Autonomie de la Corse

Gilles Simeoni relance le processus de Beauvau

Gilles Simeoni et Catherine Vautrin
Par François Alfonsi
Certains disaient le processus de Beauvau mort et enterré. En une semaine, le voici ressuscité ! Catherine Vautrin a confirmé qu’elle agissait avec le mandat du président de la République et celui du Premier ministre pour avancer vers la réforme constitutionnelle envisagée.

 

 

Gilles Simeoni est ressorti de trois heures de discussions avec Catherine Vautrin, chargée officiellement du dossier par le nouveau gouvernement, avec des engagements concrets pour reprendre le processus de Beauvau là où il était arrivé lors de la phase d’élaboration des « écritures constitutionnelles » validées par Gérald Darmanin.

Après six mois de parenthèse liés aux évolutions erratiques de la politique française, de dissolution précipitée en élection piégée, suivi d’un long temps de crise institutionnelle et d’impuissance à dégager un gouvernement, le dialogue a repris et le projet est relancé.

Les conditions de cette reprise n’étaient pas gagnées d’avance, et le sentiment que la Corse n’était plus une priorité à Paris était largement répandu. Le discours de politique générale de Michel Barnier avait conforté cette impression d’un sujet passé au second rang des priorités d’un gouvernement à la stabilité précaire.

 

La réaction est venue du blocage total et soudain des ports et aéroports de la Corse par le mouvement de grève des agents de la Chambre de Commerce, avec un soutien unanime des Corses, après que Gilles Simeoni a dénoncé « la guerre faite à la Corse » par l’administration de l’État dans ce dossier.

En un instant, deux évidences se sont manifestées : la Corse est encore et toujours un dossier hautement inflammable que le gouvernement ne peut mettre de côté, et Gilles Simeoni, président du Conseil exécutif de Corse, est le leader incontestable dans l’île.

Immédiatement, le gouvernement a pris conscience qu’il fallait changer de cap, et le processus de Beauvau a été ainsi relancé.

Sur le fond, cet épisode exprime que la force principale qui peut entraîner les progrès espérés se situe en Corse. Rien n’avance depuis Paris ; tout dépend de la poussée que nous sommes capables d’actionner en Corse. C’est la mobilisation, unanime, qui a débloqué la situation.

Elle l’a débloquée pour le dossier « ports et aéroports » qui resteront des services publics de la Corse. L’État, là-dessus, a pris des engagements fermes dont la mise en œuvre est désormais acquise.

 

Pour aller vers l’autonomie de la Corse, nous sommes encore loin du but, et l’adoption de la réforme constitutionnelle doit franchir toutes les étapes parlementaires. Mais le travail effectué depuis 2022 va pouvoir continuer, et la condition pour qu’il aboutisse est que les forces engagées en Corse derrière le projet d’autonomie expriment une volonté forte, sans se perdre dans des jeux politiciens délétères qui, pour affaiblir la position de l’un, conduisent à créer les conditions de l’échec de tous.

Mais le premier dossier qui vient à l’agenda est crucial. La rallonge accordée à la dotation de continuité territoriale, après le déclenchement de la guerre en Ukraine qui a provoqué le renchérissement des coût des carburants, a été validée jusque-là, mais elle ne l’est pas encore pour 2025. Sans ce complément de financement, les contrats signés avec les compagnies maritimes et aérienne ne pourraient être honorés, et l’impact social d’une telle situation serait explosif.

Or la décision de reconduire cette dotation se heurte à deux obstacles. Primo, les coupes budgétaires en cours ont pour effet mécanique de barrer la route à toute inscription de crédits nouveaux, fussent-ils anticipés. Secundo, la situation sociale en Martinique fait ressurgir la revendication d’une amélioration de la continuité territoriale pour ces territoires, au nom d’une égalité de traitement avec la Corse.

Cependant, l’enjeu pour la Corse est tel qu’il est de la responsabilité de tous de déboucher sur une décision rapide. La discussion budgétaire commence à l’Assemblée nationale.

Les finances de la Corse jouent gros dans ce dossier. •