St’edituriale di Màssimu Simeoni hè statu scrittu di ghjennaghju 1989. Una lezziò di filusufìa è di pulìtica… U pòpulu corsu hà bisognu di e so pròpie lege.
« Le fort et le faible… »
par Max Simeoni
« Entre le fort et le faible, c’est la liberté qui opprime et la loi qui affranchit » Lacordaire.
Toute société humaine, pour ne pas être entièrement soumise à la loi de la jungle, a besoin d’un minimum d’ensemble de lois. Mais elle reste dominée par « les forts ». La loi freine, canalise, « amortit » leur force pour que les moins forts ne soient pas réduits en total esclavage. La solution idéale, finale, serait que les forts mettent leurs capacités naturelles ou acquises par chance, au service de la collectivité par solidarité, par humanisme. Certains croient dans un avenir plus ou moins lointain à ce progrès moral et ils sauvent leur dignité en œuvrant en ce sens. D’autres pensent que les faibles n’ont d’autres choix que de s’unir pour se libérer. Les humanistes et les révolutionnaires.
Aussi le meilleur équilibre du moment, celui dont se flattent les « démocraties » est-il très relatif, plein de rapports de forces, de domination et de toute façon fragile, susceptible de régression à la moindre secousse. Il y a longtemps que le progrès matériel, technique et scientifique ne garantit plus des aubes radieuses aux peuples les plus avancés. L’oppression de l’homme par l’homme, de peuple à peuple, reste fondamentalement naturelle.
Lacordaire n’a émis qu’une lapalissade ? Malheur au peuple qui ignore cette évidence.
Le peuple corse, petit par nature, donc faible, sans espoir de retour, n’a aucune chance de pouvoir imposer quoi que ce soit à quiconque mais a toutes les chances de plier sous la loi des autres. C’est ainsi qu’il est voué sans cesse au rôle de peuple colonisé depuis la nuit des temps. Il a survécu comme il a pu. Il s’est défendu de même. C’est le terrible destin qui lui est dévolu. Son âme s’est forgée, avec plus ou moins de bonheur, à l’éternelle défense, sous peine de mort.
Aujourd’hui rien de changé. Faible à jamais il a besoin de la loi pour s’affranchir, sa loi, non pour dominer, pour briser, pour conquérir, mais pour vivre chez lui, sur sa terre.
Il a besoin d’être reconnu comme peuple à la face du monde et avec la plénitude de ses droits. Il a besoin de son autonomie sans laquelle l’Europe de 1992 l’avalera comme un boa. Il a besoin de la loi pour avoir des échanges maîtrisés et pour conserver sa terre.
La dérision est que lorsqu’il réclame la loi pour sa survie, les colonialistes le montrent du doigt et l’accusent d’être rétrograde, violent, raciste, xénophobe, voué aux pires troubles et à la déchéance. Pour eux son progrès moral passerait par sa soumission et par sa mort.
Le burlesque est que certains de ses éléments auto-colonisés sont prêts à le croire.
Le tragique est qu’il en existe quelques-uns prêts à se battre allègrement et sans le savoir comme des harkis.
Le comique et le sinistre est aussi que des Corses authentiques et des allogènes sincères trouvent que ce déjà cadavre est trop récalcitrant et devrait leur épargner des soubresauts grotesques.
Le triste et le dangereux de ce spectacle est que ce peuple est mal en point mais pas encore mort, qu’il réagit, qu’il se décolonise, laborieusement, qu’il va secouer dur.
La lucidité, l’intelligence, pour ne pas dire la simple justice ou le bon sens, commandent qu’on l’aide dans cette convalescence. Il est dans l’histoire des peuples des convalescences irréversibles.
Convalescence il y a, agitée ou apaisée, ce sera selon… le choix qu’on lui laissera en définitive.
Le seul. •