Ce vendredi 22 novembre, la quatorzième édition du Liet international, concours de chansons en langues minoritaires, s’est tenue pour la première fois en Corse. Cet événement européen, organisé cette année par la ville de Bastia en partenariat avec la Collectivité de Corse, promeut la défense et la diffusion des langues minoritaires.
L’« Eurovision des langues minoritaires », créé en 2002 en Frise, a vu onze artistes venus de toute l’Europe se produire cette année sur la scène de l’Alboru, offrant une visibilité médiatique aux langues minoritaires. Les artistes ont tous interprété des chansons nouvellement composées, obligatoirement dans des langues minoritaires européennes. De nombreuses langues ont été représentées cette année comme le breton, le frison, le bas-sorabe, le catalan, le ladino, le bas-allemand, l’occitan, le corse, le sønderjysk, l’allemand du Sud-tyrol et le sarde. Le jury, composé d’artistes indépendants originaires des régions des artistes en compétition, dont la corse Patrizia Poli, ont jugé les artistes et leur chanson sur des critères de diversité linguistique et géographique, l’originalité des créations ainsi que la qualité musicale.
Pour la Corse, c’est le groupe Una fiara nova, originaire de Castagniccia, qui a défendu notre langue avec sa chanson Qualcosa di tè. Le groupe, fondé par les frères Giovannetti en 2019 et composé de six musiciens, a été mené par la voix de Lisandru Bonini dans une composition inspirée de la paghjella et des chants sacrés. La soirée a également été l’occasion pour Doria Ousset, gagnante de l’édition 2022 au Danemark, d’interpréter son titre Roma. L’artiste avait remporté l’édition il y a deux ans dans la ville danoise de Tonder avec ce même titre Roma, morceau racontant un épisode douloureux vécu par la communauté corse de Rome au XVIIe siècle. Cette quatorzième édition a également permis à Jacques Culioli, gagnant de l’édition de 2008 avec son titre Hosanna in excelsis, de réinterpréter son morceau en compagnie de Yoan Casanova et de sa fille Delia Lucia.
La soirée s’est finalement clôturée avec la victoire d’Una fiara nova pour le vote du public et avec la victoire de Nani Vazana, avec son titre Una Segunda Piel en ladino, pour le vote du jury. •
Pauline Boutet-Santelli.
Tjallien Kalsbeek, l’âme du Liet
Tjallien Kalsbeek vient de Frise, la minorité linguistique qui a donné son nom (Liet veut dire chanson en frison) à l’Eurovision des cultures minoritaires, et elle est l’âme de cette manifestation qui tous les deux ans, quelque part en Europe, consacre une œuvre issue du foisonnement de ces cultures ignorées par l’Eurovision des États.
Il faut à Tjallien Kalsbeek développer des trésors de conviction pour mener les sélections des groupes qui se produiront, engager le partenariat avec la région qui accueillera à son tour l’évènement, et obtenir les financements indispensables pour arriver à un standard de manifestation parmi ce qui se fait de mieux en Europe.
La qualité des artistes sélectionnés assure le rayonnement de cet événement qui a lieu tous les deux ans. Après la victoire de Doria Ousset dans le Jutland de la minorité germanophone du Danemark, la Corse a été choisie pour l’édition 2024. La ville de Bastia et la Collectivité de Corse ont soutenu le projet, et le spectacle produit a rempli toutes les attentes.
La qualité technique impeccable a été encore une fois atteinte. La perfection de la forme est très importante, car elle porte le message que les cultures minoritaires évoluent autant que les autres à un excellent niveau professionnel.
La victoire de Jacques Culioli en 2008 avec son titre Hosanna in excelsis ne lui a pas simplement procuré un premier prix. Elle a aussi réussi l’enregistrement le plus abouti de sa prestation artistique. Le revoir a été un enchantement.
Entre deux manifestations du Liet, Tjallien Kalsbeek déploie toute son énergie pour choisir une prochaine étape, et plaider avec fougue pour que l’Europe soutienne davantage les langues minoritaires. Tous les deux ans le Liet renouvelle le message et rappelle, preuve à l’appui, l’importance de préserver ce trésor culturel européen que sont les langues minoritaires. •