Tribune libre

Pour l’intérêt supérieur d’une enfant

Avà Basta est un collectif de lutte contre toute forme de racisme et de xénophobie.

C2ARI est un collectif pour l’adoption sans racisme institutionnel.

Donne è Surelle regroupe différentes associations et individus pour tisser un réseau d’entraide au féminin.

Enfance et Familles d’Adoption 2B est une association dont le rôle est d’accompagner les familles adoptives. Elle les suit dans leur parcours et apporte conseils et soutiens.

Orphelin’Aide est une association qui monte des opérations de solidarité pour soutenir les orphelinats.

L’intérêt et le bienêtre de l’enfant, en toutes circonstances, sont pour nous la priorité et nous sommes très attachés aux textes qui érigent l’intérêt supérieur de l’enfant comme la règle intangible qu’elle est au niveau international des conventions et des traités qui protègent l’enfance (cf. CIDE).

 

Nous intervenons au moyen de cette tribune pour faire entendre la voix d’une petite fille de 2 ans et demi, et de sa maman.

L’enfant pourrait avoir un foyer, malheureusement elle est maintenue en orphelinat du fait du manquement des services de l’Aide Sociale à l’Enfance de Corse (ASE).

À regret, faute de pouvoir obtenir un rendez-vous pour traiter de ce sujet délicat, nous sommes contraints de nous exprimer publiquement. Notre devoir est d’alerter les institutions pour qu’une issue soit trouvée à ce qui devait être une formalité administrative mais qui est devenu un obstacle politique au bonheur d’une enfant et de sa maman.

En 2018, une motion demandant en urgence la délivrance d’un visa pour un petit garçon né à Djibouti lui permettant de rejoindre sa famille en France a été adoptée à l’unanimité par l’Assemblée de Corse.

C’est au titre de la même humanité que nous interpellons aujourd’hui la Collectivité de Corse et son président sur le cas de cette petite fille.

L’ASE relève en effet de la Collectivité de Corse et son président est l’homme élu le plus important de l’île, ses charges et devoirs sont colossaux et son humanité ne fait aucun doute. Mais il est indispensable qu’il puisse faire confiance à ses services. Malheureusement, dans le cas présent, il n’a vraisemblablement pas les bonnes informations. Aussi, il est de son devoir de se pencher sur la situation, surtout quand de nombreuses associations d’aide à l’enfance l’alertent sur les dysfonctionnements au sein de son administration.

La décision injuste dont il est question aujourd’hui est un avis défavorable dans un processus en vue d’une kafala autorisé par le Maroc. Dans la législation marocaine, l’adoption telle qu’elle est organisée par le Code Civil français n’existe pas, elle s’envisage dans le cadre d’un transfert de l’autorité parentale : la kafala.

 

Cette procédure est l’ultime espoir d’une dame d’origine marocaine, vivant en Corse et parfaitement intégrée depuis quinze ans, qui a subi bien des épreuves et sacrifices pour devenir maman. La kafala représente aussi l’issue heureuse pour cette petite fille de 2 ans et demi qui l’attend désespérément à l’orphelinat, au Maroc. Depuis plus d’un an, elles ont été mises en relation par les autorités marocaines et nous saluons la bienveillance et la patience dont elles font preuve dans cette affaire. La maman et l’enfant se sont fortement attachées l’une à l’autre. La rupture de cet attachement constitue une violence sur l’enfant et la maman et l’impact de cette violence provoque des complications somatiques et psychologiques à court et à long termes.

C’est après deux enquêtes sociales avec avis favorables, en 2017 et en 2018, que cette enfant a été attribuée à cette dame en 2021.

Cependant, pour qu’elle lui soit remise définitivement, une nouvelle enquête sociale est de règle. Elle a été menée par la même assistante sociale qui a donné les deux premiers avis favorables, mais qui a conclu cette fois-ci sur un avis défavorable, alors qu’aucun changement particulier n’est intervenu dans la vie de la maman. Pire, elle s’appuie sur de fausses affirmations concernant notamment son niveau de vie,  sur une appréciation personnelle sur ses capacités à être mère, cela de manière tout à fait abusive et ne reposant sur aucun élément précis. De plus, interrogée par le ministère, l’ASE ne semble pas avoir déclaré connaître la requérante, alors que cela lui était explicitement demandé… probablement pour éviter de parler des deux précédents avis favorables.

 

Pour les associations signataires, c’est l’incompréhension la plus totale !

Les revenus de l’adoptante se sont améliorés : insuffisant ! Elle est entourée par ses amis et sa famille qui vivent en Corse : insuffisant ! L’enfant sera son bonheur : insuffisant ! Pire, cela lui est reproché puisque l’assistante sociale évoque la volonté de combler un « vide affectif », ce qui est une vérité pour tout candidat à l’adoption. Pourtant, l’enfant sera aimé/choyé : insuffisant encore pour l’ASE !

Comment tolérer que la capacité d’être une bonne mère soit remise en cause à partir d’erreurs manifestes et du jugement abusif d’un agent sans autre possibilité de recours ?  En effet, impossible pour nos associations de rencontrer les services de l’ASE ou un élu permettant de rectifier ces erreurs. Est-ce de l’incompétence ? Une forme de racisme institutionnel ? Ou de la simple indifférence ?

Nous demandons solennellement à être reçus pour exposer le cas de cette petite fille. Il y a urgence car, lorsque les délais de la kafala seront clos, la maman et la petite fille seront définitivement séparées et l’enfant devra demeurer encore de longs mois, voire des années, en orphelinat, avant qu’une nouvelle kafala puissent être attribuée à une autre personne.

Encore une fois, il en va de l’intérêt supérieur de l’enfant. •

Avà Basta – C2ari – Donne è Surelle – EFA2b – Orphelin’aide

NDLR : ARRITTI a déjà rendu compte de cette affaire par un article paru la semaine dernière. À l’heure où nous mettons sous presse, nous n’avions pas connaissance d’une audience accordée par les services de la CdC aux associations.

 

Contact : associationscorses.enfance@gmail.com