8000 manifestants à Bayonne en Pays Basque, plusieurs rassemblements dans une quinzaine de villes en Bretagne, réunion publique à Bastia… ce 20 novembre a été une nouvelle journée de mobilisation pour dénoncer la spéculation et la dérégulation du marché qui font flamber les prix de l’immobilier dans les régions à forte identité. Il faudra bien que le gouvernement finisse par entendre les revendications de simple bon sens qui s’expriment !
Qui dit forte identité, dit aussi attractivité. Toutes nos régions sont touchées, en ce qui concerne la Fédération Régions & Peuples Solidaires, de la Bretagne à la Corse, en passant par l’Occitanie, notamment en Provence où l’immobilier est d’ores et déjà complètement inaccessible pour les nouveaux accédants du pays, sans oublier la Catalogne, le Pays Basque, l’Alsace, la Savoie ! Ce qui ressemblait hier à une alerte, puis une revendication légitime, devient une colère. 8000 manifestants à Bayonne, une mobilisation qui grimpe aussi en Bretagne, un mot d’ordre déjà bien installé en Corse où, depuis plus de 15 ans, les délibérations de l’Assemblée de Corse ne cessent de succéder aux délibérations. Flambée des prix, pénurie de logements pour se loger à l’année (avec le gel des résidences secondaires où un propriétaire gagne quasiment plus en un mois ou 15 jours de location estivale, que durant toute une année), déséquilibre vertigineux entre résidences secondaires et résidences principales (jusqu’à 50, 60, 80 % et plus de résidences secondaires dans certaines zones), la situation est de plus en plus critique partout, et le gouvernement y reste insensible, s’arque-boute sur ses blocages. La situation s’est encore aggravée avec la crise Covid où les habitants des grandes métropoles craignant de nouvelles vagues épidémiques, se sont vite rendus compte qu’il est plus agréable de se confiner à la campagne. C’est le cas pour les Parisiens vers la Bretagne, les Lyonnais vers la Savoie ou les continentaux les plus aisés vers la Corse. Pire, ce profit facile, non règlementé, pousse des propriétaires à réserver leur logement (parfois leurs logements avec un s) pour faire de la location estivale. Sans parler de la mode des SCI à but purement spéculatif qu’on connait bien dans l’île ! Cela provoque non seulement un manque de logements pour vivre à l’année, mais aussi des déséquilibres dans l’urbanisme et l’aménagement du territoire. On le voit encore en Corse, les documents d’urbanismes sont davantage calés sur cette réalité plutôt que sur les besoins de la population résidente ; au détriment de la nécessité de rééquilibrer une économie trop tertiaire, de préserver l’environnement ou les terres agricoles pour travailler à l’autonomie alimentaire dans un monde de plus en plus en proie aux méfaits de la mondialisation. Cette pénurie de terres et de logements à des prix accessibles pénalise surtout la jeunesse qui éprouve un sentiment de dépossession et donc de frustration extrême, pénalise aussi les contribuables locaux qui doivent pourvoir aux surdimensionnements des infrastructures. Certaines zones sont tellement en proie à ces « transferts » de population, que le phénomène provoque une acculturation dans des régions où – aussi – l’État méprise les langues régionales ! « Accéder à la propriété privée pour les gens du Pays Basque, ça devient pratiquement impossible, en particulier sur la côte » alarme un manifestant à Bayonne où se sont retrouvées « toutes les catégories sociales » commente Fr3 Nouvelle Aquitaine, « des maires, des élus de tout le Pays Basque étaient aussi présents ».
« On vivait jusque-là dans un T2 à quatre, avec deux enfants et ma femme, explique un autre manifestant, et on ne pouvait pas changer de logement parce que les agences nous refusaient, bien que je sois enseignant, je ne gagnais pas assez, je ne pouvais pas avoir un T3 sur Bayonne ». « Les dés sont souvent pipés quand on veut acheter » déplore une autre. « Quand une personne met une résidence pour le tourisme sur le marché, il faut qu’il puisse mettre un autre à titre permanent, pour inverser la tendance. Il faut que le logement permanent puisse être prioritaire. » C’est bien ce que prévoit le Padduc avec ses quotas imposés de résidences principales supérieurs aux résidences secondaires, mais on voit que cela ne suffit pas à rattraper le retard et que le contrôle de légalité reste inopérant sur ces questions. Pour le contrer, les maires suspendent la réalisation (ou la mise en compatibilité) de leur PLU, comme dans l’extrême sud…
Ce que demandent toutes ces régions, c’est un statut de résident seul à même de rééquilibrer les choses et, effectivement, de donner notamment la priorité aux résidents permanents, de préserver la terre et l’identité de leurs territoires. Il existe des mesures à droit constant que la Corse a revendiqué, voire tenté de mettre en œuvre depuis l’arrivée des nationalistes aux responsabilités, – encadrement des loyers, taxation des résidences secondaires, droit de préemption territorial, outil foncier pour booster la construction de logements sociaux, etc. –, mais aucun ne parvient à remplacer l’efficacité d’un statut de résident, comme en témoigne les expériences menées ailleurs en Europe, cf les Iles Aland.
Un impératif : faire grandir la mobilisation sur ce thème dans toutes nos régions. •