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La coofficialité, un espoir pour la langue ? Ou bien plus ?

Max Simeoni
Max Simeoni
A lingua, cimentu di u pòpulu… Massimu Simeoni n’hè sempre statu cunvintu, era un difensore accanitu di a cuufficialità. St’artìculu hè statu scrittu u 30 di maghju 2013, pocu tempu dopu à u votu di l’Assemblea di Corsica à favore di a cuufficialità pè a lingua corsa. Sunniemu incù ellu…

 

La coofficialité, un espoir pour la langue ? Ou bien plus ?

par Max Simeoni

 

 

La coofficialité votée, l’espoir de sauver la langue devient possible même si tout reste à faire. La majorité à la CTC devra rester unie et déterminée pour convaincre, plutôt pour faire céder cet Etat français qui considère que ce serait un reniement de sa République.

 

Il ne lui manque pas d’armes institutionnelles (les deux parlements, leurs navettes, les amendements stérilisants, les conseils d’État et Constitutionnel, la maîtrise du calendrier…). Il est disposé à éluder ce genre de problème devant faire face à la « crise » de la mondialisation et d’une Constitution européenne qui piétine. Cela peut durer des mois, des années et être renvoyé élections après élections… Une sorte de processus Matignon étiré en longueur et tranché en rondelles.

Les délais ne seront raisonnables que si la pression des conseillers CTC reste forte et capable de relancer chaque fois que de besoin et donc pour cela, qu’elle sache trouver l’appui des insulaires. Je dirais plus volontiers, du Peuple Corse « d’origine et d’adoption ».

La coofficialité est donc bien le minimum vital préalable pour redonner sa place à cette langue vouée à une mort lente et certaine par le système des républicains jacobins. Les deux langues doivent être à égalité de droit pour sortir de ce système et commencer à traiter les blessures du monolinguisme abusif.

Le but est d’arriver à ce que d’ici quelques décades, la langue soit transmise d’une génération à l’autre naturellement, c’est-à-dire que les mères corses de demain parlent corse à leurs bébés pour qu’elle redevienne une « langue maternelle ».

Seule la coofficialité permet de dégager tous les moyens nécessaires à l’enseignement et la formation dans toute la vie sociale. Rien, c’est évident, ne pourra se faire sans volonté et enthousiasme du plus grand nombre, les politiques, les associatifs, chaque citoyen conscient de sa propre responsabilité dans l’œuvre commune de réparer une injustice pour le respect des droits universels dont langue et culture sont un pilier. Il ne peut y avoir de justice ni d’humanisme autrement.

Il conviendra de veiller soigneusement que cette démarche noble ne soit entachée d’iniquité. La parité des droits n’est pas la guerre. C’est la paix et un enrichissement des valeurs de la société. Ce ne peut pas être de la discrimination ou porter un préjudice à quiconque sauf à ceux qui tirent profit d’une situation injuste. Elle demandera des étapes et des mesures pour protéger le profil des carrières. Elle est d’abord le respect de chacun et dans le monde de demain, de plus en plus multipolaire aux échanges démultipliés, elle est plus qu’un atout, elle est une nécessité.

 

Parité équivaut à œuvre possible de justice, d’efficacité et de modernité et, comme toute lutte contre l’injustice qui perdure, elle demande des efforts en commun.

Et pourrait-on dire que ce vote pour la coofficialité obtenue à une majorité des 2/3 et sans aucun vote contre, serait porteur d’un espoir bien plus grand, celui d’une communauté qui retrouve le sens historique de la solidarité, qui cesse elle-même d’errer, de se perdre ?

N’est-ce pas contradictoire de ma part de souligner d’une part tous les obstacles à surmonter pour que la coofficialité soit obtenue par la révision de la Constitution, arrachée sans doute, et pour qu’elle devienne le cadre concret de sauvetage de la langue et, d’autre part de vous inviter à lever le nez avec moi pour humer un vent d’espoir plus ample, celui du sauvetage d’un Peuple nié et naufragé ?

Non si on pose comme principe « morta a lingua, mortu u pòpulu ». J’ai ressenti cette chaleur d’une vie renaissante avec un peu de retard. J’avais assisté à la télé aux applaudissements longs des élus debout, plus grave que souriants, j’avais vu les embrassades qu’ils se distribuaient dans l’émotion du moment. Mais je n’ai imaginé le germe d’un espoir plus riche, plus fécond que quand un élu non nationaliste m’a confié en tête à tête combien ils avaient été émus à l’amorce du résultat de leur vote. En portant la main sur le cœur : « m’hà fattu qualcosa… avà pò sì… ancu untale m’hà basgiatu… un era mai accaduta… »

J’ai compris à ce moment que « notre famille » corse était peut-être en train de se retrouver. Avec le vote, elle avait repris quelques lueurs de lucidité, quelques onces de courage, mais oh divine surprise, son cœur commençait à scander quelques battements à l’unisson dans l’amorce partagé de la Corse en toute confiance.

Une hirondelle ? Peut-être le printemps ?…

 

Je rêve, rêve non fugace je l’espère, où chacun garde sa sensibilité politique ou philosophique mais consolide le socle commun de la langue et du Peuple Corse, où chacun peut envisager sa carrière politique en acceptant les tenants et les aboutissants d’une vraie démocratie. Je rêve de ne plus faire de cauchemars de fin du monde et de rebellions mais de faire des rêves de fraternité, d’espoir et de joie de vivre, tout cela mérité par l’effort en commun. •