Plus que des mandats locaux, il faut un sursaut du Peuple Corse

par Max Simeoni
Pour le moment, le Covid19 mène le bal. Jusqu’à quand? De combien de mutations est-il capable avec des différences de contagiosité, de mortalité, de résistance aux vaccins ou demain à des traitements? Nous, humains sommes bien embarrassés pour atténuer les conséquences économiques qu’il entraîne et les mesures à prendre de limitation des contacts, pour anticiper faute d’une vision de l’évolution du virus, le temps de vacciner assez d’entre nous et de trouver un traitement efficace.

En début de saison, les acteurs touristiques s’insurgeaient contre tout frein à la venue des vacanciers. Aujourd’hui, ils estiment que les aides diverses de l’État et de la CdC ne peuvent pas suffire à sauver l’économie de l’Île et ils appréhendent le manque à gagner pour les vacances de février, de Pâques et pour la «saison» à venir.

Aujourd’hui, ils mesurent la fragilité d’une économie fondée sur le tourisme à plus de 30% du PIB. Le Corse Matin de ce lundi a titré deux articles: «L’économie de la Corse sous assistance respiratoire» et en page Bastia: «Le marché de l’immobilier n’est pas rattrapé par la crise».

Le piège est sans issue du moins à court terme. Et pour la majorité des insulaires plus qu’ailleurs, il reste à éviter une catastrophe puisque le mirage du «moteur de l’économie» le tourisme est en panne. Malgré les transes politiques à tous les niveaux des Institutions de la République rigide verticale des jacobins, changer de modèle s’impose même si les conséquences économiques et sociales de la crise sanitaires obligent les «responsables», les élus en premier à bricoler, à vider avec des sceaux les voies d’eau faute de pompes. Notre  société sophistiquée qui n’avait à penser qu’à son taux de croissance est périmée. Elle se doit d’être aussi assez robuste pour être moins fragile.

 

Ce moteur en panne en Corse, tout le monde y a cru. Vite après guerre avec la paix et «la civilisation des loisirs», la course au soleil a repris qui était avant guerre surtout initiée par les pays nordiques. Les touristes venaient sur nos plages pour bronzer à l’aise. C’était le temps de la chute proche  de l’Empire colonial. 1.000 km de côtes désertes représentaient un capital naturel à exploiter et comme toutes nos communes de l’intérieur et non seulement celles du piedmont avaient leurs transhumances côtières, elles pensaient en tirer quelques profits. Un tourisme en somme qui allait aider à nous moderniser, et à améliorer notre niveau de vie, à diminuer notre exode qui de l’Empire se maintenait vers les néons de la France continentale bénéficiant du plan Marshall.

La Corse étaient en train de finir de se vider. Elle était un réservoir d’hommes pour la République et son Empire colonial. Lui perdu, le recentrage sur une Europe à faire, la République doit développer ses ressources propres privée de l’aubaine coloniale. Elle fait tout un programme en 1958 de Plans d’Action Régionale. La vocation touristique de l’Île va de soi, n’est-elle pas  Kallisté «la plus belle» selon les grecs? Les Corses étaient fiers d’accueillir avec leur sens de l’hospitalité les visiteurs.

Le PAR prévoyait pour l’Île trois sociétés d’économie mixte, pour l’agriculture la Somivac, pour le tourisme la Setco et une pour le développement sylvopastoral qui n’a jamais vu le jour.

La Somivac a servi à accueillir les 18.000 Pieds Noirs en 1962 et la Sectco sur les cent hôtels n’en a fait que 2 ou 3. Mais le pot aux roses fut découvert quand l’ARC a dévoilé le plan secret de la Datar commandité à l’Hudson Institut. Son choix s’étant porté sur le scénario qui prévoyait 250.000 lits à créer en 10 ans et 70.000 agents à faire venir pour l’encadrement. La fin du Peuple, l’Île comptant à peine 160.000 hab. en 1960. Un des scénarios évoqués mais non conseillé par l’Hudson Institut.

En fait il est appliqué sans le dire. En une trentaine d’années la population a doublé par des apports extérieurs et la construction d’habitations «à valeur locative» dopée par des charges allégées place de l’Île sur le podium!

 

En réalité ce tourisme débridé, non contrôlé va contre la communauté des Corses. Il suffit de voir à qui profite le crime pour savoir où est le coupable. L’industrie touristique fait vivre nombre de commerçants locaux qui écoulent les productions réalisées hors de l’Île. Alimentaires à plus de 97%, matériaux de construction, vêtements et tout le reste. L’Île est un marché captif, même s’il enrichit quelques autochtones, la majorité ramasse les miettes. Elle est une colonie et par son patrimoine nature elle aiguise des appétits financiers.

Il faut vite changer ce système. Mais le Covid19 oblige  de sauver les meubles. Il faudra si on part du principe «de sauver» un Peuple menacé de disparition, par être en mesure d’exiger la reconnaissance de l’existence de ce Peuple et un statut d’Autonomie pour avoir les moyens de sa survie. Il faudra sortir du dernier statut, celui de Caseneuve qui comme les précédents n’en donne pas les moyens. Il est une illusion si on en reste à se disputer des mandats insuffisants pour une mission historique.

Les médias s’alarmaient la semaine dernière  du conflit des natios majoritaires, des propos de l’Exécutif local contre l’Exécutif élyséen. Ce changement de ton est inévitable. C’est le conflit d’un affrontement régit par la Loi du tout ou rien où il ne peut y avoir qu’un mort, notre Peuple. Le pouvoir central jacobin ne peut accepter de discuter avec des natios. Il n’a plus pour le moment des non natios qui étaient ses relais et son alibi. Le seul fait d’entrer en dialogue avec des majoritaires natios est un début de crédit qu’il consent à leur vocation de sauveteur d’un Peuple. Ce n’est pas admissible puisqu’il n’y a qu’une République avec une seule langue, un seul territoire, un seul État. Les élus locaux ne sauraient faire des lois, ni les aménager. Ils sont élus pour les appliquer. Il leur reste une partie de gestion sous surveillance des Préfets.

 

Le pouvoir central est unique sans partage. Il est pour lui indispensable de réduire la portée du crédit des natios. Il fait tout pour susciter des opposants in situ suivant l’adage de tout temps «diviser pour régner». Aux natios, et parmi eux les coalisés, il manque un Parti aux fondations populaires que les autonomistes devraient mettre en place, ils sont bien placés pour le faire tout en étant une garantie démocratique pour tous les autres natios. La démocratie est l’essence du combat nationaliste. Les deux vont de paire.

Électoralisme, Covid19, tout tourisme, crise économique, spéculation immobilière, prémisses de comportement mafieux, pour sauver le Peuple dans ce contexte, il faut plus que des mandats locaux. Il faut le Peuple et seul une organisation pour le gagner importe puisqu’on ne sauve pas un Peuple par procuration. Il ne trouvera des appuis que s’il se bat. •