L’incertitude devient étouffante. L’usure des responsables s’accroît. Les mesures palliatives deviennent des poisons.
Il est urgent de consolider la force nationaliste pour arracher le maximum de compétences et moyens et espérer rebondir lors d’une occasion favorable. La structuration d’une base solide en prise directe avec le Peuple est un impératif de survie.
Le suffrage universel permet de désigner nos représentants dans les institutions locales, mairies, conseils généraux (disparus avec l’Assemblée unique), institutions nationales députés et… Présidence de la République.
Fréquentes, les élections donnent le “pouvoir ” à la majorité, rarement absolue, le plus souvent relative, elle fait suite à des alliances au premier comme au second tour. Ces élections sont sensées être l’expression de doctrines concurrentes qui s’expriment à travers des programmes électoraux conçus pour l’intérêt et l’avenir collectif.
Mais, chacun sait que dans cette course au “pouvoir ” les idéaux sont dénaturés par des manoeuvres diverses, des alliances contre nature. Elles servent d’alibi. Souvent, l’électeur est amené à voter “plutôt contre” que “pour”.
Dans ce jeu, le cynisme constitue un avantage d’efficacité… l’histoire de l’électoralisme en est truffé.
Un culte à la personne
Dans la période actuelle, cruciale pour l’avenir du Peuple corse menacé de disparition, l’esprit d’électoralisme submerge les jouteurs du suffrage universel.
À droite et à gauche, dans le camp des naufragés de l’ancien système électoral, des têtes nouvelles cherchent à incarner les doctrines et à reconstituer les partis.
Par cercles, relais, réseaux, elles tentent de les structurer autour de leur personne, afin d’assoir une base populaire électorale. Il y a là grand risque de déviance génétique du suffrage universel car cette base sera conditionnée au suivisme, si ce n’est un culte à la personne.
Remède au virus jacobin
En deux temps trois mouvements, les natios sont devenus majoritaires absolus par l’alliance de deux familles : celle des indépendantistes, après qu’ils aient écarté la lutte armée clandestine, et celle des autonomistes qui, ponctuellement, n’ont pas pu éviter la violence ; comme à Aleria en 1975, où le développement agricole, conduit par la Somivac, trempe dans le scandale de la “ vinasse ”.
Aujourd’hui, sauver le Peuple corse, démocratiquement, revient à le convaincre de rallier l’idée d’expérimenter l’autonomie comme remède au virus jacobin.
Sans nul doute, l’émergence majoritaire des natios a t-elle été facilitée par l’effondrement du système électoral des partis de droite et de gauche.
Aussi, les natios, pour parler au nom de leur Peuple, à un Président inattendu, sorti des décombres parisiens, ont-ils voulu une ouverture consensuelle, associant le plus de Corses possible. Ils ont espéré en ce président jacobin, atténué par le “ contrat girondin ” dont il avait fait état.
Mais ce dernier entretient la mystification avec un jeu de yoyo de ministres. Il manoeuvre pour contenir la majorité des natios en remontant, mine de rien, la corde des clanistes, de tous les antinatios et opportunistes, qui pour vivre politiquement ont besoin d’avoir l’aval du pouvoir central. Puis brutalement il lance un ultimatum de reddition sans condition avec la mise en scène de l’anniversaire de l’assassinat du Préfet Érignac : “ Les élus locaux ne font pas la loi ” nous dit-il en substance. Traduisez: pas d’autonomie.
Les natios continuent l’offre de consensus insulaire et persistent à négocier. De l’article 74 de la Constitution, ils se laissent embarquer dans le yoyo constitutionnel des articles 72 de droit commun, 73 des DOM, et d’un article 72-5 pour l’île. Celui-ci, tout en l’arrimant solidement à la République, devrait permettre de prendre des mesures tenant compte de ses spécificités.
Le piège est refermé
Le piège s’est refermé. On le réalisera quand le Premier ministre définira le fonctionnement de l’article 72-5. Ce dernier consiste à pouvoir faire des propositions spécifiques au coup par coup. Propositions qui demeurent à la dévotion des multiples et longues procédures parlementaires ; et que le pouvoir central peut allonger, amender et dénaturer tout autant.
Reste à connaître le domaine des compétences et le niveau des moyens financiers. On le saura d’ici un an à la promulgation d’une loi organique qui devrait être négociée. On peut envisager une cueillette de mégots et un beau pataquès.
Comment sortir du piège ?
À ce stade qu’elle leçon tirer ?
Il est d’une grande urgence de consolider la force nationaliste pour arracher le maximum de compétences et de moyens et pour espérer rebondir à l’occasion favorable. Pour ne pas couler. Regroupement d’un côté des indépendantistes, de l’autre des autonomistes et affermissement de l’alliance des deux. Face à l’agression frontale imposée, configuration de la tortue des légions romaines pour ne plus reculer et avancer pas à pas. Ne compter que sur les forces du Peuple à mobiliser. Faire comprendre les manoeuvres sournoises.
La mise en place de l’Assemblée unique est une succession de pièges. Pas de moyens, pas de perspectives, 4500 fonctionnaires territoriaux à redéployer mais tous les problèmes sur les bras… Dans une telle conjoncture, aucun n’est résoluble et tous s’aggravent.
L’incertitude devient étouffante.
L’usure des responsables s’accroît.
Les mesures palliatives deviennent des poisons.
La structuration d’une base solide et cohérente en prise directe avec le Peuple est un impératif de survie, un tout ou rien.
Les miasmes d’un électoralisme qui accaparent les esprits et les calculs de “ gagne petit ” qu’il induit sont autant mortifères que cosmiquement burlesques.
La présence d’I Guardiani manifeste un besoin. Si elle ne sonne pas le tocsin, elle déclenche les sirènes de l’alerte générale.
Max Simeoni.