Un annu dopu

Jean Félix Acquaviva

Probablement l’un des plus actifs et des plus productifs au sein du Conseil Exécutif, Jean Félix Acquaviva est la bonne surprise de ce « gouvernement ». Conseiller exécutif élu en décembre 2015, président de l’Office des Transports, président du Comité de Massif, en charge également des routes, il est aussi maire de Lozzi depuis 2014, et président de l’Association Corse des Élus de la Montagne. Après des années d’attentisme des précédentes mandatures, en quelques mois à peine, il a su donner vie à la compagnie maritime corse et au Comité de Massif, chapeau ! Après l’adoption à une large majorité du premier Schéma d’Aménagement, de Développement et de Protection de la Montagne Corse ce vendredi 24 février, c’est donc son tour de donner son sentiment sur la première année aux responsabilités des nationalistes.

Interview.

 

L’élection des nationalistes aux responsabilités de la Collectivité territoriale de Corse a été qualifiée de « tremblement de terre » en décembre 2015. Un an après, malgré les difficultés de toutes sortes, satisfait de ce premier bilan ?

Durant cette année écoulée, l’Exécutif et l’ensemble de la majorité territoriale ont beaucoup travaillé au service de la Corse et de son Peuple.

Les premiers mouvements de ligne se sont instaurés sous notre impulsion :

remise en ordre budgétaire avec règlement des arriérés et relance de l’investissement, instauration de la transparence et de la démocratie partout au sein de la Collectivité territoriale de Corse et avec les communes et intercommunalités, adoption de la Compagnie territoriale maritime sous forme de Semop et SEM, baisse des tarifs résidents, fret et Export, Obtention du statut d’Ile-Montagne et adoption du premier schéma de développement de la montagne, élaboration du SRDEII, renforcement du lancement des appels à projets PPE et PDRC, accords de coopération Corse-Sardaigne-Baléares, coefficient d’insularité rehaussé pour la santé dans l’île… Et bien sûr, concrétisation de la Collectivité unie et de la prolongation du régime dérogatoire des droits de succession sur 10 ans.

Tout cela est très important et démontre de la capacité de gestion et de transformation portée par l’Exécutif et la majorité, dans la suite de la « révolution démocratique » du 13 décembre 2015.

Il faut poursuivre et amplifier le mouvement.

Le nationalisme s’est imposé comme force politique à la fois crédible et transformatrice. Il faut continuer et améliorer ce qui peut l’être, d’autant plus que sur la question de la langue Corse, du foncier, du pouvoir législatif de plein droit et du transfert de fiscalité, il nous faudra avancer vite dans les quelques années qui viennent.

Vous avez mis sur pied le «Comité de Massif », et à travers lui, remis l’accent sur les priorités pour l’intérieur et la montagne corse. Mais tout reste fragile… et l’attente est énorme, les prochaines étapes ?

Suite à la relance du Comité de Massif, à l’obtention de la reconnaissance de la Corse, « Ile-Montagne » dans la loi Montagne du 28 décembre 2016, et à la large adoption du premier schéma d’aménagement, de développement et de protection de la montagne corse 2017-2023 par l’Assemblée de Corse (48 voix pour, 3 abstentions, aucun vote contre), il convient dorénavant de structurer l’ingénierie de la CTC, de ses agences et offices, d’aller à la rencontre des intercommunalités et PETR pour qu’ils fassent de même, puis élaborer un calendrier des opérations prêtes à être engagées, entamer enfin des négociations avec le prochain gouvernement pour l’adaptation des normes et règlements (moyens pour la santé, l’éducation, les communes…), ainsi que sur le plan fiscal (zone fiscale prioritaire de montagne), conformément au statu d’Ile-Montagne. Le Comité de Massif Corse ou plutôt « Cumitatu di a Muntagna Corsa » sera un lieu essentiel de mobilisation des acteurs, de débats, d’échanges et de conception, en relation avec les territoires de l’île. Le combat pour la revitalisation de l’intérieur a pris une nouvelle dimension, qui nécessite une structuration dans le temps et une évaluation permanente des actions et des résultats. C’est un enjeu du nationalisme que de pouvoir changer structurellement les choses sur une décennie sur ce plan. Nous allons nous y atteler.

D’aucuns restent sceptiques sur les financements… concrètement, comment cela va marcher, pour un maire lambda, quelles seront les procédures ?

Pour les financements, nous avons mutualisé les cofinancements existants (PEI, Feder, Feader, PPE, DETR) et abonder avec une moyenne de 7 millions d’euros par an du reliquat de l’enveloppe de continuité territoriale, qui pourra être remplacé par le FNADT «Montagne » lorsque celui-ci sera obtenu. Le tout pour un montant prévisionnel de 182,3 Millions d’euros. J’ajoute que, comme déjà précisé, le schéma intervient en plus-value d’autres politiques existantes vis-à-vis du rural ou de la montagne, qui feront l’objet d’une recherche de convergences et de simplifications.

