“Monsieur le Président de la République, Depuis toujours, la Corse s’est illustrée dans l’Histoire lorsqu’il s’est agi de faire progresser le principe des Droits de l’Homme et, en tant que citoyens corses, nous devons nous en montrer dignes. Ainsi, le Collectif Corse pour l’Adoption sans Racisme Institutionnel (C2ARI) s’est-il constitué à Bastia le 31 mars 2017.
En dépit de l’aversion que suscite légitimement l’expression raciste, celle-ci trouve sa place en France là où on l’attend le moins : dans des documents institutionnels et particulièrement dans des dossiers de services administratifs dont la mission est la protection de l’enfance. Nous avons notamment décelé l’expression du racisme aux pages 40 et 63 des Référentiels ministériels concernant l’information préalable à l’agrément en vue d’adoption et l’évaluation de la demande d’agrément. 1
Ainsi, pouvons-nous y lire : « si les candidats ne se sentent pas prêts à accueillir un enfant de couleur 2, il peut être fait recours aux termes « ouvert (sic) à l’accueil d’un enfant qui leur ressemble » » (Page 40) En fait, ces Référentiels tentent de dissimuler une discrimination raciale contraire à l’intérêt supérieur de l’enfant.
L’euphémisme « un enfant de couleur » est donc employé pour éviter le mot « race » : l’expression n’en est pas moins raciste. Le propos suggère qu’un enfant autre que blanc pose un problème qui mérite qu’on lui trouve une solution afin d’agréer une discrimination raciale sans en avoir l’air.
L’idée que les candidats « ne souhaitent pas d’enfant de race autre que blanche » (comprendre « ne veulent pas non plus d’un enfant d’origine maghrébine ») se trouve donc exprimée par les termes « ouvert (sic) à l’accueil d’un enfant qui leur ressemble ». Aussi policée que soit la forme de l’expression, elle n’ôte rien de sa nature révoltante au fond du propos.
Il est scandaleux de considérer « la race » comme une réalité légalement perceptible qui entraînerait des conséquences sur la parentalité.
Nous vous demandons, Monsieur le Président, que cette existence institutionnelle accordée à la couleur de peau dans ces Référentiels ministériels soit définitivement abolie : il est temps de faire entendre à tous les acteurs de l’adoption que nul ne peut admettre qu’il est normal d’envisager comme un problème potentiel l’apparence physique d’un enfant.
La requête que nous soumettons aujourd’hui à votre bienveillance s’inscrit dans le sens des propos tenus lors de l’intervention de la France le 26 novembre 2015 pour la Célébration du 50e anniversaire de l’adoption de la convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale. Il y avait été rappelé que, dans le cadre de la lutte pour une grande cause nationale, un plan d’action contre le racisme et l’antisémitisme pour la période 2015- 2017 avait été adopté en avril 2015. À l’occasion de cet anniversaire et pour conforter ces ordonnances, nous vous serions très reconnaissants de prendre, à l’instar de l’Italie3, une décision ferme et définitive en apportant une correction humaniste aux Référentiels de l’adoption en France.
Conscients de votre engagement dans la lutte contre le racisme, grande cause nationale de votre mandature, et vous remerciant de l’attention que vous voudrez bien porter à la situation que nous dénonçons, nous vous prions d’agréer, Monsieur le Président de la République, l’expression de notre profond respect et de notre très haute considération. »
- Texte entériné en avril 2011 par Madame Roselyne Bachelot alors Ministre de la solidarité et des cohésions sociales. Il est consultable ici
- Selon le Larousse l’expression « gens de couleur » désigne les «Noirs et métis » :« couleur nom féminin (latin color, -oris). Vieilli. Homme, femme, gens de couleur, Noirs et métis.
- Selon un arrêt de 2010 de la Cour de cassation italienne, un choix racial irait à l’encontre de nombreux traités internationaux, y compris la Convention de La Haye sur l’adoption d’enfants et la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.
Notre collectif a pour objectif de demander à la France que toutes les discriminations raciales qui existent encore dans les textes français relatifs à l’adoption d’un enfant soient définitivement abolies comme c’est le cas en Italie depuis 2010.
Envoyez votre nom, prénom, titre, profession, adresse mail avec votre signature à l’adresse mail suivante : c2ari2017@gmail.com
Membres fondateurs du C2ARI
(Cullettivu Corsu per l’Adduzione senza Razzismu Istituziunale – Collectif Corse pour l’Adoption sans Racisme Institutionnel)
Christian Carrara, Consultant expert, ancien pupille de l’Etat.
Jacques Castelli, Médecin psychiatre.
Bernard Cesari, Conseiller municipal de Bastia.
Elsa Chabrol, Auteure, Réalisatrice, mère adoptive à l’international.
Charlotte Dauriac, Magistrat, mère adoptive à l’international.
Françoise Duprat- Bartoli, Enseignante (ER), Vice-Présidente EFA 06 (Présidente pendant plusieurs années) ancienne Présidente du Conseil de Famille du 06 pendant 15 ans, Administratrice (bureau) de l’UDAF 06, Administratrice CAF 06, Administratrice du Foyer de l’Enfance du 06, membre de la CDEN 06
(Commission Départementale de l’Education Nationale), membre du CCAS d’Aspremont (06), mère adoptive à l’international.
Anne-Lucie Costantini, Greffe du Tribunal de Bastia.
Anne Faure, Médecin.
Marie-Hélène Ferrandini, Professeure à l’Université de Corse.
Eugène Gherardi, Professeur des universités, Vice-doyen de la faculté des lettres, langues, arts, SHS de l’Università di Corsica Pasquale Paoli.
Fabiana Giovannini, Conseillère exécutive de la Collectivité Territoriale de Corse.
Fleur Graziani, Enseignante à l’Université de Corse, Docteur en droit, adoptée à l’étranger.
Lauda Guidicelli, Conseillère à l’Assemblée de Corse, Psychologue clinicienne.
Fatima Ksontini, Agent administratif DDCSPP de la Haute-Corse.
Vanina Le Bomin, Conseillère Départementale de la Haute-Corse.
Agnès Rogliano Desideri, Enseignante à l’Université de Corse, Vice-Présidente du Conseil de Famille de la Haute-Corse, mère biologique et adoptive à l’international.
David Santini, Facteur.
Anne-Laure Santucci, Conseillère à l’Assemblée de Corse, Présidente de la Commission en charge de la problématique de la violence en Corse, membre d’associations pour le développement du monde rural et pour la sauvegarde du patrimoine.
Pierre Savelli, Maire de Bastia.
Georgette Simeoni, Chevalier de la Légion d’Honneur, Enseignante (ER) Ancienne Présidente du Conseil de Famille de Haute-Corse, Militante Associative.
Maryline Taddei, Enseignante, Directrice d’école d’application bilingue.
Frédéric Verrons, Agent maritime, Président de l’ONG Tog Len Europe, membre de Greenpeace, père adoptif à l’international.
La liste des signataires est ouverte et plus de 200 personnes ont déjà rejoint cet appel.