Législatives

Un premier tour effarant. Un second tour pour réagir !

Par François Alfonsi

 

Le vent de folie qui a soufflé sur la Corse comme sur le reste de la France met en danger les députés sortants du mouvement nationaliste. Nous devrons redoubler nos efforts pour les faire élire. Il n’a pas permis à Romain Colonna d’accéder au second tour de scrutin à Aiacciu. Notre soutien ira naturellement à Laurent Marcangeli qui a été loyal envers la Corse durant les dernières années. Entre les deux tours, il faut mener une mobilisation générale pour espérer l’emporter !

 

 

L’un est retraité, militant du Rassemblement national dans les Bouches du Rhône, l’autre est parachutée dans une circonscription rurale couvrant l’intérieur de la Corse, la troisième convient sur les plateaux télé qu’elle ne connaît rien d’Aiacciu et de la circonscription qui en dépend : tous trois ont franchi allègrement 25 % des voix, et, à Aiacciu, la « candidate anonyme » du RN est même sortie en tête devant Laurent Marcangeli ! Quant à François Filoni, qui, lui, n’est pas un inconnu, loin de là, puisqu’on l’a déjà connu communiste, chevènementiste, républicain version mairie d’Aiacciu et désormais version Rassemblement national, il sort en tête dans la deuxième circonscription de Corse du Sud qui va d’Aiacciu à Portivechju, avec 35,1 % des voix. À Aiacciu, il frôle la majorité absolue (47,4 %) dans la moitié de la ville qui vote dans cette circonscription.

Ces scores sont démesurés. Ils ne disent rien du débat démocratique que la Corse doit avoir pour son autonomie et son avenir, débat que les délais délibérément raccourcis de l’élection ne permettaient pas de mettre au centre de la campagne.

En décidant d’une dissolution « à chaud », alors que les esprits étaient encore enflammés par le score obtenu par le RN à l’élection européenne du mois dernier, Emmanuel Macron a pris le risque délibéré de la tournure que les choses ont prises. Ne laisser aucun espace de temps pour le débat ne pouvait que consolider les postures et les caricatures. Dès lors, l’effet d’entraînement du résultat des européennes, et la dynamique de victoire, ont joué à plein en faveur du Rassemblement National, au point de faire élire au premier tour dans certaines régions du continent des candidats et candidates potiches qui ignorent tout du territoire dont ils seront les élus, et qui sont même ignorants de la chose politique tout court.

 

Dans cette future Assemblée nationale, probablement ingouvernable, quelles seront les options politiques possibles ?

Première option, le Rassemblement national trouve des ralliés comme il a trouvé François-Xavier Ceccoli dans la circonscription de Corti-Balagna, et il réussit à former une majorité absolue. La politique française et les programmes de réformes, y compris celle concernant la Corse à travers le processus de Beauvau, entreront alors en hibernation pour au moins encore un an, délai minimum avant que puisse être prononcée une nouvelle dissolution par le président de la République.

Deuxième option, le Rassemblement national n’arrive pas à réunir une majorité absolue, pas plus que les deux autres blocs politiques, le Nouveau Front populaire comme la force amoindrie qui sera encore présente à l’Assemblée pour soutenir Emmanuel Macron. Il faudra alors bien expédier les affaires courantes quand même, au moins durant un an, avec un gouvernement technique qui se cantonnera au strict minimum.

Mais ce qui se jouera à l’Assemblée nationale sera alors presque anecdotique. L’actualité politique se construira probablement davantage dans la rue. Déjà les forces de gauche mobilisent entre les deux tours et organisent des rassemblements spectaculaires. Puis, quand la rue sera fatiguée, il est à craindre l’intervention de groupes contestataires plus radicaux, et, en retour, de « groupes d’autodéfense » au moins aussi dangereux. La porosité de la police et des forces de l’ordre en général avec l’extrême-droite, et aussi de plusieurs polices municipales dans certaines communes déjà prises en main par le RN, va probablement conduire à des dérapages dont on ne sait jusqu’où ils iront.

Dans ce climat délétère le plus important pour nous est de continuer à être représentés au Palais Bourbon pour y manifester la permanence de la revendication corse pour l’autonomie. Celle-ci a fait l’objet d’un accord formalisé entre les autorités légitimes du gouvernement français et les élus de la Corse. Devant l’Assemblée de Corse, Emmanuel Macron s’est engagé à proposer au Parlement une réforme constitutionnelle. Cet accord reste un engagement officiel de l’État, même s’il faudra attendre des jours meilleurs pour engager sa mise en œuvre. Pour y arriver, il faut pouvoir compter à nouveau sur des députés corses prêts à soutenir la reprise du processus de Beauvau au sein de la future Assemblée nationale. •