Présidentielles

Des primaires pour rien

La droite a fait son show médiatique, saturant nos écrans télés pendant plusieurs mois avant les fêtes.
La gauche embraye aussitôt et sature à son tour l’espace médiatique. Cet exercice de la primaire est-il vraiment productif au plan politique ? En tous les cas il donne une confirmation de taille : le débat sur les autonomies régionales demeure délibérément absent des thèmes abordés par les candidats ou les journalistes.

Cet embouteillage médiatique pose le problème des autres candidats potentiels, ceux qui sont «en dehors des appareils ». Comment faire émerger une idée neuve quand le consensus conformiste inonde l’espace médiatique ?

Imaginons par exemple qu’il y ait en 2017 l’équivalent de René Dumont, celui qui fit surgir de nulle part, lors de la présidentielle de 1973, un verre d’eau à la main, l’idée neuve de l’écologie dans le débat politique. Il se heurterait au conformisme des idées, qui est le même quarante ans après, mais, il buterait aussi en plus sur un espace médiatique totalement obstrué, et des conditions de la campagne officielle tellement restrictives désormais, que son message en aurait été totalement inaudible.

De Sylvia Pinel à Jean Frédéric Poisson, la primaire propulse sur le devant de la scène toute une série de personnages sans relief et sans proposition, et elle fait barrage à ceux qui, comme Christian Troadec, veulent porter une démarche fondamentale pour la société, pour en finir avec la France jacobine et pour porter le message des autonomies régionales. Les partis officiels sont jacobins, plus qu’ils ne l’ont jamais été. Ceux qui s’en disputent le leadership via la primaire vivent tous à l’intérieur du périphérique, et ils n’ont de chance de percer qu’à condition de respecter un « code jacobin » plus ancré que jamais dans les esprits de « l’intelligentsia parisienne », politiques et journalistes confondus. Et leurs faux débats d’idées, qui dissimulent en fait des rivalités politiciennes, inondent l’espace médiatique et étouffent les voix qui s’élèvent en dehors de ce cadre formaté par et pour les « grands partis ».

Pourtant les arguments objectifs existent pour avancer qu’il y a en France un débat à ouvrir sur la décentralisation. Jamais un mouvement de cette tendance n’avait jamais gagné une présidence d’Exécutif comme nous l’avons fait en Corse. Jamais le mouvement alsacien n’avait obtenu 12% des voix, cinq à dix fois plus qu’auparavant, à une élection régionale. Jamais les Basques n’avaient été si loin dans la définition de leur projet territorial spécifique, et progressé jusqu’à obtenir deux conseillers départementaux. Jamais les catalans du nord n’avaient été aussi nombreux derrière leur «pais català» nié par le découpage régional de Manuel Valls. Et les Bretons se sont hissé à des scores nouveaux pour eux, approchant les 10% au total, mais avec des niveaux à 20% dans le Finistère. Au large du périphérique, les choses bougent beaucoup, mais à l’intérieur du périphérique l’establishment est plus autiste que jamais.

Pour bousculer cet autisme, il nous reste la mobilisation sur le terrain. Celle des maires, ils sont déjà des dizaines qui soutiennent par leur parrainage le candidat régionaliste Christian Troadec, celle des militants et élus qui continuent à lutter pour leur territoire en aspirant à l’émergence d’une nouvelle organisation territoriale en France avec de véritables autonomies.

La Corse est intéressée au premier chef par cette bataille politique.

Par François Alfonsi