« Un contexte d’ensemble inquiétant et malsain » : le tweet de Gilles Simeoni en réaction à l’assassinat de Maxime Susini définit l’inquiétude qui envahit la Corse après ce nouvel assassinat. Guet-apens, véhicule volé puis retrouvé brûlé une fois le meurtre accompli, police impuissante à confondre les assassins : ce scenario, maintes fois répété dans les fictions policières à succès, se déroule à nouveau, « en vrai », sous nos yeux. La société corse est atteinte car chacun comprend bien que cette vague de violence exprime un dérèglement d’ensemble.Le profil de Maxime Susini est un profil de militant engagé. Qui dérangeait-il au point que l’on ait voulu le faire assassiner ? Ce mystère pèse sur la société et répand l’inquiétude, car il pose inévitablement la question de la prochaine victime sur une liste qui ne cesse de s’allonger. Et il pose aussi la question de l’efficacité de la police et de la justice pour enrayer la spirale infernale.
Car dans le même journal qui relatait l’impuissance des services de police dans leur enquête sur l’assassinat de Maxime Susini, un autre article expliquait que le procureur de la République Franck Rastoul, le plus haut magistrat exerçant en Corse, avait demandé le remplacement du plus gradé des policiers chargés des enquêtes, Christian Sivy, arguant de « mauvaises relations », et aussi d’enquêtes menées de façon douteuse. L’article n’en dit pas plus mais il en dit suffisamment pour que des « porosités malsaines » soient présumées entre malfrats et policiers.
Cette polémique interne entre services de l’Etat révèle des dysfonctionnements majeurs, car c’est à l’abri de toute publicité que ces questions se règlent habituellement. Le détour par une communication auprès des journalistes est un indicateur de l’intensité du conflit entre fonctionnaires issus des deux administrations, Ministère de la Justice et Ministère de l’Intérieur.
Au détour de cet article on apprend que le point de départ de la querelle entre services est l’enquête clandestine menée sur la situation fiscale d’une gradée de la gendarmerie depuis confondue pour fraude fiscale par un de ses collègues de la Police Judiciaire. Ce qui situe les priorités de la maréchaussée alors que meurtres et attentats prolifèrent. Puis plusieurs autres affaires ont défrayé la chronique où les enquêteurs visés par le procureur sont suspectés, soit d’avoir rendu intentionnellement des conclusions erronées, soit d’avoir bidouillé des actes de procédure. Pendant ce temps, le crime organisé a continué ses affaires …. et ses méfaits !
La presse a aussi relevé un indicateur tangible du climat d’insécurité que la Corse connaît. C’est sur notre île que les statistiques françaises explosent pour la possession de voitures blindées. Ce qui indique nettement que des malfrats en action sont sur le qui-vive, et que certains citoyens honnêtes, notamment des chefs d’entreprises, craignent pour leur vie.
Jusqu’où cela va-t-il aller ? Dans la série macabre qui secoue la Corse depuis plusieurs mois, singulièrement en région ajaccienne, le sentiment est répandu que la situation est en train de dégénérer.
Maxime Susini a été entraîné dans ce tourbillon et sa famille, son village, et toute une génération de jeunes que sa personnalité a marquée lors de ses années d’études et de militantisme, est dévastée par sa disparition sous les balles d’un mystérieux tueur.
A Corsica, torna, hà persu unu di i so figlioli.
Unu di più, unu di troppu.
François Alfonsi.