Dans tous les cas, un numéro unique, et une centralisation, sera réalisé par le Comité de Massif corse qui viendra au contact de la commune ou de l’intercommunalité qui sollicite pour un projet.

Soit celui-ci s’insère dans le cadre du schéma, soit celui-ci est de l’ordre d’une politique sectorielle portée par une agence. Dans les deux cas, un suivi sera réalisé sous l’égide du Comité de massif, avec une ingénierie renforcée en soutien de la collectivité concernée.

Autre avancée indéniable de la mandature, la compagnie régionale ; plus de grève, une meilleure maîtrise de nos transports, des tarifs en baisse… la Corse s’est-elle enfin approprié ses transports maritimes ?

Nous avons franchi un cap irréversible dans le domaine des transports maritimes.

La CTC atteint, par la mise en place des Semop d’exploitation et la SEM d’investissement, un degré de contrôle, d’évaluation et de participation à l’organisation des transports maritimes, jamais égalé jusqu’à ce jour pour la DSP Corse-Continent. Cela se mettra définitivement en place juridiquement durant cette année 2017. Ce changement s’accompagne d’une baisse tarifaire, et par ailleurs, de la mise en œuvre d’une continuité territoriale méditerranéenne (DSP Corso-Sarde).

Nous sommes sur la bonne voie.

La nouvelle majorité doit cependant supporter un lourd passif des gestions précédentes. Dernière nouvelle en date, 89M d’euros à rembourser à la Corsica Ferries… comment est-ce possible ?

Là encore, comme dans d’autres dossiers, nous héritons des scories du passé. Nous allons réunir nos conseils. Nous allons aussi rencontrer Corsica Ferries. Dans tous les cas, nous préserverons l’intérêt public. Celui du Peuple Corse.

Quand allons-nous inaugurer notre premier navire ?

Dans notre calendrier le premier navire au GNL/Électricité arrivera en 2022.

Les routes relèvent de votre compétence. Là aussi l’attente est grande, quels sont les projets ?

Dans ce domaine, nous réformons les priorités des anciens schémas routiers en réalisant un Plan Pluriannuel d’Investissement 2017-2025. Malgré les contraintes budgétaires, nous arriverons à mobiliser 600 millions sur les routes et le rail avec des opérations qui seront priorisées selon leur degré d’urgence, leur maturité technique et foncière, et selon des principes clairs (désenclavement des zones rurales, sécurisation, diminution des temps de parcours…). Les routes frappées par les intempéries feront l’objet d’une attention plus que particulière.

Avec l’État, les relations sont plutôt étranges. Une sorte de « reconnaissance » du bien-fondé de certaines demandes d’une part, un système judiciaire qui ne semble plus épargner le clan comme par le passé… et d’autre part, toujours les mêmes fermetures jacobines face aux revendications essentielles, doublées de provocations régulières en direction de la jeunesse… comment analysez-vous ce contexte confus ?

Contexte confus oui. Et l’on se rend compte que l’État est traversé par des courants différents et contraires concernant la Corse. Notre gouvernance, ou plutôt devrais-je dire notre gouvernement, devra capitaliser autour des premières avancées obtenues, et faire comprendre à l’État, une fois pour toutes, qu’il est temps de traiter positivement la question corse dans toutes ses dimensions : Langue corse, Peuple Corse, pouvoir législatif, foncier, et bien entendu, l’amnistie des prisonniers.

La structuration de Femu a Corsica…une chimère ?

« Femu a Corsica » doit accélérer sa structuration.

Il faut faire enfin de « Femu » l’outil attendu et nécessaire pour accompagner les grands changements à opérer dans l’île. De nouveaux cadres doivent émerger, Femu a Corsica doit être ce lieu de formation et d’émancipation politique pour la jeunesse insulaire, et au-delà tous les Corses, en désir de participer à la construction de la Nation corse.

Comment le nationalisme se prépare-t-il à l’échéance de décembre 2017?

Je pense que le nationalisme a les moyens de franchir le cap de décembre 2017 sous les meilleurs auspices eu égard aux résultats déjà engrangés et à la confiance que semblent lui accorder les Corses.

À nous de ne pas décevoir, de tracer la voie, de rendre contagieux l’espoir.

Auparavant, il y aura les législatives, peut-on franchir une nouvelle étape dans notre progression en envoyant des élus à Paris ?

Je pense effectivement, qu’aujourd’hui, certainement pour la première fois, nous avons la possibilité d’envoyer à Paris des députés nationalistes qui pourront, en lien direct avec la Collectivité territoriale de Corse, sa majorité et son Exécutif, développer une stratégie offensive pour redonner à la question Corse toute sa dimension politique.

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