Mardi 17 janvier, le Parlement européen a élu l’Italien Antonio Tajani comme Président du Parlement européen.Désormais, le Parti Populaire Européen (la droite) préside les trois principales institutions européennes (Commission européenne, Conseil européen, Parlement européen).
Antonio Tajani est un homme politique italien, né à Rome en 1953. C’est l’un des co-fondateurs de Forza Italia, le parti de Berlusconi – dont il a été l’un des porte-parole dans les années 90. Il est élu député européen, pour la première fois, en 1994. Vice-Président de la Commission européenne en charge des transports, de 2008 à 2010, il rempile comme Vice- Président du gouvernement européen mais à l’industrie et à l’entreprenariat, de 2010 à 2014. En 2014, il est élu député européen et siège au Parti Populaire Européen (PPE, LR en France) et devient Vice-Président du Parlement européen.
Très conservateur, perméable aux lobbys, notamment industriels, il est accusé d’avoir été au courant des pratiques illégales des constructeurs automobiles, notamment la falsification des tests anti-pollution qui a été rendue publique avec le scandale Volkswagen. Du fait de ce passif, A.Tajani a dû se contenter d’une élection au 4e et dernier tour (351 voix pour lui contre 282 pour le candidat socialiste, 118 blancs, nuls ou abstentions), du jamais vu depuis 1982!
Aucun parti n’ayant la majorité absolue au Parlement européen, il est de mise qu’en début de mandature les partis qui veulent travailler ensemble se mettent d’accord. En 2014, le PPE et les Socialistes (PS en France) –rejoints plus tard par les Libéraux (UDI, MODEM en France)– ont signé un accord de gouvernance et se sont partagé le poste de Président du Parlement. La première moitié du mandat aux socialistes (Martin Schulz), la seconde période au PPE.
Mais cette année, les socialistes ont décidé de ne pas respecter l’accord et ils ont décidé de présenter leur propre candidat, l’Italien Gianni Pitella, Président du groupe S&D. En l’absence d’accord politique et de consensus autour d’un candidat, il a fallu aller au 4ème, et dernier tour, pour élire le Président du Parlement européen. En effet, selon les règles internes au Parlement, pour les trois premiers tours, la majorité absolue des voix exprimées est requise et tout député peut être candidat, pour peu qu’il soit soutenu par au moins 5% des membres, soit 38 sur 751. Par contre, au dernier tour, seuls les deux candidats les mieux placés au tour précédent sont présents sur les bulletins de vote, et celui recevant le plus de voix est élu. Furieux que le S&D ne respecte pas l’accord de 2014, le PPE a décidé de faire alliance avec les libéraux… et les eurosceptiques (conservateurs britanniques et polonais) pour s’assurer l’élection de leur candidat : une première, là aussi.
Débrancher la prise !
Les socialistes croyaient qu’ils pouvaient se racheter une « virginité politique » en «débranchant la prise» (avec les libéraux et le PPE). Mais après des dizaines d’années à cogérer toutes les institutions européennes avec les libéraux et la droite (Parlement européen, Commission européenne, Conseil…), le candidat des socialistes voulait en finir avec la «grande coalition » (PPE-S&D) sans pour autant se remettre en question ni même accepter de négocier avec de potentiels partenaires progressistes un accord de gouvernance pour réorienter l’Europe. Echaudés durant une demi-décennie par le comportement autoritaire, pour ne pas dire autocratique de Martin Schulz (utilisation du poste à des fins politiques personnelles, prises de position publiques contradictoires à celles du Parlement, recrutement d’amis politiques aux postes clé de l’administration…), il restera comme le premier Président du Parlement ayant fait deux demi-mandats (2012-2017), les autres partis progressistes
du Parlement européen ont refusé de signer un chèque en blanc aux socialistes incapables de présenter une alternative –et un candidat– crédible et désirable.
En réalité, le seul objectif des socialistes était de ne pas laisser les trois principales institutions aux mains du PPE (Commission européenne présidée par Jean-Claude Juncker, Conseil européen présidé par Donald Tusk et le Parlement européen). Le mandat du premier se terminant en 2019, les socialistes regardent désormais vers le Conseil européen pour y placer un des leurs, une fois le mandat (renouvelable) de D.Tusk terminé, en mai prochain. Aussi fou que cela puisse paraitre, certains osent même soumettre le nom de François Hollande pour présider l’institution européenne, on croit rêver !
2019, c’est demain !
Les socialistes, convertis aux idées libérales, sont co-responsables de cette Europe! Majoritaires au tournant du millénaire, ils n’ont fait qu’accompagner le système, parfois ils l’ont même aggravé! Minoritaires -depuis quelques années, ils se sont jetés dans les bras de la droite pour ne pas perdre de postes. Et désormais, ils souhaitent la combattre ! Quel culot !
La campagne européenne -qui aura lieu au printemps 2019- a déjà commencé. Si « débrancher la prise » est un devoir absolu, construire une alternative à la « grande coalition » est une nécessité. L’Alliance Libre Européenne (ALE), partout où elle se présentera, devra (re) présenter l’espoir de cette alternative à l’Europe du (grand) capital d’un côté et à l’Europe des (grandes) capitales de l’autre.
Portée par les nations sans État, l’ALE doit, en 2019, porter fièrement cette alternative. L’Europe des peuples est à construire, 2019 c’est demain !
Roccu Garoby
Vice-Président de l’ALE Jeune