverture ? Selon moi non, carrément non. Le problème corse est d’une intensité minimale en regard de l’énormité du problème hexagonal. Nous n’avons pas une présence, un poids suffisant pour l’inscrire dans les enjeux qui convulsent l’État républicain.

On provoque de temps à autre un peu de grattouille. On nous donne des espoirs et un peu d’eau sucrée, on nous berce… on nous gronde, on cherche à nous culpabiliser…

Mais on ne nous accorde rien sur l’essentiel minimum du Padduc (coofficialité, résidence, fiscalité), on nous écoute, on nous reçoit et cela nous fait une belle jambe.

 

Et nous jouons le jeu. On est dans des institutions insuffisantes pour les objectifs « historiques ».

Se présenter aux élections ? Oui, il faut réduire les moyens des clans et des jacobins. Mais en se contentant de conduire leurs trains, on finit dans leurs gares et l’impasse. L’essentiel de notre effort doit consister à obtenir un droit légal de reconnaissance du Peuple Corse et de ses droits.

Traiter avec le pouvoir c’est médiatique, cela fait image mais la réalité du projet « historique » ne peut pas se résoudre en images de bandes dessinées.

On présente des candidats comme députés qui espèrent relayer l’Exécutif auprès du gouvernement et qui vont porter notre bonne parole dans les travées du Parlement pour convaincre, pour plaider la cause ? On oublie un peu vite que quand on veut révolutionner un système oppresseur, il s’agit d’un rapport de force et que cela gêne des intérêts personnels y compris dans son camp. L’élan doit être suffisant pour passer outre.

 

Jouer le jeu des élections dans de telles institutions ne suffit pas.

Lui consacrer presque toute notre énergie est une dérive périlleuse.

Penser que vu le maintien du nombre des suffrages est un signe de progression possible de notre force est une erreur. En effet on peut dire que l’effondrement des clans insulaires est surtout lié à la crise des partis hexagonaux.

Ils ne savaient plus où donner de la tête, ils ont tenté de choisir une tête gagnante et ils ont tous perdu, les électeurs continentaux ont laissé Marine et Macron comme seul choix. Le Pen père et fille ont permis au front républicain de se sauver et de continuer le système, cohabitation ou non et faute de se réformer il a implosé à cette présidentielle. La réforme à faire est monumentale.

Macron a sept travaux d’Hercule devant lui. On va jouer le jeu, attendre un mois ? Attendre qu’il réussisse et nous contenter d’une promesse d’option vaguement girondine? Ou régler nos contradictions qui sont criantes ?

Pourquoi encore trois composantes, si ce n’est pour continuer l’alliance électorale et le jeu des embrouilles électoralistes qui risquent de nous tétaniser avec des équilibres à respecter sur la liste et les postes éligibles. Et même si on passe ce cap aura-t-on une dynamique pour accélérer notre course ? Des électeurs votent natio par déception comme d’autres ont voté Marine qui a réalisé son meilleur score dans l’île, quelques-uns ont voté aussi contre nous en douce en la votant.

 

Le bon sens est bien un seul mouvement « des modérés », démocratique bien organisé, ouvert, capable de pédagogie pour convaincre encore plus de Corses qui en toute conscience, en toute confiance puissent faire converger leur volonté pour tirer le meilleur possible des institutions, ce minimum qui est de diminuer la charge de vitriol jacobin et construire la force historique d’arracher les droits pour le Peuple et les moyens de maîtriser son destin.

Max Simeoni.

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