Problème des animaux ensauvagés

L’associu Cambià Avà toujours pas entendu

Pourquoi faudra-t-il toujours créer une association pour entendre les causes justes ? Cambià Avà s’est créée il y a trois ans pour dénoncer le fléau et les conséquences de la divagation animale. La plupart du temps, des animaux ensauvagés n’appartenant plus à personne et qui continuent à se reproduire dans le maquis, font des dégâts aux plantations mais surtout aux hommes en s’approchant des villes et villages pour chercher leur nourriture. On connaissait le drame des accidents de la circulation, s’y ajoute depuis quelques années celui des promeneurs agressés par des animaux qui n’ont pas l’habitude de l’homme et attaque soit pour défendre leurs petits, soit pour passer leur chemin… Les blessures engendrées sont graves, parfois très graves. Et ces victimes sont ignorées par les pouvoirs publics. Arritti donne à nouveau la parole à la présidente et fondatrice de Cambià Avà, Maryline Taddei, elle-même gravement blessée il y a trois ans et toujours handicapée par les séquelles de cette agression.

 

 

Quel est l’objectif de Cambià Avà ?

La revendication première est la reconnaissance des victimes de la divagation bovine et bien sûr en tout premier lieu des victimes touchées dans leur chair. Outre les séquelles physiques, leur vie est bouleversée sur de nombreux plans : carrière, vie familiale, finances… Concentrées sur leur santé, elles ne peuvent plus faire face au quotidien. Nous demandons la création d’un fonds d’aide aux victimes pour les conséquences non prises en charge par les assurances. Lorsque l’animal en cause est ensauvagé, elles ne peuvent obtenir d’indemnisation. Pour les personnes ayant percuté un bovin avec leur véhicule, les assurances n’interviennent pas toujours (véhicules assurés au tiers). Quant aux victimes physiques, elles sont livrées à elles-mêmes. L’État doit être mis en cause en tant que garant de la sécurité publique, c’est à lui de mettre en place ce fonds de garantie. Et pour certains dommages non assurantiels, la Collectivité de Corse doit aussi créer un fonds permettant d’aider par exemple les personnes à faibles revenus.

 

Pour régler un problème, il faut en connaître l’ampleur…

Exact. Nous avons énormément de témoignages de victimes. Mais il n’y a pas de recensement officiel à notre connaissance. C’est déjà un problème en soi. Il faut mettre en place des outils pour connaître les statistiques de ces accidents liés à la divagation animale. La Collectivité de Corse peut obtenir cela des hôpitaux, des SDIS, et de tous les services d’urgence.

Quant aux animaux en divagation, on estime à 30.000 leur nombre et ils continuent de se reproduire dans le maquis… Le coût humain et social est exponentiel. Il faut arrêter de dire, « c’est aux communes, c’est à l’État, c’est à la Collectivité, c’est aux assureurs… » Il faut faire face ensemble à ce fléau, rassembler tous les moyens existants et avoir une stratégie d’action territoriale. La Corse pourrait s’énorgueillir de mettre en place une politique efficace.

 

La question de la divagation animale ne relève-t-elle pas des communes ?

Les petites communes n’ont pas les moyens matériels, humains et financiers de mettre en œuvre les dispositions du code rural. La création d’un parc communal de rétention est possible, y compris avec l’aide de l’Odarc, mais la mise à disposition d’un gardien, l’approvisionnement régulier en alimentation et le rabattage et transport des bêtes sont inenvisageables pour ces communes. On pourrait mutualiser les choses au niveau des communautés de communes, mais sans une prise en charge plus forte et une coordination des pouvoirs publics, c’est impossible.

 

Une prise en charge territoriale du problème ?

Oui, en regroupant les communautés de communes, il serait possible par exemple de créer 4 ou 5 parcs territoriaux répartis sur toute la Corse avec des mangeoires, des abreuvoirs, une gestion sous l’égide de l’Odarc permettant une vraie prise en charge de ces animaux qui seraient alors traités selon les besoins sanitaires, leur dangerosité, la possibilité ou pas de les remettre dans le circuit de l’élevage après une période de quarantaine. Des agents seraient affectés au transport, au gardiennage et à l’entretien de ces animaux. Lorsque nous avions été reçus par le préfet Ravier en 2022, il nous avait dit être tout disposé à accorder à ces personnels les habilitations nécessaires pour être assermentés pour dresser des procès-verbaux. Des « gardes-champêtres » d’une nouvelle génération en quelque sorte avec des moyens adaptés : véhicules de transports pour bovins, carabines hypodermiques, carabines de grande chasse, lecteurs de bolus, appareils photos avec téléobjectifs, drones d’observation, lunettes thermiques…

 

En fait, les moyens existent, il faut juste les mutualiser…

Exactement. Et pour ça il faut de la volonté politique ! Police et gendarmerie, services communaux, services vétérinaires, ensemble des services dépendants de la CdC, communautés de communes… tous peuvent tirer dans le même sens. Pour cela, il faut les réunir avec l’objectif de résorber progressivement la population des bovins sauvages. S’il s’agit d’animaux bouclés et simplement en fugue, leur propriétaire doit être prévenu et enjoint à agir pour les récupérer. S’il s’agit d’animaux qui n’appartiennent à personne, ils pourraient être transportés et soignés dans ces parcs territoriaux. Nous demandons la création de cette « brigade rurale » de garde-champêtres. Étant donné leur mobilité, leur polyvalence et leur présence régulière sur le terrain, elle pourrait avoir une utilité plus élargie, pour rendre des services dans d’autres domaines : résorption des dépôts sauvages d’ordures, prévention des feux et brûlages, lutte contre le camping sauvage, pour la protection des sites, police de l’eau, etc. C’est une proposition que nous faisons à la Collectivité de Corse et à l’État. Muvèmuci ! •