Arritti souhaitait que ces élections législatives soient l’occasion d’envoyer un « message fort » au nouveau pouvoir issu de la victoire d’Emmanuel Macron à l’élection présidentielle. C’est ce qu’ont fait les électeurs corses : 34.000 voix nationalistes, 30% des suffrages exprimés dès le premier tour. Trois candidats sur quatre sont qualifiés pour le second tour, le quatrième n’a été éliminé que de justesse, deux –Jean Félix Acquaviva et Michel Castellani- sont donnés largement favoris pour la victoire du second tour et le troisième –Paul André Colombani- peut lui aussi l’emporter.
Ce bilan extrêmement satisfaisant a de quoi réjouir la majorité territoriale et son leader Gilles Simeoni. Les électeurs ont approuvé la gouvernance nouvelle imprimée à la Collectivité Territoriale de Corse et manifesté leur confiance à l’Exécutif en place. Ils adhèrent de plus en plus nombreux au projet d’une Corse autonome, capable de se gérer par elle-même, et construisant son avenir dans l’espace européen et méditerranéen.
Ces résultats des législatives sont très prometteurs pour les territoriales de décembre 2017. Il importe que le mouvement nationaliste continue d’ici là dans la même voie, celle du rassemblement des Corses autour d’un projet fédérateur.
Cet objectif est particulièrement celui de Femu a Corsica. Avec des députés au Palais Bourbon, cette formation, la principale composante de la majorité actuelle, va encore accroître son influence, et donc ses responsabilités dans le processus en cours qui doit mener le peuple corse à son émancipation.
Comment réagira le nouveau pouvoir face à ce « message fort » venu de Corse ? Gilles Simeoni s’en inquiétait lors du dernier meeting de campagne tenu pour les deux candidats « sudistes » : Macron affiche sa volonté de « novation » pour tous les sujets ou presque de politique intérieure ou extérieure. Mais sur la Corse, rien, nada, le vide absolu !
A n’en pas douter l’arrivée de députés nationalistes au Palais Bourbon va provoquer une situation nouvelle. Un peu comme cela a été le cas en décembre 2015, il faut s’attendre à ce que l’establishment politique parisien mette un certain temps avant de réaliser qu’il se passe quelque chose de nouveau en Corse. Toute à la « percée » du Front National aux élections régionales, la presse avait alors complétement « zappé » la victoire historique des nationalistes à l’Assemblée de Corse. Seul le discours en langue corse de Jean Guy Talamoni avait fini par les faire sursauter !
Aujourd’hui la sphère médiatique est obnubilée par la « déferlante Macron ». Il lui faudra attendre sans doute quelque temps avant de réaliser que la Corse vient de franchir une nouvelle étape, qu’elle n’est pas l’objet d’un éphémère « feu de paille » qui fait « flamber » momentanément les scores du mouvement nationaliste, mais qu’elle est bel et bien l’objet d’un mouvement de fond, d’un véritable basculement de la société vers un autre avenir.
Comment le pouvoir central concentré désormais entre les mains d’Emmanuel Macron réagira-t-il à cette nouvelle donne démocratique ? Il n’aura pas l’excuse d’une majorité trop étroite pour réformer la constitution si on en croit les projections des instituts de sondage qui prévoient une très large majorité absolue de députés qui soutiendront sa politique. Mais entendra-t-il pour autant le « message fort » qu’il vient de recevoir ?
A vrai dire, on peut sérieusement en douter. Une seule chose est certaine : ce n’est qu’en renforçant et en consolidant l’Exécutif actuel de la Collectivité Territoriale de Corse en vue d’une nouvelle et éclatante victoire en décembre prochain que l’on pourra parvenir à enclencher une véritable négociation institutionnelle pour la Corse et arriver à un statut d’autonomie interne.