Incidents quartier di e Canne à Aiacciu

Agir contre la drogue sans céder au racisme

La constitution de « points de deal » où se vend à ciel ouvert la drogue aux usagers par des revendeurs avec pignon sur rue a atteint la Corse aussi. Le quartier di e Canne à Aiacciu en est un, tenu par des délinquants très souvent issus de l’immigration.

 

Deux employés communaux en ont subi la pression car leur travail quotidien venait perturber la tranquillité des délinquants lors de leurs opérations de vente. Menacés de mort, leur indignation relayée par les médias et les réseaux sociaux a provoqué un mouvement de révolte qui a amené un petit millier de manifestants à se rendre sur place pour dénoncer la mainmise du trafic de drogue sur ce quartier.

Une telle manifestation a eu un premier effet constaté aussitôt : elle met la pression sur les pouvoirs publics. Dans les jours qui ont suivi, les voitures ventouses utilisées par les trafiquants pour dissimuler leur drogue sans risquer une fouille qui les ferait condamner pour trafic ont été enlevées, et les rondes de police ont été multipliées, avec pour effet de « casser » le trafic qui s’était installé. Pour la population résidente, malgré les dérives de quelques-uns aux slogans racistes dans ce quartier populaire de la ville, la manifestation est plutôt bien accueillie car l’emprise de la délinquance et de la drogue inquiète toutes les familles. La pression des manifestants vient ainsi soutenir la population d’un quartier qui subit au quotidien l’impunité d’une bande de plus en plus prégnante.

La bande elle-même s’en trouve déstabilisée, craignant les dénonciations et les actions collectives contre elles. Le noyau dur n’en sera probablement que peu affecté, mais nombreux aussi sont ceux qui, plus jeunes ou cantonnés aux seconds rôles, décideront de se retirer du trafic sous pression de leurs familles.

Le danger de ces réactions populaires vient des dérives racistes qui les accompagnent. L’indignation contre le trafic de drogue sert alors en fait d’exutoire pour des sentiments qu’il faut condamner sans ambages. Au contraire, la résistance des populations résidentes, toutes origines confondues, est le seul antidote qui pourra garantir sur le long terme la vigilance contre le retour des trafics de drogue. En fait certains viennent manifester non pas pour lutter contre la drogue mais pour s’en prendre à des étrangers.

Dénoncer cette dérive est d’autant plus nécessaire que les délinquants visés sont très vraisemblablement au bas de l’échelle de ce trafic. L’actualité judiciaire et policière a largement établi que le haut du pavé est tenu par des trafiquants au profil « nustrale » qui alimentent en stupéfiants, et contrôlent avec violence tous ces points de deal. •

F.A.