À la suite de la large défaite du camp macroniste face au Rassemblement national aux européennes, Emmanuel Macron a pris la décision de dissoudre l’assemblée nationale, laissant peser le risque de la prise de pouvoir de l’extrême droite en France et en répercussion pour la Corse l’abandon du processus d’autonomie et la négation du peuple corse sur sa terre et son droit à la reconnaissance.
Au lendemain de l’annonce de la dissolution, Femu a Corsica dont vous êtes le secrétaire national, a lancé un appel à la convergence des forces nationalistes et au-delà, pourquoi ?
Tout simplement parce que le contexte politique ordonnait d’appeler les forces nationalistes d’abord, puis les forces de progrès, à converger face à la nouvelle donne politique très incertaine et face au score important du rassemblement national dont les dirigeants sont foncièrement opposés à toute évolution pour la Corse, toute reconnaissance pour le peuple corse, toute solution politique et toute autonomie.
Face à cette lame de fond sociétale et la montée des populismes qui touchent l’Europe entière, il nous paraissait important de réaffirmer la voix du peuple corse qui a travaillé pendant des années durant pour qu’émerge enfin un processus de discussion avec l’État et réagir fermement en affirmant un nationalisme de progrès, de construction, humaniste que partagent me semble-t-il les quatre forces nationalistes.
Pour quelles raisons ces discussions n’ont pas abouti ?
Nous avons contacté les différents dirigeants, dont Core in Fronte qui avait fait un appel similaire, Nazione qui n’était pas disponible et le PNC qui n’a pas répondu à l’appel. Nous nous sommes donc rencontrés sur Corti le lundi soir avec Core in Fronte, et leur avons proposé un accord sur des bases assez simples, qu’on a fait connaître également à Nazione et au PNC. C’est à dire, le soutien public des structures envers les trois députés nationalistes sortants Michel Castellani, Jean Félix Acquaviva et Paul André Colombani, l’ouverture sur les suppléances et la proposition de candidature de Romain Colonna sur la première circonscription du Pumonte légitimée par le peuple à 48 % lors du dernier scrutin législatif, donc le nationaliste le plus à même de rassembler et de porter la voix de la Corse à Paris.
Les discussions n’ont pas abouti, Nazione ayant affirmé ne pas être en accord avec la stratégie globale, Core in Fronte du fait du manque d’accord entre toutes les structures et le PNC n’acceptant pas de soutenir publiquement les trois candidats sortants et en affirmant que si Romain Colonna se présentait, ils présenteraient eux aussi un candidat.
Je crois que l’on peut tout de même espérer un rassemblement au second tour, c’est en tout cas notre objectif.
À Femu a Corsica, on l’affirme et on le dit très clairement, au second tour nous appellerons à voter pour le candidat nationaliste qui sortira en tête dans toutes les circonscriptions et au rassemblement des forces nationales pour véritablement envoyer un message clair à Paris.
Quelle est donc la démarche de Femu a Corsica à l’aune de ces élections législatives ?
Notre démarche est très simple, la reconduction de nos députés sortants en Cismonte, qui ont fait un travail extraordinaire dans le groupe LIOT et la volonté de conquérir la première circonscription du Pumonte avec la candidature de Romain Colonna qui s’affirme aujourd’hui comme la voix forte de Femu a Corsica et du nationalisme dans cette circonscription et qui permettra encore une fois d’envoyer un message très clair à la future gouvernance française.
Un objectif clair donc, premièrement, la volonté de préserver l’existant, dans la continuité de ce qui a été fait. Deuxièmement, l’esprit de responsabilité, de par l’appel que nous avons lancé, les propositions que nous avons faites, notre volonté de ne pas présenter de candidat face à Paul André Colombani et de laisser les électeurs et les militants de Femu libres de voter pour les candidats nationalistes dans la deuxième circonscription du Pumonte.
