« En Europe, vivent en paix quatre-vingt statuts d’autonomie et trois cent millions d’européens, dans le régionalisme ou le fédéralisme politique » disait dans l’une de ses nombreuses tribunes Edmond Simeoni le 7 février 2018. Il était un européen convaincu et malgré parfois sa colère lorsqu’on parle de l’Europe des États-Nations, l’Europe était pour lui une clé d’avenir sur laquelle il fallait s’appuyer. Il était, avec son frère Max Simeoni, parmi les précurseurs pour internationaliser la question corse, lors d’une conférence de presse tenue avec des députés flamands, basque, gallois, sarde, catalan, à Bastia, en 1979, événement que l’Histoire retiendra comme les tous premiers pas de la future Alliance Libre Européenne. Ainsi, il fut l’un des tous premiers à prôner les fondements qui sont aujourd’hui ceux de l’ALE (lire en p6è7) : « Le droit doit primer la force et le dialogue la contrainte. L’Etat doit s’en persuader. Là est la voie de la confiance qui permettra la naissance d’une Corse nouvelle, moderne, plus juste, éprise d’humanisme et respectueuse des intérêts légitimes des parties par un nouveau contrat avec l’Etat, dans une Europe démocratique et aussi dans notre berceau naturel, la Méditerranée. Nous ne renoncerons pas à être nous-mêmes, avec tous les autres, modestement, au milieu des autres peuples du monde. Dans la fraternité et la paix. La raison commune l’emportera, in fine et ouvrira la porte à la justice et à la réconciliation ».
En 2001, répondant à une interview sur le blog « Confluences Méditerranées », il livrait cette réflexion d’une Corse trouvant toute sa place dans une Europe des peuples.
« La construction européenne est à l’évidence une donnée majeure en termes politiques, économiques et juridiques. Elle a notamment conduit à une redéfinition totale de la notion de souveraineté (désormais éclatée), à une banalisation de la diversité culturelle, à la gestion de la complexité à travers des formes juridiques nouvelles et des processus croisés de régulation et d’adaptation évolutifs. Il est évident que tout ceci a ouvert à la Corse des perspectives largement insoupçonnées voici seulement 20 ans : accès aux fonds structurels européens ou encore échanges transfrontaliers. Il n’en reste pas moins que l’échelon étatique reste et restera présent dans les années à venir. De même, un « euro-optimisme » béat n’est pas de mise : la logique économique qui sous-tend la construction européenne risque, si elle n’est pas contrebalancée par des avancées en matière de protection sociale et par le comblement du déficit démocratique, d’être largement défavorable aux régions périphériques ou en retard de développement. La Corse, humblement eu égard à son poids économique et démographique, mais avec détermination au regard des enjeux politiques, doit renforcer sa présence sur la scène communautaire, et impliquer la France et ses partenaires européens dans la recherche d’une solution originale et satisfaisante pour l’île : cette solution négociée pourrait avoir valeur d’exemple dans la recherche des nécessaires complémentarités à inventer entre les trois principaux échelons du champ politique européen : région, État, Union européenne. La confrontation avec ce qui se fait ailleurs en Europe devrait également conduire à dissiper l’angoisse quasi existentielle de ceux qui ont de la République française une vision figée et monolithique : n’oublions pas que la grande majorité des Européens vit déjà, sans heurts, dans le fédéralisme ou le régionalisme politique. » •