Collectif de Parents d’étudiants en Médecine de Corti

« Nous accusons l’État d’être dans l’illégalité »

À l’image du Collectif national, François Buttafoghi a fondé avec d’autres parents corses un Collectif de parents d’étudiants en Médecine de l’Università Pasquale Paoli pour dénoncer la nouvelle réforme. Il explique à Arritti les raisons de leur colère. Interview.

 

Que dénoncez-vous dans la nouvelle réforme du cursus santé?

Nous accusons l’État d’être dans l’illégalité depuis presque un an. Nous trouvons inadmissible qu’il ne respecte pas la loi du 24 juillet 2019 relative à l’organisation du système de santé. Cette réforme devait abaisser le taux d’échec en augmentant le numérus pour les primants et améliorer leur réorientation. Tout le contraire est en train de se produire.

Prenons un exemple, lors du choix de vœux sur Parcoursup l’année dernière, nos enfants auraient dû connaître toutes les filières du parcours santé (je fais référence à la licence LAS*) ainsi que le nombre de poste (article 1 de l’arrêté du 4 novembre 2019), ce qui n’a pas été le cas. On a laissé aller nos enfants en première année de médecine PASS* sachant que le taux d’échecs serait de 95% et cela sans possibilité de redoubler. Y-a-t-il un autre concours en France avec 95% d’échecs sans possibilité de redoubler?

Le nombre de place aurait dû augmenter?

Oui, comme la loi le précise. D’ailleurs, les facultés qui ont expérimenté la réforme l’année dernière (principalement les facultés parisiennes) ont vu leur capacité d’accueil augmenter. Une augmentation exceptionnelle de 47% du numérus a été accordée à la Sorbonne en 2019 pour leur année de transition alors qu’il ne s’agit pas d’une université située dans un désert médical! La libération des fonds prévus par la loi est-elle réservée uniquement aux facultés parisiennes? Est-il équitable de tester une réforme à Paris en donnant d’importants moyens financiers pour augmenter la capacité d’accueil en seconde année puis de demander l’application de cette même réforme en province sans donner des moyens identiques?

Tout ceci alors que nous vivons une crise sanitaire mondiale, n’est-ce pas aberrant?

Tout à fait, le manque de personnels soignants était connu bien avant la crise sanitaire. Cependant si l’État avait prévu de recruter, il suffisait d’augmenter le numerus d’un certain pourcentage sur plusieurs années. Nos bureaucrates parisiens n’ont qu’une vision comptable de la société. Ils ont l’art de mettre en place des réformes «usines à gaz», difficilement applicables. Ils sont inconséquents.

Que demandez-vous précisément?

Nos enfants travaillent 12h par jour. Dans ce contexte sanitaire, ils sont isolés, suivent les cours en visio, ne peuvent travailler en groupe, ne peuvent se divertir comme leur équilibre mental le nécessite, beaucoup sont en détresse aussi bien physique que mental et en plus, ils voient leurs droits bafoués, sont traités avec mépris et de manière inégalitaire vis-à-vis des générations passées et futures. Il s’agit d’une génération sacrifiée à laquelle, par manque de moyens pourtant prévus par la loi, l’État a choisi d’appliquer la double peine, les désavantages de l’ancien système (très faible taux de réussite en tant que primants) et les désavantages du nouveau système (interdiction de redoublement), sans leur accorder une réelle possibilité de réorientation adaptée. Compte tenu des conditions déplorables dans lesquelles ils étudient, nous trouverions légitime qu’il leur soit accordé de manière exceptionnelle l’autorisation de redoubler en cas d’échec car de nombreux points règlementaires n’ont pas été respectés tout au long de l’année à cause du manque de prévoyance de l’État. Et ce afin que le droit soit appliqué, que les étudiants soient traités avec justice, équité et considération et que l’espoir d’accéder aux métiers de soignants auxquels ils aspirent tant, leur soit tout simplement rendu.

Quelles actions comptez-vous mener?

Nous avons écrit au Préfet et à l’ARS* pour des réponses précises à nos questions. Nous souhaitons alerter l’opinion publique et les médias de cette situation désespérante et inégalitaire. Nous cherchons conseils auprès d’un avocat. Le collectif national a saisi le Défenseur des droits, la pétition (www.change.org) est passé de 3.400 à plus de 24.000 signatures en 2 jours. •

 

* LAS : Licence Accès Santé.
PASS : Parcours Accès Santé Spécifique.
ARS : Agence Régionale de Santé.

 

Signez la pétition sur change.org : https://bit.ly/3tlQB8I