Suciale

Tensions dans la pénitentiaire

Ils ne sont pas les plus populaires de la fonction publique, mais sont néanmoins indispensables au bon fonctionnement de leur administration, les agents de l’administration pénitentiaire ne se sentent pas suffisamment entendus. Les questions de sécurité bien sûr, avec surtout l’état exécrable des prisons en France, lourdes de conséquences pour la réinsertion des détenus, mais aussi pour la sécurité et le bien-être des surveillants pénitentiaires eux-mêmes. Et des surveillants en tension, c’est une prison en tension, moins apte à remplir son rôle.

Une situation qui réclamerait une réforme en profondeur, comme on l’a hélas très bien ressenti – outre les dérives de cette affaire – au travers de l’enquête parlementaire sur l’assassinat d’Yvan Colonna au centre de détention d’Arles, censé être parmi les plus sécurisés de France…

Bref, on le sait, il y a un malaise dans les prisons. À commencer par un malaise social au sein des agents pénitentiaires.

 

Besoin de pas grand-chose.

Parfois, il suffirait de pas grand-chose pour satisfaire un besoin. Mais de façon incompréhensible, il y a des blocages. C’est le cas actuellement dans la politique des mutations en Corse. « Les Corses n’arrivent pas à rentrer, quand les continentaux fraichement arrivés et dans la même situation, obtiennent eux leur mutation… en Corse ! » nous confie avec amertume Philippe Franchini délégué syndical et agent de Casabianda. Il cite le cas de deux femmes, bloquées à Marseille, qui, une fois leur stagiairisation terminée pour l’une, n’obtiennent pas le poste réclamé en Corse alors que les postes existent. Ceux-ci ont été ouverts à la promotion suivante. « Après ils se plaignent de ne pas avoir de candidats et ils vous demandent d’avoir une vie de famille équilibrée ! » déplore encore M. Franchini. Et ce malgré qu’elles aient toutes deux une famille, et des enfants en situation de handicap.

Et de citer l’exemple de sa compagne, reçue avec les félicitations du jury au concours, très bien notée durant sa formation à l’école de l’administration pénitentiaire à Agen, avec notamment durant son stage, une bonne réaction lors de l’agression par un détention qui a permis l’intervention de ses collègues et la maîtrise rapide de la situation par le centre de détention. Ce qui lui a valu les félicitations encore, non seulement de la direction de la prison, mais aussi de la direction nationale de l’administration pénitentiaire. Elle est aujourd’hui en difficulté, avec son fils et son compagnon en maladie, tous deux en situation de handicap à Casabianda. Son cas ne devrait-il pas être prioritaire pour se rapprocher de sa famille ?

Après moults démarches, elle-même en situation de RQTH*, elle est mutée à Borgu, encore à plusieurs kilomètres des siens ! « Lorsque je suis revenu en Corse, il y a trente ans, il y avait deux continentaux à Casabianda, aujourd’hui sur 60 agents, nous sommes cinq originaire de Corse » se plaint encore M. Franchini.

Pourtant les syndicats, les partis nationalistes, les parlementaires, la Collectivité de Corse qui aspire à un meilleur partenariat avec le centre pénitentiaire de Casabianda, le maire d’Aleria, apportent tous leur soutien à ces deux agentes bloquées, une à Marseille et l’autre mutée de manière insensée et inhumaine à Borgu, alors qu’elle habite à Casabianda, que des postes sont vacants et que sa famille a besoin d’elle.

Alors, qu’est-ce qui coince ? Comment peut-on prendre de telles décisions ? Comment sont gérés les services des ressources humaines dans la pénitentiaire ?

En France, vivre avec un handicap est toujours synonyme de discrimination. Mesures et plans se succèdent pour améliorer la situation mais l’application de terrain fait défaut et crée des injustices sociales qui ont des conséquences lourdes.

Un travailleur en situation de handicap a pourtant des droits, et devrait être considéré comme prioritaire.

En Corse, la colère gronde et la mobilisation est en cours… •

F.G.

 

* Reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé.