Très émouvante projection de Mothership le film de Muriel Cravatte sur les missions de SOS Méditerranée au cinéma le Régent ce lundi 23 septembre, en présence de Sophie Beau, directrice générale et fondatrice de l’association, et avec le soutien d’Arte Mare qui débute son festival du film méditerranéen le 27 septembre prochain à Bastia*.
SOS Méditerranée est une association civile européenne de sauvetage en mer fondée en 2015 par des citoyennes et des citoyens, un réseau qui repose sur quatre associations basées en France, en Allemagne, en Italie et en Suisse avec pour leitmotiv : « Sauver, Protéger, Témoigner ». Des missions purement humanitaires pour faire vivre le droit international en mer, non respecté par les nations d’Europe.
Depuis qu’ils ont pris la mer en 2016, plus de 40.000 personnes lors de 424 opérations de sauvetage ont pu être sauvées d’une noyade certaine et débarquées en lieu sûr, dont 25 % de mineurs. Des bébés, des enfants, des femmes enceintes, souvent d’ailleurs une grossesse issue d’un viol dans les prisons libyennes ou au long de leur périple interminable pour échapper à la guerre et à la misère, de jeunes hommes aussi, hagards, épuisés, épouvantés… Parfois certains, certaines, ont passé de longues semaines dans le désert, sans eau, sans nourriture, ou presque, parcourant des centaines de kilomètres à pied, leurs enfants sur le dos… pour arriver avec l’argent accumulé durant leur vie de travail, à s’acheter auprès de trafiquants protégés par les autorités libyennes, et la bénédiction de l’Union européenne qui se refuse à traiter ce problème humanitaire, un passage sur un rafiot, avant d’être intercepté à nouveau par les garde-côtes libyens… être emprisonnés dans les pires conditions d’hygiène et de sécurité, subir la torture souvent, les viols, les maltraitances de toutes sortes. Et puis recommencer à leur sortie des geôles avec pour seul espoir : l’Europe.
Leur salut ? Croiser en mer l’Ocean Viking, le bateau sauveteur de SOS Méditerranée et ses bénévoles extraordinaires… aidés par des pilotes volontaires qui survolent la mer à bord du Colibri, un avion qui porte bien son nom, pour repérer les embarcations en détresse… chacun fait sa part face à l’immensité de la tâche…
Le film témoigne de toute la dimension humaine de cette mission noble au service de l’humanité. La peur, l’inquiétude dans les regards, les pleurs des enfants, la détresse d’une maman qui a vu son bébé se noyer, avant de voir la joie et les sourires sur les visages lorsque ces naufragés comprennent qu’on leur veut du bien et qu’on ne les ramène pas en Libye.
Puis ces longues semaines obligées en mer, où il faut répondre aux besoins premiers, leur permettre de se soigner, se laver, se nourrir, dormir, offrir une écoute, avant de pouvoir enfin trouver un port sûr et les laisser poursuivre leur long périple – encore – pour se construire une vie digne en Europe. Ce vaste continent de centaines de millions d’habitants où on ne veut pas leur faire une toute petite place…
Alors toutes les petites agitations qui ont pu se faire à l’extérieur du Régent ce 23 septembre pour attirer l’attention des médias et manipuler l’opinion par des discours aussi ridicules qu’abjects et mensongers, ne font que salir la Corse qui ne peut que se grandir à soutenir ce combat de SOS Méditerranée. Et au-delà de la Corse, ils ne font que salir la race humaine et l’indispensable solidarité qui fonde notre nature même d’êtres humains.
Bravo aux passages à celles et ceux, souvent très jeunes, qui ont tenu tête à cette dite « Union des droites » qui ignore tout de ce que sont les combats du peuple corse pour faire siennes les nauséabondes thèses de l’extrême-droite française. Il y a une antinomie totale à prétendre faire vivre une extrême-droite en Corse.
Et puis quelle bouffée d’oxygène que de constater une salle comble au Régent, composée de gens de la société civile ! Il y avait là des élus (à noter la présence notamment du député de la seconde circonscription de Corse du Sud Paul André Colombani, et du maire de Bastia, Pierre Savelli), des nationalistes, notamment de Femu a Corsica, des écologistes, Eculugìa Sulidaria ou i Verdi Corsi, des gens de gauche comme le Parti communiste, des artistes comme Jean Claude Acquaviva, mais aussi de nombreux, très nombreux associatifs, humanitaires bien sûr comme la Ligue des Droits de l’Homme, A Fratellanza, et bien d’autres, mais aussi de la défense de l’environnement, comme U Levante ou Tavignanu Vivu, ou encore du collectif anti-mafia, etc., venu se mobiliser en première réponse à l’annulation précipitée du débat au Parc Galea. On en oublie trop à vouloir les citer, pardon. Mais voilà qui rassure sur notre capacité de réaction démocratique !
Encore deux autres chiffres pour tous ceux qui hurlent « pas de ça chez nous ».
Sur ces plus de 40.000 personnes sauvées d’une mort certaine par SOS Méditerranée, seulement 234 ont été débarquées en France (pays de 68 millions d’habitants), et encore, bon nombre ont poursuivis leur route vers l’Angleterre, l’Allemagne ou l’Italie… paradoxalement plus accueillants !
La France n’est plus le pays des droits de l’Homme.
SOS Méditerranée ne peut compter que sur les dons d’entreprises et de particuliers, parfois de collectivités rassemblées dans une plateforme de soutiens. Une seule journée en mer pour faire fonctionner l’Ocean Viking coûte 24.000 €, navire qui reste une planche de salut mais inadapté, reposant sur l’ingéniosité, le courage, la volonté et la solidarité humaine de ses magnifiques personnels de bord.
Soutenez cette cause humaine. La seule qui vaille, la cause de la vie. •
Fabiana Giovannini.
* Du 27 septembre au 12 octobre, magnifique festival qui se déroule chaque année à Bastia. Consultez la programmation 2024 sur www.arte-mare.corsica
Contact et dons : https://sosmediterranee.fr
Adhésion à l’antenne corse : a.bernard@sosmediterranee.org