Encore une belle leçon d’économie et de politique ! Max Simeoni, le visionnaire, écrivait ces mots le 24 décembre 2008. Avec le recul de ces 16 ans passés, on vous laisse juge de la pertinence…
Crise aigüe et crise chronique
par Max Simeoni
La crise actuelle est celle du modèle économique occidental élevé, surtout depuis l’effacement du modèle communiste soviétique, à la hauteur d’un dogme infaillible. Ses crises antérieures, surmontées assez vite, avaient donné l’impression qu’il en ressortirait finalement renforcé. On l’a cru pourvoyeur d’une croissance sans fin apte à donner le bonheur à tout le genre humain. Cette idée est fondée sur la croyance que la science au service de l’innovation technique permet à l’économie le miracle. Le doute vient de surgir, relatif pour certains enclin à penser qu’avec quelques corrections elle va poursuivre sa quête, plus profond pour d’autres qui disent qu’on est peut-être en train de « changer de monde » sans pouvoir dire lequel il pourrait être, la prédiction de l’avenir au-delà du court terme échappe même à l’homme. Il est incapable même d’imaginer les conséquences de ses propres inventions. Au XIXe siècle, il a cru aux hauts fourneaux, à l’acier et au charbon. Puis aux chaînes de montage. Des problèmes sociaux ? Des journées de 16h de travail, femmes et enfants compris, broutilles momentanées, le progrès matériel améliorera le sort de chacun. Révoltes, révolutions, marxisme pour donner les usines aux masses laborieuses, à tous ceux dont le travail ingrat crée les plus-values. Les usines aux travailleurs, la terre aux paysans, la propriété collective. Échec. Retour à la libre entreprise, relookée par le savoir, la compétence, les clefs du progrès. « Enrichissez-vous que diable ! »Croissance, compétitivité, offre de demande, liberté pour l’esprit d’entreprise… les peuples, les régimes, les continents en retard parce qu’ils ne l’ont pas encore compris… et colonisation pour un « progrès » garanti…
Révoltes, luttes de libération, indépendance. « Vous êtes libres ? » Alors échangeons, nous vous donnons la « coopération » pour vous aider. Mais ça coince, la domination économique engendre des troubles. Des organisations internationales cherchent à assurer la paix pour des échanges profitables et à réguler. Après la guerre de 14, la Société des Nations n’a pu empêcher la 2e guerre mondiale et l’ONU de nos jours patauge dans les innombrables conflits « locaux », le charbon hier, le pétrole aujourd’hui…
L’espèce humaine prolifère malgré tout par milliards. Des marchés à conquérir, des bouches à nourrir. Elle mondialise, elle globalise. Vendre et consommer plus, la croissance et le bonheur. Les premiers aujourd’hui commencent à peiner pour conserver leur avance : chômage, coût social des « acquis », 3e et 4e âges pléthoriques… On délocalise pour rester compétitifs. Dur, dur. L’État devient l’assistante sociale de tous les attardés de la croissance inégale. Les taxes « provisoires » plutôt que les impôts directs. L’État devient aussi usurier pris en tenaille entre les « actifs » de l’économie et les traînes savates. Le capital financier s’est mondialisé le premier à la vitesse du numérique des places financières. Il a accompagné les délocalisations pour tirer les actions vers le haut et prendre vite les bénéfices pour des placements plus juteux que les actionnaires exigent !
L’ère des « fonds » spéculatifs sans limite. Le crédit lui-même, rendu objet de spéculation. Des « fonds » pour prêter et pour revendre les dettes par morceaux. Répartir, mutualiser le risque, la pompe à faire des bulles et tout le monde surpris de les voir péter. La crise énorme, d’un seul coup, qui ne ressemble de mémoire d’économistes, à aucune autre. On « change de monde » ? Sûr ! Mais sans savoir vers lequel on va. Crise financière prélude à crise économique. Les capitaines écopent pour ne pas couler la barque et cherchent à boucher les trous. Il faut réamorcer coûte que coûte le crédit, la confiance dans le crédit pour redémarrer. L’embarcation modèle va-t-elle disparaître ? On a du mal à s’y faire. Rien d’autre que des mesures de sauvetage en espérant des jours meilleurs que déjà un problème inédit contredit mot pour mot le modèle triomphant mis mal en point du soir au lendemain. Plus question « d’aller chercher la croissance avec les dents ». Ce problème inédit a d’abord été une exagération « d’écolos » illuminés et de spécialistes de la couche d’ozone vu du pôle Nord. Élargie ou pulsatile ? Des « illuminés » qui prônaient la biodiversité et voulaient protéger des papillons, des hannetons, des oiseaux… Des experts prophètes de catastrophes climatiques et autres apocalypses. En peu de temps la banquise fond à vue d’œil, les ours polaires en perdent le Nord, les forêts d’Amazonie reculent sous l’œil perçant des satellites. Les OGM devraient sauver le monde de la faim (couplet déjà servi avec les pesticides pour des rendements agricoles prometteurs). Le tout à l’avenant !
La certitude que l’homme peut dominer la nature, refaire le monde à sa guise, commence à avoir un début de réponse de la part de celle-ci. Elle aura le dernier mot. Ou il plie, ou il sera piétiné.
Et la Corse ? Et les Corses qui restent ? Ils pèsent si peu dans l’équation. Quantité négligeable. L’État est préoccupé ailleurs. Hors sujet. Ils auront leur part des mesures sociales prévues pour l’ensemble hexagonal. Ils garderont le système clientéliste claniste rassurant à peu de frais. Ils voteront des élus dépourvus de moyens. Ils berceront leurs espoirs au rythme des alternances parisiennes. Râleurs et fatalistes, ils joueront au tiercé et au loto, ils se gaveront des joutes des leaders, des « spectacles » télévisés « starisés », ils joueront aussi au politologue en commentant « les infos » sur les écrans, et sans se l’avouer ils s’en remettront au système.
Et les « nationaux » qui font foi de changer le système par « la lutte » et/ou la cogestion ? Qui doute leur pose la question ! Ils vous diront en aparté certains rarement avec une mâle assurance, le plus souvent d’autres feront le procès des « frères » pour expliquer leur impuissance à « refonder » pour arracher les moyens de la maîtrise du destin du peuple corse, ce qui va de soi, n’est-ce pas ? •