On ne sauve pas un peuple par procuration

Méli mélo, de tous côté, ça déraille… Dans ce contexte, les bons docteurs se pressent au chevet de la Corse, attisés par l’occasion de renforcer le socle de leur carrière politique. • Non la Corse et son peuple, ne peuvent attendre encore avant de recevoir ce dont ils ont besoin pour survivre. • Les forces natios doivent maintenant organiser une défense efficace, sans perte de temps, car il n’y a plus de Pasquale Paoli pour sauver la Corse.

Ils sont légions les “ bons docteurs ” qui se pressent au chevet de la Corse ! Et, parmi eux, nombreux sont là pour saisir l’occasion de se construire une réputation, socle de leur carrière politique.

On les observe ainsi, à la recherche de soutiens parisiens, espérant que les partis électoraux, de droite et de gauche, renaissent de leurs cendres. En attendant… il leur faut composer avec un Président, élu la foudre en main, et pouvant à sa guise repêcher quelques serviteurs dociles.

Aussi, pour exister, c’est tout naturellement que ces bons docteurs s’agitent contre les natios, encouragés par Jupiter.

Ils vont contre le Padduc pourtant voté par tous les partis de la CTC sous Giacobbi. Ils s’affirment pour le bilinguisme, mais contre la co-officialité. Pourtant indispensable pour sauver la langue Corse.

 

En atteste, le Conseil de l’Europe et sa Charte des langues Minoritaires adoptée par son Parlement en 1992. Pendant de longues années, des juristes et linguistes de tous les pays ont travaillés en commission au sein desquelles les experts français “ freinaient ” pour rendre cette charte inconsistante, voire pour l’empêcher. La commission a fini par sortir un texte qui laisse à chaque État membre la possibilité du niveau du soutien qu’il entend accorder à “ses” langues. Chacun devant prendre un minimum de trente-cinq articles. L’objectif étant de les protéger et les promouvoir comme patrimoine culturel européen, de favoriser leur emploi dans la vie privée et publique. Le préambule justifie la Charte en se réclamant de la Convention européenne des droits de l’homme et des accords d’Helsinki.

Dans son rapport de 2003 sur la Vitalité et la disparition des langues, l’Unesco identifie neuf facteurs permettant d’établir un diagnostic sur l’état d’une langue et sur les mesures à prendre.

Concernant la langue corse, tous sont défavorables.

Le facteur 7 énonce que, lorsque sur un territoire une seule langue est officielle, il s’agit d’une politique d’assimilation forcée.

On peut ainsi mesurer toute l’hypocrisie des jacobins qui jouent sur le manque d’informations et les peurs qui en résultent. Ils disent, par exemple, que la coofficialité porterait préjudice en termes d’emplois, de carrières, et serait discriminatoire. À la chute de Franco, le gouvernement catalan a mis en oeuvre la co-officialité prévue par la Constitution.

L’enseignement étant de sa compétence, il a décidé d’une période de cinq ans pour que les enseignants hispanophones soit en mesure d’enseigner leur matière en catalan. Au terme, et à défaut, ils ne renouvelaient pas leur contrat. Il n’y eut qu’un minimum de défections.

Toute réforme, que ce soit pour la co-officialité ou pour un passage à l’autonomie ne peut, ni se faire du jour au lendemain ni porter atteinte à des intérêts légitimes.

On peut toujours jouer sur des délais, sur des règlements appropriés, à condition d’avoir les leviers de la loi.

En Corse, il s’agit de rétablir une injustice historique faite au Peuple, à sa Terre, à sa culture.

Injustice faite par le jacobinisme de l’État hypocritement égalitariste.

Notre émancipation politique est justice. Elle s’inscrit dans toujours plus de transparence et de démocratie. C’est un combat de citoyens, de patriotes responsables et solidaires où chacun doit être à la hauteur de l’enjeu qui est, sans se payer de mots, historique. Il concerne chaque Corse mais ne peut gagner qu’avec l’ensemble : par un Peuple face à son destin.

Les natios n’ont été qu’une avant garde. Ils doivent donner l’exemple et dépasser leurs limites individuelles par une action collective.

 

Action collective qui doit être à même de produire une intelligence collective. Et pour cela, de faire surgir une organisation immergée parmi les siens : son Peuple.

Ce dernier pourra alors être conscient du danger sans céder ni au fatalisme ni aux donneurs de leçons d’un pragmatisme étriqué. Celui-ci étant, le plus souvent, le reflet d’une ignorance des problèmes. Tel est le cas, illustration caractéristique, de propos sur la langue entendus ça ou là, et dans lesquels certains défendent l’idée que “ le bilinguisme suffit. La coofficialité étant impossible, impossible à obtenir… “

D’autres fois encore, ce pragmatisme affiché pourrait cacher des intérêts égoïstes laissant, par exemple, entendre que le Padduc est un frein pour l’économie.

Les natios ont encore beaucoup d’efforts à faire pour donner l’exemple. Ils prêchent la démocratie.

La pratiquent-ils à l’interne suffisamment ? Ils fustigent l’électoralisme des clanistes. Sont-ils purgés de toutes les tentations ? On peut en douter quand on voit l’élaboration de leurs listes de candidats.

Pourquoi les dits modérés mettent- ils tout ce temps à fusionner?

Quel que soit leur mérite par ailleurs, pour convaincre d’autres Corses, ils ne doivent pas se satisfaire de leurs carences qu’ils peuvent corriger.

Avant Aleria déjà, j’écrivais dans Arritti pour défendre l’idée qu’il n’y aurait plus de Pasquale Paoli pour sauver la Corse. Et que, pour ce faire, il fallait dorénavant que plusieurs générations montent au créneau.

Elles y sont. Faut-il maintenant qu’elles sachent organiser une défense efficace sans perte de temps. Ceci afin de ne pas “ se promener ”, à quelques-uns, d’un ministère à l’autre, du Luxembourg au Palais Bourbon, dans le labyrinthe des commissions, aux sons des mélopées jacobines sur les articles 72, 73 peut être, 74 plutôt non.

 

Non la co-officialité n’est pas une outrance. C’est une nécessité absolue.

Non l’autonomie n’est pas une obsession, c’est le début d’un renouveau possible.

Certes nos présidents, nos députés doivent voir, expliquer, négocier mais ils sont dépendants d’une force insulaire. Avec elle ils feront reculer le jacobinisme qui empoisonne notre Peuple et je pense qu’ils seront utiles aussi à la France entravée, en retard de démocratie.

Notre cause est juste.

La République n’a rien à perdre à nous aider.

Choisir de rester Français ou être Corse ? Si tel est le dilemme le choix est vite fait. À la République de faire en sorte que les deux soient compatibles, en cessant de nier l’existence du Peuple Corse.

Mais de toute façon nous savons, nous natios, qu’on ne sauve pas un Peuple par procuration.

Max Simeoni.