Le conflit entre Palestiniens et Israéliens vient de dégénérer à nouveau, alors que la poigne de fer de l’occupation israélienne, fortement appuyée par la diplomatie de Donald Trump, avait donné l’impression, l’espace de quelques années, que la colossale supériorité du rapport de forces militaire assurait définitivement la tranquillité d’Israël à l’abri de son « dôme de fer ». Cette certitude a volé en éclats avec la récente offensive du Hamas.
Les brigades militaires du Hamas contre Tsahal, l’armée de l’État d’Israël, c’est un peu comme le « Football Club du village » opposé au Réal de Madrid. En réussissant à marquer le premier but de la partie, en surpassant la défense du « dôme de fer » par un déluge de roquettes, le petit poucet de Gaza est monté sur un nuage dont aucune riposte, aussi forte soit-elle, ne le fera plus descendre. Politiquement, il a marqué des points incontestables, et même s’il est écrasé militairement, il s’est imposé psychologiquement.
Son offensive a en effet montré que la supériorité militaire israélienne, aussi forte soit-elle, ne peut effacer la volonté du peuple palestinien d’être respecté, pour que soit enfin pris en compte ses intérêts nationaux de peuple légitime, reconnu par la communauté internationale.
Le Hamas a évité les pièges qui s’ouvraient à lui dans l’Histoire récente du Moyen Orient. Il s’est tenu totalement à l’écart de Daesch, faisant tomber à plat l’étiquette de « terroriste » que les médias pro-israéliens, et Benyamin Netanyahu, lui collent régulièrement. Et, ce faisant, il a aussi permis que s’exprime, au sein d’Israël même, la voix politique de la partie du peuple palestinien qui est restée de citoyenneté israélienne au moment de la création de l’État d’Israël, à la sortie de la seconde guerre mondiale.
Cette population arabe d’Israël n’en peut plus de la montée en puissance continue de l’extrême-droite dans l’État juif, dans ses deux faces de l’extrémisme colonial et de l’extrémisme religieux. Car l’évolution de la vie politique israélienne donne toujours plus de poids à ces forces extrêmes qui s’opposent à tout espoir pour la concrétisation des accords d’Oslo rédigés sous la responsabilité d’Ytzhak Rabin, avant qu’il ne soit assassiné par un fanatique issu de cette même extrême droite sioniste, religieuse et coloniale.
Si l’on y regarde de plus près, on est fondé à dire que ce conflit historique est un des rares où le terrorisme a eu un rôle essentiel, réussissant à empêcher la poursuite du processus de paix alors enclenché. Le terroriste sioniste qui, en novembre 1995, a tiré sur, et tué, Ytzhak Rabin, le grand ordonnateur des accords d’Oslo, a effectivement atteint son but.
Ce qui est resté de l’œuvre pacificatrice de Rabin a finalement été le placement sous autorité palestinienne, un an avant qu’il ne soit assassiné, de la bande de Gaza et d’une partie de la Cisjordanie, ce qui devait préfigurer l’État palestinien à créer. En 2005, Ariel Sharon a posé le seul acte politique consécutif aux accords d’Oslo, à savoir l’évacuation, y compris par la force, des 21 colonies de peuplement mises en place par les plus extrémistes de l’extrême-droite israélienne dans la bande de Gaza. Preuve a été alors apportée qu’Israël était en mesure d’accepter la création future d’un l’État palestinien à côté de l’État israélien, en lui donnant un territoire homogène, y compris via l’expulsion de colons. Mais, en CisJordanie, rien n’a été réglé, bien au contraire.
Depuis, Israël et ses gouvernements, avec l’aide et les encouragements de Donald Trump pendant son mandat à la tête des USA, ont tout fait pour briser l’espoir d’une paix durable sur la base simple et incontournable définie par l’ONU : deux peuples, deux États. Une fois cette « égalité de dignité » établie et consacrée, le dialogue pourrait s’établir et la Paix s’installer. Deux préalables sont nécessaires : l’arrêt immédiat des colonisations de peuplement que Netanyahu, obnubilé par sa réélection, multiplie pour s’assurer l’appui des plus extrémistes en Israël, et le démantèlement d’un nombre suffisant de colonies juives pour permettre la constitution du territoire palestinien en Cisjordanie, en cohérence avec sa future capitale, Jérusalem-Est.
Il a été fait beaucoup de mal au processus de paix initié par Ytzhak Rabin par les dirigeants israéliens qui se sont succédé après lui, et cela a été beaucoup trop toléré par la communauté internationale. Aujourd’hui celle-ci mesure l’ampleur du désastre auquel cela peut conduire, à Gaza, à Jérusalem, en Cisjordanie et, désormais aussi, dans les faubourgs de Tel Aviv.
Les USA, premiers et indispensables alliés d’Israël, avec l’Europe et l’ONU, sont sommés de faire cesser les représailles israéliennes avant qu’un désastre humain ne submerge tout. Et ils devront imposer, coûte que coûte, la création d’un État palestinien viable, y compris à Jérusalem et en Cisjordanie, le plus rapidement possible. Sinon, pour le plus grand malheur des Palestiniens comme des Israéliens, ce sera un chaos permanent. •