Première victoire pour le Rapport Biodiversité et Agenda 2030

Lier sauvegarde de la biodiversité, lutte contre la pauvreté et droits des peuples

Le rapport d’initiative sur « le rôle de la politique de développement dans la réponse à la perte de biodiversité dans les pays en développement, dans le cadre de la réalisation de l’Agenda 2030 », présenté par Michèle Rivasi, eurodéputée du groupe Verts-ALE qui en est le rapporteur, a été approuvé par une grande majorité de groupes politiques en commission du Développement du Parlement européen ce 13 juillet 2021. C’est une étape importante en vue de l’adoption de cet important rapport par le Parlement européen. Explications.

 

L’Humanité est impactée durablement par la perte de biodiversité, l’utilisation de méthodes de production non durables et polluantes, la négation des droits, notamment fonciers, des peuples. Ce rapport vise à inverser la tendance d’un monde basé sur le profit, il lie droits des peuples, biodiversité, santé, lutte contre la pauvreté… « C’est une victoire d’avoir trouvé des compromis pour réunir différents groupes politiques autour d’enjeux clés » a commenté l’eurodéputée.

Son rapport arrive dans un bon timing, à quelques mois de la prochaine Conférence des Parties (COP15) de la Convention sur la diversité biologique (CDB) des Nations Unies qui aura lieu en octobre prochain à Kunming.

 

Les pays en développement sont les plus touchés par la dégradation de la biodiversité. 70 % des pauvres dans le monde dépendent directement des ressources naturelles. Or la Conférence des Parties ambitionne de placer au moins 30 % de la surface de la Terre sous statut de conservation d’ici 2030. Aussi, pour Michèle Rivasi, « il est primordial de soulever les préoccupations concernant le coût humain de cette proposition, ainsi que son efficacité en tant que mesure environnementale. »

En Asie du Sud et dans le bassin du Congo des communautés sont déplacées et dépossédées de force pour faire place à des aires protégées. « Cette démarche classique d’exclusion est porteuse de risques de conflit et de coûts sociaux élevés. Quand on parle de conservation de la nature, nous devons adopter une approche sur les droits, la priorité est de reconnaître et respecter les droits et les pratiques traditionnels des peuples autochtones et communautés locales qui contribuent à la conservation et à l’utilisation durable de la biodiversité. Sans cela, les objectifs mondiaux en matière de biodiversité ne peuvent être atteints » affirme Michèle Rivasi.

Le rapport « pointe notamment l’importance de lutter contre les OGMs et les pesticides, la biopiraterie et les effets dévastateurs de l’agro-industrie et du commerce international. La priorité est de protéger les droits humains, fonciers et des semences et de reconnaître l’écocide. »

 

Pour Michèle Rivasi, les peuples autochtones ont « un rôle stratégique dans la protection de la biodiversité. Le manque de reconnaissance des droits fonciers coutumiers de ces peuples génère des risques d’accaparement des terres, mettant ainsi en péril leurs moyens de subsistance et leur capacité à répondre au changement climatique ou à la perte de biodiversité. » La perte de biodiversité accentue les inégalités et la marginalisation des personnes les plus vulnérables, notamment les femmes, les jeunes, les peuples autochtones, les communautés tributaires de ressources naturelles, accentue cette perte de biodiversité. C’est un cercle vicieux. « Le rapport biodiversité et Agenda 2030 rappelle le devoir des États, en vertu du droit international, de reconnaître et de protéger les droits des populations autochtones à posséder, développer, contrôler et utiliser leurs terres communales et à participer à la gestion et à la conservation des ressources naturelles » dit encore Michèle Rivasi.

Mise en place de mécanismes de responsabilités, lutte contre les méfaits de l’extraction minière, de l’expansion de l’agro-industrie, du développement de méga-infrastructures, vigilance dans les mesures de conservation à grande échelle afin qu’elles ne se fassent pas au mépris des droits humains et des droits des peuples, pour l’eurodéputée, il faut veiller « y compris à la reconnaissance de leur droit à l’autodétermination et à l’accès aux droits fonciers. »

 

L’UE doit également être vigilante dans l’examen des accords commerciaux (30 % des menaces pesant sur les espèces sont dues au commerce international) et faire de « la lutte contre la criminalité environnementale une priorité politique stratégique primordiale dans la coopération judiciaire internationale et dans les enceintes multilatérales, notamment en élargissant le champ d’action de la Cour pénale internationale aux écocides. »

Il faut augmenter les fonds destinés à la protection de la biodiversité et supprimer les subventions préjudiciables à l’environnement.

Autre préoccupation majeure, « la consommation de l’Union européenne est à l’origine d’environ 10 % de la déforestation mondiale » rappelle Michèle Rivasi qui prône « un cadre juridique pour arrêter et inverser la déforestation mondiale provoquée par l’Union européenne. »

L’UE doit « soutenir les pays en voie de développement dans la création de chaînes d’approvisionnement courtes, le développement de l’agroécologie, le soutien aux petits agriculteurs, tout en garantissant les droits fonciers et les droits des communautés locales. »

 

Environ 75 % de la diversité génétique des plantes a été perdue dans le monde, ce qui compromet la sécurité alimentaire mondiale. Le rapport demande à l’UE de réformer le système de l’Union internationale pour la protection des obtentions végétales (UPOV) sur la propriété des variétés végétales afin de permettre aux petits exploitants agricoles d’utiliser des semences locales et d’introduire un mécanisme de partage équitable, le respect des droits des semences, et une aide au développement qui ne serve pas à promouvoir les technologies de modification génétique OGM. « Les pratiques non durables dans l’agriculture et la sylviculture, le prélèvement excessif de l’eau, la pollution par des produits chimiques dangereux, entraînent une dégradation de l’environnement et une perte de biodiversité. La Commission est invitée à prendre des mesures pour interdire l’exportation hors de l’UE de substances dangereuses interdites dans l’UE… Aucune dissémination d’organismes issus du forçage génétique ne devrait être autorisée, y compris à des fins de conservation de la nature, conformément au principe de précaution. »

 

Enfin, « la pandémie de COVID-19 a démontré l’importance de reconnaître le lien intrinsèque entre la santé humaine, la santé animale et la biodiversité.  Le risque de pandémies est en effet accru par les changements anthropiques qui rapprochent la faune sauvage, le bétail et l’homme, tels que le changement d’affectation des sols, la déforestation, l’expansion et l’intensification de l’agriculture, le commerce et la consommation licites et illicites d’espèces sauvages ainsi que la pression démographique. Ce texte souligne en conséquence que la restauration écologique est essentielle à la mise en œuvre de l’approche Une seule santé » commente encore Michèle Rivasi qui rappelle la nécessité de mettre davantage l’accent sur les soins de santé, la prévention des maladies et l’accès aux médicaments dans les pays en développement. La majorité des médicaments utilisés pour les soins de santé et la prévention des maladies sont issus de la biodiversité, tandis que de nombreuses thérapeutiques importantes sont issues des connaissances autochtones et de la médecine traditionnelle. •

Sources : groupe Verts-ALE.