Troisièmement, l’espoir d’envoyer un quatrième député nationaliste afin de faire entendre une voix unitaire et de véritablement réaffirmer le message d’une Corse émancipée qui veut construire la paix et un projet de société pour son peuple.
Comment voyez-vous l’avenir au regard du contexte actuel ?
L’avenir il faut le voir avec plein de rêves et en même temps être véritablement enraciné dans une réalité qui est complexe. Être conscient qu’il y a aujourd’hui une lame de fond dans les sociétés européennes qu’on ne peut pas nier, certes les élections européennes ont peu mobilisé en Corse et on verra que les élections législatives vont probablement laisser apparaître une autre donne, néanmoins il y a une montée des populismes, d’extrême droite en particulier, en Corse et ailleurs et face à cette montée constante à laquelle la Corse n’échappe pas, on se doit de réaffirmer avec force nos fondamentaux, d’un nationalisme de projet, de construction d’un pays, autour de principes, d’humanisme, de valeur de paix, d’intégration, d’égalité, de liberté face aux nationalisme de puissance, qui rejette l’autre, qui fait du populisme extrême.
Et puis s’impliquer à répondre aux nombreuses inquiétudes des Corses qu’elles soient sociales, liées au logement, aux salaires, à l’inflation dont on sait que l’autonomie nous permettra d’avoir accès à la terre plus simplement, notamment les classes moyennes et populaires, mais aussi avec la possibilité de blocage des prix des produits de première nécessité ainsi que de l’essence, et nous permettre la construction d’un véritable modèle social.
Il y a aussi des inquiétudes identitaires qu’on ne peut nier, tout en réaffirmant qu’aujourd’hui la communauté de destin est une notion centrale du nationalisme corse, théorisée d’ailleurs par le FLNC dans les années 80, et qu’évidemment il ne suffit pas d’arriver ici et se revendiquer corse et terminé. Oui, on peut venir d’ailleurs et s’intégrer à la société corse autour de points capitaux, par l’identité, la langue, le chant, la culture, le mode de vie dans les villages, dans les quartiers, et oui, on peut construire un peuple ensemble. Mais aujourd’hui il y a des fondamentaux sur lesquels on ne peut se renier.
Si vous deviez lancer un appel aux Corses ?
Nous sommes à un moment charnière, le processus d’autonomie est en suspens, la solution politique en grand danger, mais si demain vous faites confiance aux candidats Femu a Corsica et aux candidats nationalistes, la voix de la Corse sera portée à Paris.
Dans un contexte très incertain où l’on voit la montée d’un bloc Rassemblement national, d’un bloc de gauche et d’un bloc central on aura peut-être la possibilité de faire émerger une majorité pour l’autonomie de la Corse, c’est l’espoir que nous portons.
J’insiste : il faut voir cette élection comme un moment charnière de l’histoire de la Corse car si l’on regarde les duels qui nous opposent à nos adversaires, on s’aperçoit qu’il y a deux modèles de société qui s’affrontent. Le modèle d’une Corse émancipée, fière de son histoire, de sa culture, de ses racines, qui veut construire un projet de société fort autour d’une autonomie pleine et entière, d’une solution politique et enfin apaiser un conflit de 60 ans avec l’État Français. Et le modèle du statu quo, qui laisse entrevoir un avenir pessimiste, un avenir négatif pour la Corse.
La question est simple, voulons-nous continuer ce processus d’autonomie et ce processus de paix ? Si oui, il faut voter pour les candidats Femu a Corsica, Michel Castellani, Jean Félix Acquaviva et Romain Colonna ainsi que pour les candidats nationalistes de la deuxième circonscription du Pumonte. Vous pourrez leur faire confiance pour porter haut et fort le message de la Corse, celui du fil historique qui est le nôtre porté par les frères Simeoni et tous ces militants qui les ont suivis, le message d’un peuple, en lutte pour sa reconnaissance et pour son existence. •
Pruposti racolti da Florian Riolacci.