L’eurodéputé de la Corse devant la Commission européenne a plaidé pour la défense des minorités linguistiques, culturelles et politiques dans le cadre de l’instruction par les Commissions du Parlement européen de la pétition Minority SafePack organisée l’an dernier et qui a recueilli 1,3 million signatures de citoyens européens.
Minority SafePack s’inscrit dans le cadre des Initiative Citoyenne Européenne (procédure intégrée au Traité de Lisbonne) dont notre hebdomadaire s’est fait largement l’écho l’an dernier. Portée par près de 1,3 million de citoyens européens elle revendique la reconnaissance des droits des minorités et demande à ce que l’Union Européenne prenne des mesures pour en garantir l’application.
Les procédures ICE sont très contraignantes, et donc difficiles à mener au bout. L’une des conditions exigeantes est l’obligation de réunir au moins un million de signatures, de façon très contrôlée (visées avec les pièces d’identité des signataires) dans au moins un quart des Etats membres avec un seuil minimum de signatures (au moins 750 fois le nombre de députés européens de l’État concerné).
Seules cinq ICE ont ainsi pu franchir cet obstacle jusqu’ici.
Par sa réussite, l’ICE Minority SafePack permet de remettre au cœur du débat européen la question des droits des minorités, notamment culturels et linguistiques. La démarche a été lancée par l’ONG Union Fédéraliste des communautés européennes basée en Allemagne et elle a trouvé un écho dans tous les pays où des minorités souffrent d’un manque de reconnaissance politique.
Désormais, la demande est instruite par le Parlement européen, à travers trois de ses commissions : la Commissions Culture, la Commission des Pétitions et la Commission des libertés, qui ont entamé une série d’auditions auprès d’abord des porteurs de la pétition, mais aussi auprès d’experts, comme l’Unesco ou le Conseil de l’Europe. L’intérêt qu’elle suscite au sein du Parlement européen a été également défendu par l’intervention à l’occasion de ces auditions de nombreux députés des différents groupes.
Ainsi, François Alfonsi, co-président de l’intergroupe des Minorités, est intervenu le 15 octobre dernier pour le groupe Verts-ALE (lire ci-contre).
La prochaine étape de la procédure d’instruction sera un débat en plénière du Parlement européen, qui pourrait aboutir par le vote d’une résolution que le groupe Verts-ALE entend déposer à la session de novembre pour peser sur la possibilité de propositions législatives.
C’est donc tout un travail de lobbying qui s’engage actuellement pour les députés de l’ALE très sensibles bien évidemment à cette question.
La Commission Européenne sera dans l’obligation d’apporter une réponse au débat du Parlement européen, dans les deux mois qui suivent, au plus tard au mois de janvier. Si le lobbying abouti, cela pourrait déboucher sur des mesures législatives que les différents États membres devront également transcrire dans leurs lois. Il est évident que plus le vote de la résolution sera large, plus il pèsera sur cette issue heureuse pour la protection des minorités en Europe.
Bravo donc aux initiateurs de l’ICE et à tous celles et ceux qui ont soutenu et continuer de soutenir cette démarche. Il est nécessaire de rester mobilisés y compris dans les différents pays concernés, comme en Corse.
Les prochaines semaines seront déterminantes. •
Fabiana Giovannini.
«Monsieur le Président, Mesdames les Présidentes, merci de bien accepter ce débat qui pour nous est fondamental. L’Initiative Citoyenne Européenne est une procédure par laquelle l’Union Européenne peut être saisie directement par ses citoyens des questions qui leur paraissent essentielles. Le fait que l’ICE Minority SafePack arrive devant le Parlement européen avec le soutien de plus d’un million de signataires est la preuve que la question des minorités, de la reconnaissance de leurs droits politiques et culturels, est encore une question d’actualité en Europe. Je peux en témoigner en tant que Corse faisant partie d’un peuple qui a contribué à l’Histoire de l’Europe, et qui doit encore se battre pour être pleinement intégré à égalité de droits et de devoirs au futur de l’Europe. L’Histoire des États issus des grandes guerres du siècle dernier explique que de nombreuses minorités nationales et linguistiques doivent encore, trop souvent, lutter pour faire valoir démocratiquement les droits collectifs de leurs citoyens. En apportant une réponse constructive, ouverte et généreuse aux demandes de ces citoyens, l’Union Européenne contribuera au dépassement des conflits hérités du passé. Elle contribuera ainsi à préparer un avenir meilleur pour des dizaines de millions d’Européens. Le Parlement européen par le débat qu’il tiendra doit faire sa part, et aussi, je l’espère, par la résolution qu’il votera. Et je voudrais demander à Madame Joureva* que la Commission prenne conscience que cette question des minorités est cruciale, et que la Commission doit porter la plus grande attention à cette initiative d’un million de ses citoyens. »
* Commissaire en charge du dossier à la Commission Européenne.