L’enthousiasme en berne

La semaine dernière, j’exprimais mes craintes tout en gardant espoir. Cette semaine, mes craintes se sont renforcées et, du coup, mon espoir vacille… Un bref rappel pour expliquer l’aggravation de mon scepticisme.

 

Un grand moment d’enthousiasme, le 15 octobre 2017, quand le Congrès de Corti vote la fusion des trois mouvements autonomistes (PNC, Chjama naziunale, Inseme) et deux mois après le vote pour la CdC donne une majorité « absolue » à une coalition électorale faite des autonomistes non encore fusionnés, avec les indépendantistes de Corsica Lìbera qui peuvent être associés, le FLNC ayant mis fin à son action clandestine.

Les majoritaires n’ont aucune opposition valable, les partis traditionnels parisiens et leurs relais locaux ont été balayés par le raz de marée du dégagisme incarné par le Président Macron. Un rêve, un miracle !

 

Mais on passe vite à l’inquiétude quand ce Président méprise nos élus par un cérémonial provocateur lors de l’anniversaire de l’assassinat du Préfet Erignac et que, malgré cela, les autonomistes se tortillent pour ne pas fusionner sous des prétextes fumeux. La fusion n’aura pas lieu.

Cependant le sigle Femu a Corsica est lancé, « la porte reste ouverte »… la baraque, portes et fenêtres, est ouverte à tous les courants d’air, à toutes les rumeurs, à toutes les interprétations mal ou rarement bienveillantes, à toutes les interrogations sans réponses, qui engendrent plus d’opacité, d’incertitude, de malaise. Le champ est libre pour la fièvre électorale.

L’enthousiasme n’est plus qu’un souvenir. Le rêve pour moi désenchanté peut finir en cauchemar.

Que penser quand les autonomistes ne fusionnent pas, que certains déclarent néanmoins qu’ils restent unis, sous l’étiquette de « Per à Corsica » qui n’est que le nom d’une liste de coalition électorale reconductible pour les autres nationalistes de Corsica Lìbera, ou pour l’ouverture à des non natios ? Ils voulaient alors recueillir sans frais les fruits d’une victoire certaine en votant la fusion ? Elle est refusée depuis car fusion plus élargissement veut dire partage possible de positions éligibles sur listes.

 

Deux années de perdues et des perspectives inquiétantes.

Sans un mouvement démocratique solidement implanté et rodé, sans une organisation active consciente de son rôle de convaincre les Corses et de les amener à faire céder le jacobinisme étatique, la cause du Peuple Corse reste sous la menace d’extinction qui ne fera que grandir. Deux années de perdues aussi par ceux qui voulaient cette fusion, à palabrer, les six mois passés prévus pour la commission de trente membres qui devait préparer l’AG constitutive de Femu a Corsica, il fallait faire le constat de l’impasse, convoquer une AG et s’en remettre aux militants.

La situation est déplorable. Les élus de la majorité « absolue » électorale sont donc à l’ouverture du cycle de trois élections en deux ans. La partie autonomiste est déjà en opposition dans le cadre de R&PS et de l’ALE pour les élections européennes du 26 mai. Au mieux des séquelles invalidantes au pire « nuits et brouillards ». Les élus de Femu a Corsica doivent mettre en place la base de leur organisation selon les statuts votés en octobre 2017, « affinés » depuis, compliqués pour tenir compte d’une double légitimité celle des militants et celle des élus du suffrage universel.

 

C’est une construction qui, d’un point de vue démocratique, emprunte un sens interdit. En effet la démocratie après débat sur un programme désigne les candidats pour les élections.

Or, dans notre cas, ce sont les élus d’une partie d’une coalition électorale qui se cherchent une base dans le nombre de leurs électeurs ou ralliés à leurs personnes… sous l’emprise prédominante de leurs réélections prochaines.

Pour échapper aux tentations de l’électoralisme dans de telles conditions il faut avoir conscience de l’impuissance des mandats à mener le combat pour la survie de notre Peuple sans son adhésion profonde, lucide et déterminée.

Commencer la construction d’un mouvement capable de l’y amener ne peut, sans danger, se complaire dans un électoralisme à courte vue, fait d’égos érectiles et friands de petits avantages. Commencer à construire une force historique par le toit est une oeuvre difficile où la part du devoir et de l’abnégation ne souffre aucune complaisance. Si on rechigne par trop à cet effort sur soi-même, on est voué à l’impuissance et à l’échec de notre cause historique. On reste pris aux pièges d’une «Nomenklatura» avec toutes les combinaisons tortueuses de ses composantes.

Il n’est jamais trop tard pour prendre le bon chemin à condition qu’il soit éclairé si nous sommes persuadés de la justice de notre lutte pour notre Peuple sur sa Terre, celle de nos enfants.

Max Simeoni.

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