On y est jusqu’au cou. On nage dans la mare pleine de grenouilles et de nénuphars, dans les eaux saumâtres et troubles des élections territoriales dans six mois. Si la situation est lisible, l’incertitude est pour l’heure totale. Tous les coups sont de sabot*.
Deux départements. Le Sud où Marcangeli se place d’emblée comme le leader de la droite légitimée par le suffrage universel et de tous ceux qui veulent en finir avec l’expérience décevante des natios qui « ont fait perdre du temps à la Corse ». Dans le Sud où le PNC de JC. Angelini, composante de la majorité nationaliste, en s’emparant du bastion de Portivecchju compte bien jouer un rôle d’importance accrue.
La Haute-Corse tient la mairie de Bastia qui a été arrachée à la famille Zuccarelli et d’où les aigles bagués « natios » ont pris l’envol sur toute la Corse. Ceux qui ont grandi au nid de la citadelle bastiaise sont prêts à se défendre pour ne pas être délaissés, oh pardon, je veux dire délistés. Tout ceux des Comcom ou du Syvadec s’agitent pour former des escadrilles à géométrie variable de survie.
En fait, du côté des non-natios comme des restes classiques de gauche et de droite, l’opportunité est à ceux qui ont le meilleur profil pour faire tenir un regroupement hétéroclite, leurs partis centralisés à Paris effondrés, localement ils ne sont que des ions sans attache qui tentent de s’unir pour ne pas disparaître. Le LREM du Président Macron a du mal lui-même à prendre racine. C’est dire la volatilité générale. Il peut encore, certes, y avoir d’ici six mois des changements ou des évènements imprévisibles. À cette heure, tout bouge, envasé dans la mare.
Les natios y sont jusqu’au cou comme les autres. Majoritaires avec des opposants disloqués, ils se sont employés à jouer au plus grand diviseur. D’abord entre composantes de leur coalition victorieuse et majoritaire « absolue ». Chacune cherchant à tenir leur président par une manche ou le revers du pantalon pour qu’il n’ait aucune envie de penser à s’ouvrir en dehors d’elles à leur détriment. Il se trouve qu’il n’y a personne pour l’instant qui puisse le remplacer.
Le Président de l’Hexagone a eu une majorité et des opposants complètement lessivés et essorés, mais, dans sa majorité, quelques fissures apparaissent. Le Président de l’Île voit sa majorité inquiète en risque d’incohérence. Les deux ont du mal à tenir les rênes d’attelages mal montés. Sans compter avec les imprévisibles divers et ce Covid19 qui n’a pas renoncé à battre la campagne.
Macron Président joue l’international pour redorer son blason. Au Nord, il consolide le couple franco-allemand avec Angela Merkel. Au Sud, il se propose fédérateur des États européens méditerranéens, défend la Grèce contre la Turquie de Erdogan qui se disputent des eaux pétrolifères. Il réunit ces États à Aiacciu. D’une pierre deux coups, il honore deux maires qui vont entrer dans son jeu électoral contre les nationalistes.
Le système claniste, sous couvert de casaques des partis parisiens mais simples courroies de transmission, s’est effondré car la VIe République de De Gaulle voulait un pouvoir fort pour que le jeu de quilles des partis de la IVe impuissants cesse car il mettait la France sous tutelle des Américains.
Le flottement des États européens perdant leur Empires coloniaux et usant leur forces dans des conflits les conduit à faire l’Europe pour espérer faire le poids avec des États continentaux massifs, les USA, l’URSS et en dernier lieu la Chine, les vainqueurs de la dernière guerre mondiale. Ces États d’Europe n’ont plus d’autres choix.
Dans cette Europe en gestation laborieuse, la France reste une République crispée sur son jacobinisme centralisateur. Elle est un frein pour l’Europe qui doit trouver son unité dans sa diversité de Peuples, de cultures, de langues, d’histoires de conflits devenus obsolètes.
Elle est un mur pour le Peuple Corse qu’elle a conduit presqu’à son extinction. Simu à l’ùltima.
Réservoir d’hommes à l’étiage, renouvellement de population présenté comme un progrès, tout tourisme du schéma de développement du rapport secret de l’Hudson Institut pour la Datar. La Corse, un marché captif pour enrichir les producteurs continentaux, elle est parmi les plus pauvres, les plus assistés (60.000 précaires et autant sur le seuil de la précarité). Elle ne maîtrise pas ce tourisme, elle ne maîtrise rien. Sa Terre est au plus offrant. La spéculation et les comportements mafieux ont le champ ouvert.
Face à ce destin programmé, l’Île est assimilée pour être avalée par le boa colonial.
Voir l’aveuglement des natios qui jouent aux élections pour des mandats dans des statuts qui les rend coupables de la fin de leur Peuple qu’ils juraient de sauver est une aberration, alors qu’ils devraient faire front commun comme dans une logique de guerre mais qui ne peut être que celle de citoyens conscients du danger et déterminés à le conjurer.
Nous avons eu quatre statuts particuliers (Deferre, Joxe, Jospin, Caseneuve) mais ils n’ont jamais été des petits vers l’avant, vers le but, vers le sauvetage du Peuple Corse. Ils n’ont été que des entraves pour nous maintenir dans la mare fangeuse.
Espérons le miracle quand même, mais si la mort de notre Peuple sur sa Terre advenait, la responsabilité des natios serait première car ils auraient perdu de vue l’essentiel, la nature du boa colonial qui les enveloppe de salive pour les avaler, et auraient laissé passer l’occasion face à un pouvoir jacobin qui n’a pas su muter à l’heure de l’Europe en chantier, eux ne jouant qu’à des jeux électoralistes entre eux. Misère de misère. La messe est-elle presque dite ?
*Le sabot est un instrument de jeu pour tenir un paquet de cartes et jouer dans un casino.