En France, on le sait depuis longtemps –mais grâce à Christophe Barbier, on a eu droit à une petite piqûre de rappel il y a tout juste un an –, la République française tend vers l’universel ! Elle est intangible! Elle est une et indivisible ! Pire, elle est même plus importante que la démocratie ! En effet, selon M. Barbier, on peut mettre entre parenthèses la démocratie mais on ne peut pas mettre entre parenthèses la République !
Ce culte de la République, qui a tellement atteint la droite française qu’elle s’est auto-proclamée « Les Républicains », est en fait le cancer de la France. En effet, si la République « une et indivisible » est un dogme, elle ne peut être remise en question ! Toute tentative d’évolution doit être combattue et éliminée car hérétique !
Les ayatollahs de la pensée « républicaine », qui vont de l’extrême gauche de Jean-Luc Mélenchon à l’extrême droite de Florian Philippot, en passant par les jacobins du PS ou de LR, comme François Fillon, sont là pour nous le rappeler tous les jours. Pour eux, il ne peut y avoir d’alternative à la (cette) République. Pour ces intégristes républicains, la République (jacobine) représente l’ordre, tout autre alternative, et notamment la Monarchie, le chaos !
J’imagine que le chaos règne tout autour de nous, que ce soit en Espagne, en Belgique, au Luxembourg, au Pays-Bas, au Royaume-Uni, au Danemark, en Suède ou encore en Norvège (et je passe sur les Principautés d’Andorre, de Monaco, de Linchtenstein) qui ont tous en commun d’être des Monarchies et qui, à bien des égards (état de la démocratie, de l’économie, de la situation sociale, de la capacité à reconnaître des peuples et des minorités…), fonctionnent bien mieux que la République française ! Quant aux Républiques voisines, elles sont soit fédérales (Autriche, Allemagne), soit confédérales (Suisse) ou, au pire, moins centralisées (Italie), voire multilingues (Finlande).
Eh ! oui, n’en déplaise à M. Barbier, on peut vivre en démocratie sans République, alors que la République n’est pas une garantie pour vivre en démocratie. La feue-RDA, la Chine et la Corée du Nord en sont les meilleurs exemples.
Le Monarque républicain. En fait, ce dogme républicain trouve son paroxysme, tous les 5 ans, lors de l’élection du Président de la République française, véritable Monarque : républicain peut-être mais monarque tout de même. Car bien qu’élu, le Président de la République n’a-t-il pas tous les apparats, les symboles, les pouvoirs des monarques (absolus) ? Le droit de grâce n’est-il pas un héritage monarchique? La possibilité d’organiser un Congrès à Versailles (sic) : un vestige du lit de justice de l’Ancien Régime ?
Si le Président de la République était, comme dans la (quasi) totalité des Républiques européennes, le gardien de la Constitution, ayant un rôle politique mineur mais symboliquement important, cela serait moins grave. Mais le problème vient du fait que, sous ses apparats monarchiques, le Président de la République est, sur le papier, l’homme le plus puissant du monde (démocratique) !
Quel chef d’État peut, seul et sans l’aval du Parlement, déclarer une guerre ? Qui dispose de l’arme nucléaire ? Qui peut recevoir les pleins pouvoirs ? Qui peut déclarer, seul et sans l’accord du Parlement, l’état d’urgence qui permet de bâillonner la justice et d’élargir les pouvoirs de l’Exécutif ? Qui peut faire passer des lois sans vote démocratique (le fameux 49.3) ? Qui peut menacer les députés de la majorité d’être renvoyés par dissolution de l’Assemblée nationale ? Qui peut court-circuiter le Parlement et les Corps intermédiaires en organisant un plébiscite, pudiquement renommer référendum sous la Ve République ? Qui siège au Conseil européen sans jamais rendre de comptes au Parlement ? Qui siège, de droit, au Conseil supérieur de la magistrature ou au Conseil constitutionnel, organe qui censure les lois, une fois son mandat terminé ? Qui nomme la quasi totalité des personnes aux postes politiques importants ?
Comment en finir avec cette République? Cette République est dangereuse car elle concentre tous les pouvoirs dans les mains d’une seule personne sans véritable contre-pouvoirs et fait croire à n’importe qui qu’il peut devenir le prochain Monarque républicain, oint du saint chrême démocratique. Pire, elle entretient un dogme intangible, l’universalisme de la France, qui voudrait que tout ce qui n’est pas français (langue, peuple, culture…) soit détruit sur l’Autel de la République.
En 2017, les Corses, les Basques, les Bretons, les Alsaciens (et tous les autres peuples vivant dans la République) seront encore devant cet éternel dilemme : Voter pour essayer de soutenir un candidat 100 % sans jacobinisme, défendant la reconnaissance des peuples et cultures qui vivent en France ou l’abstention pour exprimer le refus de reconnaître cette République jacobine. Pour ma part, je vois dans les deux comportements une logique louable, mais chaque option a sa faille. Ne pas voter, c’est donner plus de pouvoir à ceux qui vont se déplacer, voter c’est en accepter le résultat. Mais quel que soit le choix lors des premier et second tours des présidentielles, l’ensemble des peuples sans État de France devra, dès le lendemain, se battre ensemble afin de faire reconnaître leurs droits chez eux, à Paris et à Bruxelles.
Roccu Garoby,
Vice-Président de l’ALE Jeune