Des dizaines d’accidents chaque année, avec des véhicules ou directement avec des promeneurs, la divagation animale est responsable de dizaines de morts et de blessés depuis des décennies en Corse…
Ce problème est devenu fléau car rien d’efficace n’a été fait jusqu’ici pour y remédier et il s’est aggravé du fait de pratiques qui livrent à elles-mêmes les bêtes dans le maquis, les conduisent à s’y reproduire, puis à chercher à se nourrir jusqu’à envahir les rues de nos villages mais aussi des villes comme Bastia ou Aiacciu, comme en témoignent les photos ci-contre.
Aujourd’hui on estime à plus de 20.000 bêtes les animaux en divagation n’ayant plus ou presque de propriétaires. Va-t-on attendre qu’ils soient 50.000 ou davantage encore avant d’agir concrètement ? Ne pense-t-on pas que ces animaux vont investir de plus en plus nos rues et nos quartiers ? Et sur des routes de plus en plus fréquentées, le danger ne va-t-il pas s’aggraver davantage ? Pourquoi ce problème récurrent dans l’île, n’existe-t-il pas ailleurs en France, malgré le fait d’autres régions fortement rurales (hors élevage intensif) ? L’agro-sylvo-pastoralisme a bon dos ! Le problème est bien plus profond et il faut arrêter de se mentir en invoquant l’identité culturelle d’une île en réalité à l’abandon. Les éleveurs, les vrais, ne sont pas en cause. Il peut arriver qu’une bête échappe à leur contrôle, du fait par exemple de malveillants qui ouvrent les enclos, mais le gros de la problématique résulte bien de ces « animaux de rente » abandonnés dans le maquis, livrés à eux-mêmes et, devenus sauvages, deviennent dangereux.
L’article L.211-11 du Code Rural engage notamment les maires à prévenir le danger sur la voie publique. Et pas forcément par l’abattage qui n’est et ne doit demeurer qu’une solution ultime. Mais les maires aussi, surtout de petites communes, sont souvent dépourvus de moyens face à l’absence de services et d’enclos de récupération. Ne serait-il pas utile, par exemple, de lancer des appels à projets au niveau de la Collectivité de Corse, pour soutenir de manière technique et financière toute solution efficace pour les communes, comme pour les éleveurs ? Tant de souffrances humaines ou animales ne réclament-elles pas de prendre le sujet à bras le corps ?
Pour cela, il faut arriver enfin à se mettre autour d’une table pour trouver en bonne intelligence entre tous les acteurs concernés des solutions durables, et préserver la santé des gens tout en respectant l’animal.
« Nous sommes tous des victimes potentielles » dit Maryline Taddei en forme de cri d’alarme. Elle a été très grièvement blessée suite à une charge de vaches et de taureaux devant sa maison, à Bastia, à quelques encablures de l’Hôpital de Falcunaghja. Un comble ! Après 3 opérations, 8 mois d’hospitalisation, la peur de rester lourdement handicapée, il lui faudra encore du temps pour se remettre. Elle est toujours en hospitalisation, à domicile désormais. Elle sait qu’elle ne pourra pas retrouver son travail (directrice d’école), et devra s’adapter y compris professionnellement. Les conséquences sont lourdes et même insupportables. Pour elle, pour tant d’autres, cela mérite que les pouvoirs publics se penchent enfin sur le fléau.
Cambià Avà, c’est le nom de l’association que Maryline Taddei vient de créer avec des amis* pour interpeller les autorités compétentes, mais aussi les candidats aux responsabilités territoriales. C’est peut-être le maillon qu’il manquait à notre société pour faire de ce fléau une priorité politique.
ARRITTI salue cette initiative citoyenne. Cambià Avà en appelle aux victimes, pour qu’elles se fassent connaître, et propose de réunir pouvoirs publics, éleveurs vertueux et victimes, afin que des solutions pérennes soient enfin mises en œuvre avec efficacité. •
Fabiana Giovannini.
* Maryline Taddei, présidente. Marc Austrem, vice-président. Dumè Moneglia, trésorier. Antoine Costa, secrétaire. Marie-Pierre Pasqualini et Agnès Rogliano Desideri, membres actifs.
Contact : cambia.ava@gmail.com
Lire ici l’appel lancé par Cambià Avà et le témoignage de Dumè Moneglia.
Lire ici le témoignage de Maryline Taddei, présidente de l’association Cambià Avà.