L’initiative est partie d’une réunion de l’ALE, conjointe au parti politique et au groupe parlementaire. Elle a pris la forme d’un meeting tenu en direct avec les autorités politiques de Stepanakert, en la personne d’Arminé Aleksanian, vice-ministre des affaires étrangères du gouvernement du Nagorno-Karabakh. S’est jointe à elle Artak Beglarian, médiateur aux Droits de l’Homme et David Melkumian, parlementaire du Parti Démocratique de l’Artzakh qui, depuis 2015 (Congrès d’Aiacciu), est membre de l’ALE.
Plusieurs députés se sont branchés sur cette réunion internet dont le confinement du printemps a vulgarisé l’usage au sein du Parlement Européen. Cela a permis, avec l’aide d’interprètes intervenant directement en ligne, de faire passer le message d’un appel à la solidarité internationale par le peuple arménien agressé militairement par les forces armées de la dictature azerbaïdjanaise, et menacé de « purification ethnique » sur leur territoire montagneux adossé au Petit Caucase où ils sont présents depuis plus d’un millénaire.
À l’issue de cette réunion, François Alfonsi (Verts-ALE), Peter Von Dalen (député hollandais du PPE) et Sylvie Guillaume (socialiste française) ont pris l’initiative d’un courrier au Haut Représentant de l’Union Européenne pour les Affaires Étrangères. Il est proposé à la signature d’autres députés jusqu’au 12 novembre prochain (une douzaine l’ont déjà fait au 31/10/2020).
L’enjeu est triple. D’abord en finir avec les lénifiants « appels au respect du cessez-le-feu » qui, en s’adressant indistinctement aux deux parties, ont pour but d’éviter de nommer l’Azerbaïdjan comme l’agresseur. Or, depuis le cessez-le-feu de 1994, la paix était revenue au Nagorno-Karabakh, et c’est la décision prise à Bakou de lancer les hostilités contre le peuple arménien qui a créé la situation actuelle.
Deuxième objectif, en relation avec l’implication directe de la Turquie qui donne aux agresseurs une suprématie de moyens : préserver le peuple arménien de l’épuration ethnique au Nagorno-Karabakh, afin d’éviter une menace du même ordre sur l’Arménie entière dont les trois millions d’habitants sont placés au cœur d’un ensemble turcophone de 100 millions d’habitants entre le Bosphore et la Mer Noire. Le souvenir du génocide de 1915 ne peut être oublié !
Troisième objectif : amener l’Europe à décider une mission humanitaire qui soit un bouclier pour protéger les populations civiles, et faire barrage à toute tentative « d’épuration ethnique » dans ce territoire peuplé depuis toujours par le peuple arménien. Pour cela, la reconnaissance officielle de la République d’Artzakh par la communauté internationale est la seule garantie possible pour les Arméniens qui refusent d’être englobés dans l’Azerbaidjan qui revendique le contrôle de leur territoire.
Convaincus d’être engagés dans une question de vie ou de mort, les Arméniens mènent une résistance acharnée sur les lignes de défense qu’ils avaient édifiées ces vingt dernières années. Pour l’instant elles n’ont pas cédé si ce n’est des postes avancés en zone de plaine beaucoup trop difficiles à défendre face aux drones et aux bombardements. Mais il faut que monte la protestation d’une solidarité internationale puissante pour amener les conditions d’un arrêt de l’agression azerbaïdjanaise. Au Parlement Européen, un mouvement est lancé.
L’appel des eurodéputés en soutien au peuple arménien du Nagorno-Karabakh
«Monsieur le Haut Représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité et Vice-Président de la Commission Européenne,
L’agression militaire contre le Nagorno-Karabakh menée par les forces armées de l’Azerbaïdjan avec l’appui de la Turquie, a fait basculer dans la guerre cette région du monde.
La disproportion des forces est écrasante, et pourtant les combattants du Nagorno Karabakh résistent avec l’énergie d’un peuple qui sait qu’il en va de sa survie.
Seule l’expression d’une solidarité internationale forte permettra d’empêcher ce qui ne peut que finir en massacre si les défenses arméniennes sont bousculées. Il faut obliger l’Azerbaïdjan à cesser son agression militaire, à revenir sur la ligne de cessez-le-feu en vigueur depuis 1994, et à rejoindre à nouveau la table de négociation ouverte par le groupe de Minsk en vue d’une paix durable.
Aussi, les parlementaires soussignés demandent instamment aux autorités européennes :
– De dénoncer l’agresseur dans cette relance du conflit, l’Azerbaïdjan, dont les forces armées ont violé le cessez-le-feu qui avait assuré un arrêt des combats depuis presque trente ans.
– De condamner l’ingérence de la Turquie, qui fait planer la menace d’une agression future de l’Arménie, suite logique de l’offensive aujourd’hui lancée contre le Nagorno-Karabakh. Le souvenir du génocide arménien de 1915 ne peut être oublié.
– De lancer une opération humanitaire au profit des populations touchées par les bombardements systématiques de zones habitées par des civils.
– D’acter que le peuple arménien a une présence historiquement multiséculaire sur le territoire de l’Artzakh, et d’engager la reconnaissance de la République d’Artzakh comme nation indépendante, ce qui lui permettra une protection internationale effective contre de nouvelles agressions.
Nous vous prions de recevoir, Monsieur le Haut Représentant, nos plus respectueuses salutations. »