Ambiente

L’empreinte carbone de la Corse devient la plus élevée de France métropolitaine

Le 25 septembre à 18h, l’intensité carbone en Corse atteignait 572 grammes (gCO2 eq/KWh) contre 78 grammes en moyenne pour l’hexagone. Un différentiel énorme dû à une alimentation électrique dominée par le fioul qui représente 42,35 % de l’énergie disponible en Corse et est responsable de 52,05 % des émissions de CO2. Explications.

 

En Corse ce sont les centrales de Lucciana et du Vaziu qui alimentent majoritairement l’île. Ce constat que nous faisons aujourd’hui était-il-prévisible ? Évidemment. Les écologistes et les nationalistes corses ont entamé un combat contre le fioul lourd avec la lutte contre la centrale du Vaziu ayant débouché sur la naissance du comité anti-Vaziu à la fin des années 1970, ils préconisaient alors une centrale au gaz naturel, réputé l’énergie fossile la moins polluante. Cette question domine le débat énergétique dans l’île depuis un demi-siècle. On a manqué hélas le train de ce progrès. Aujourd’hui, et depuis 20 ans, c’est sur notre potentiel en énergies renouvelables que se fonde la revendication des nationalistes et des écologistes.

En France hexagonale, c’est l’énergie nucléaire qui permet de limiter les émissions de carbone. La Corse possède la 3e plus forte empreinte carbone des îles méditerranéennes, talonnée par l’île voisine de Sardaigne qui affiche 508 grammes liés à sa consommation de charbon. En Méditerranée, seules deux îles, Chypre avec 624 grammes et Ibiza avec 612 grammes, font pire à cause également de la prédominance du fioul.

 

Une empreinte Carbone sur le podium français

L’empreinte carbone en Corse a connu une hausse de 4,3 % en 2021 par rapport à 2020, estimée à 10,10 tonnes de CO2 par habitant. « Les secteurs très énergivores du transport et du logement y sont pour beaucoup (plus de 40 % de l’impact global). Néanmoins, concernant la catégorie “alimentation” de l’étude, les Corses se situent à 5 points de moins que la moyenne nationale » commente le site hellocarbo.com qui a pour objectif « d’accélérer la prise de conscience écologique pour réduire notre empreinte carbone ».

Si l’empreinte carbone des Français a augmenté de 5 % par rapport à 2020, année COVID, elle n’atteint en moyenne que 9,52 tonnes de CO2e/habitant en 2021. Or, pour rester dans les limites d’un scenario à +1,5°C de réchauffement global, la moyenne des émissions par Français ne devrait pas excéder 2,5 tonnes de CO2e / habitant. Un signe d’espoir néanmoins : l’indice carbone des Français reste près de 20 % moins élevé qu’en 2019 ! Selon les prévisions, l’impact carbone annuel moyen français sera de 4 tonnes de CO2e en 2022. C’est 36 % de moins qu’en 2019. Ce sont les transports et les biens qui sont les plus polluants. « La tendance sur les quatre dernières semaines est de 111 kg CO2e. Ces émissions sont l’équivalent de la fabrication de 6 jeans, la production de 19 hamburgers et 762 kilomètres parcourus en trottinette électrique », précise le site Carbo. Le classement par région met aussi la Corse dans la queue du peloton, l’île fait néanmoins mieux que la Bretagne et les Hauts de France qui détiennent les plus mauvais records.

« L’empreinte carbone est un indicateur qui mesure l’impact des activités humaines sur l’environnement, notamment les émissions de gaz à effet de serre, explique notre consœur Nicole Mari, journaliste à Corse net infos. Elle peut s’appliquer à un individu, à une entreprise ou à un territoire. Exprimée en dioxyde équivalent ou carbone CO2e, elle revient à déterminer l’impact des activités sur la planète et donc leur contribution au réchauffement climatique. Selon son mode de vie, un individu émet une quantité plus ou moins importante de CO2 dans l’atmosphère. Mesurer son empreinte carbone pourrait lui permettre de corriger certaines habitudes de consommation. C’est ce que propose l’indice Carbone®, développé par Carbo, qui suit chaque semaine l’impact de la consommation des Français à travers les dépenses bancaires d’un panel moyen de 500 utilisateurs. Chaque fois qu’une carte bancaire est utilisée, le site analyse le type de transaction (essence, hôtel, alimentation, etc.) et calcule le volume de CO2 associé. Il utilise, pour cela, un facteur d’émission monétaire, exprimé en CO2 par Euro, qui donne un ordre de grandeur du contenu carbone d’un bien ou d’un service à l’aide de son prix. Le site propose à chaque consommateur d’estimer son empreinte. Le but est que chacun puisse agir, à son niveau, pour lutter contre le changement climatique. »

Nous avons eu l’occasion d’échanger à ce sujet avec Leslie Pellegri, élue en novembre 2021 par le conseil politique d’I Verdi Corsi, déclinaison régionale d’Europe Ecologie les Verts, qui remplace Toni Casalonga dans cette fonction. « La Corse a remporté la palme du plus mauvais bilan carbone de France, mais il est important de le préciser, ce classement traitait uniquement de l’alimentation électrique, la France métropolitaine s’en sort mieux dans ce classement grâce à une électricité produite en majorité avec le nucléaire » nous précise-t-elle.

 

Doit-on pour autant souhaiter la même chose pour la Corse ?

« Une production d’énergie nucléaire qui, si elle n’émet pas de gaz à effet de serre, pose quand même énormément de questions, que ce soit en termes de déchets nucléaires, de la sécurité autour de ses centrales vieillissantes et du risque d’accident, ou même sur l’approvisionnement en uranium » ajoute néanmoins Leslie Pellegri.  Sans parler, comme on le voit aujourd’hui en Ukraine, de son utilisation comme moyen de pression dans les conflits ! Les seules solutions durables et respectueuses de l’environnement et de la santé, sont en effet dans la maîtrise de la consommation énergétique et dans le développement des énergies renouvelables dont la Corse possède un grand potentiel.

Mais nos avancées en ce domaine, si elles ont progressé depuis quelques années, restent trop lentes. Et avec une Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) vraisemblablement toujours pas signée par l’État, et les incertitudes qui planent sur l’approvisionnement de la future centrale du Ricantu, la situation n’est pas prête d’évoluer dans le bon sens pour la Corse… •

Clara Maria Laredo.

 

Pour plus d’informations : hellocarbo.com