Un nouveau féminicide est venu alourdir le bilan 2021 des violences faites aux femmes. Une femme de 44 ans a été tuée par son compagnon à coups de couteau le 26 novembre dernier à Epinay-sur-Seine. L’assassin avait été libéré le 19 novembre après avoir purgé une peine de prison de six mois fermes pour avoir commis des violences sur la victime. Ni celle-ci, ni la police locale n’ont été prévenus de la libération de l’homme qui a donc récidivé. Elle est la 104e victime en 2021 (102 en 2020). Une statistique probablement sous-estimée encore. Selon la sociologue Magali Mazuy, on identifie de nombreux cas de « suicides forcés », les femmes se donnent la mort pour échapper à l’emprise, aux violences et au harcèlement qu’elles subissent.
Le 25 novembre était la journée internationale de lutte contre les Violences faites aux femmes. Durant des années, cette journée était axée sur le sort des femmes dans le monde. Elles sont avec les enfants les premières victimes des conflits et de la misère, et les violences qu’elles subissent particulièrement dans les pays sous-développés, mariages forcés, excision, esclavage et trafics de toute nature, interpellent. Puis on a davantage parlé des violences subies en France, martyrisées, tuées par leur conjoint ou compagnon. Une femme meurt tous les trois jours dans le pays sous les coups de celui qui partage leur vie. La situation est pire encore que ce que l’on imaginait. Malgré les politiques mises en place, des centaines de milliers de violences conjugales sont recensées chaque année, coups, violences psychologiques, harcèlements ou agressions sexuels, féminicide… police et justice sont défaillantes pour protéger ces femmes, quatre sur dix n’arrivent pas à trouver un hébergement de secours. Les enfants assistent souvent traumatisés au martyr de leur maman. Les statistiques, ce sont aussi 94.000 viols chaque année, et l’on ne parle que de ceux pour lesquels il y a eu plainte ! Aucune classe politique n’est épargnée.
Dans une tribune sous le #metoopolitique plus de 300 femmes travaillant dans la sphère politique ont dénoncé les agressions et harcèlements dont les femmes sont victimes sans que la société, les partis politiques concernés, les gouvernements successifs, n’interviennent. Trois candidats ou potentiels candidats à l’élection présidentielle sont aujourd’hui visés par des accusations d’agressions sexuelles. Des ministres font également l’objet d’enquêtes. « L’affaire Nicolas Hulot », longtemps personnalité préférée des français, démontre à quel point le mal a pénétré la société. Sans préjuger de l’aboutissement des enquêtes et dans le respect de la présomption d’innocence, le seul fait que toutes ces « affaires » soient révélées aujourd’hui démontre deux choses au moins. La première est que les langues se délient. Et lorsque c’est le cas, les victimes donnent courage à d’autres victimes. Il y a là une évolution, mais ce sont ces victimes qui forcent la porte car l’entourage témoin n’a jusqu’ici jamais réagi, s’enfermant dans un tabou complice. La seconde c’est que les violences faites aux femmes atteignent un tel degré de généralisation que cela en devient effrayant, sport, presse, politique, aucun secteur ne semble épargné, les victimes sont innombrables. Une banalité écœurante qui affecte notre démocratie et appelle une riposte enfin à la hauteur pour faire évoluer les mentalités jusque dans l’éducation des enfants. La lutte contre les violences faites aux femmes et aux enfants doit devenir une priorité. Il faut du courage politique, et ne pas laisser de zones d’ombre. Un sujet qu’on occulte encore est celui de la prostitution. La prostitution des mineures explose en France. Elle commence toujours par un viol. Les jeunes femmes sont sous emprise et vivent un véritable calvaire sans pouvoir réagir. Là encore les témoignages se multiplient mais ne parviennent pas au grand public. Il serait temps de s’en convaincre, la prostitution est une exploitation sexuelle, de l’esclavage organisé par les hommes pour les hommes. Or les discours politiques restent conciliants. Les violences faites aux femmes ont hélas encore de beaux jours devant elles. Pour réellement en sortir, il faut commencer par sortir du concept de la femme-objet. •