Giri citadini è paisani

Il faut impliquer le peuple corse

Alors que le cycle des réunions au sommet avec Gérald Darmanin, pourtant relancé par l’implication personnelle d’Emmanuel Macron lors de la réunion du 23 février dernier place Beauvau, peine à progresser, l’initiative des « giri citadini è paisani » lancée par Femu a Corsica lors de son assemblée générale de janvier dernier rencontre un beau succès. Il y a deux semaines dans le Cortenais, ce week-end en Alta Rocca, les assistances ont été nombreuses, diverses et motivées. Ce dialogue à la base est le meilleur moyen de régénérer le dialogue au sommet.

 

 

Cette dynamique positive est nécessaire pour avoir raison des postures négatives qui s’expriment ça et là. Comme par exemple la brouille élyséenne suite au vote des députés corses en faveur de la motion de censure du groupe LIOT sur le dossier des retraites ; ou encore un regain de la mythification de la violence clandestine par une partie des jeunes (ou des moins jeunes), comme si l’expérience des années 90 n’avait pas été assimilée. Et aussi l’affichage d’un pessimisme blasé par les uns, ou les discours calculés et politiciens des autres.

La voix qui monte du terrain, si elle prend force, aura raison de toutes les postures. Encore fallait-il faire en sorte qu’elle s’exprime. Femu a Corsica s’y est engagé avec détermination. Rien ne garantissait à l’avance ce succès, surtout dans ce contexte d’incertitude sur l’avenir de processus. La Corse restera-t-elle une priorité de l’État ? Une réforme constitutionnelle sera-t-elle finalement lancée alors que la popularité d’Emmanuel Macron est très affaiblie ? Le préalable des 3/5es du Parlement, regroupant obligatoirement majorité et opposition sera-t-il possible alors que la France apparaît plus déchirée que jamais en camps irréconciliables ?

La seule pression capable de bousculer ces facteurs d’immobilisme est la mobilisation populaire, celle qui doit monter du plus profond de la société corse. Il faut que tout calcul politicien, pour les uns comme pour les autres, soit perdant s’il a pour effet d’aller contre le progrès pour la Corse. Et cela à quelque niveau que ce soit, au niveau des mouvements nationalistes, à celui de l’Assemblée de Corse en général, à celui du Parlement français comme à celui du gouvernement. Chacun doit être placé devant ses responsabilités par le peuple corse, et cela ne sera le cas que s’il s’empare pleinement du débat sur l’avenir de la Corse en exprimant son désir de liberté et sa revendication d’un véritable statut d’autonomie.

 

Lors de ces réunions, les problèmes de la Corse sont abordés dans toute leur diversité : transports, vie chère, faiblesse de l’économie, langue corse, spéculation foncière, etc.. Le lien avec l’autonomie est chaque fois expliqué. Les responsables qui animent ces giri citadini è paisani favorisent ainsi l’implication concrète et l’expression directe.

La forte participation à ces réunions est un antidote efficace aux virus qui menacent le processus. Chacun vient y exprimer son attente d’une issue positive pour la Corse de la séquence politique ouverte par le processus de Beauvau, et, tous ensemble, ces Corses mobilisés combattent le fatalisme ambiant.

Ce que démontre Femu a Corsica à travers ces initiatives, c’est que l’implication du peuple corse au-delà de ses élus est essentielle. Sans cette dimension le processus reste très fragile. SI une forte mobilisation s’exprime à travers les giri citadini è paisani, il sera beaucoup plus difficile pour l’État de se désengager, aux autres mouvements nationalistes de tergiverser au gré de leurs priorités tactiques vis-à-vis de l’Exécutif, aux autres forces politiques corses de se mettre en retrait de la revendication autonomiste le jour venu, et aux forces politiques en France de refuser demain un soutien à une réforme constitutionnelle si nous l’obtenons.

Le succès des deux premiers « giri » nous permet d’envisager une suite qui ira crescendo. •