Dialogue avec l’État

Les lignes rouges

Max Simeoni
par Max Simeoni
Entre les « deux lignes rouges », l’État est prêt à discuter d’un statut d’autonomie pour la Corse. Ces lignes rouges quelles sont-elles ?

 

L’île doit rester dans la République française. Pour un autonomiste réaliste cela est une évidence géopolitique de sécurité pour la France quel que soit son régime, royal, impérial, républicain ou autre. Elle fera en conséquence tout pour ne pas y être exposée, pour l’éviter, notamment une dérive indépendantiste.

Ce risque concerne plus ou moins tous les pays riverains méditerranéens de l’Europe du Sud.

Cet impératif de sécurité était dévolu à la France pour qui, lors de son Empire colonial, les voies maritimes étaient essentielles. Ses navires devaient passer en toute tranquillité par Gibraltar et le canal de Suez pour les différentes parties de son Empire au-delà des océans Atlantique et Pacifique. Rappelons que le thème de l’indépendantisme a été avancé pour l’île au moment du « rideau de fer » quand les États d’Europe et tout l’Occident s’opposait au pays de l’Est sous la férule stalinienne ! Pour cette initiative d’une partie du mouvement nationaliste cela relève du rêve et non d’une « réal politique ». Certains nationalistes font « couper-coller » de la Lutte de libération nationale (LLN) ! FLNA devient FLNC, petit livre rouge de Mao Zedong de 1964 à son image en miroir en petit livre vert des indépendantistes corses.

L’État républicain n’a aucune difficulté à surveiller cette minorité nationaliste, à l’infiltrer, à la manipuler, à la diviser… Il a l’expérience récente de Diên Biên Phu, de l’OAS, de tous les pays d’Afrique se décolonisant où se déclarant indépendants unilatéralement. Ses services de polices politiques ont par métier et expérience une activité plus pertinente alors que les clandestins insulaires sont sans expérience. L’Historique et l’Habituel s’affrontent et s’étripent. Puis les survivants suspendront toutes menées clandestines !

La survenue d’attentats à la boîte d’allumettes ces derniers jours ne change rien pour l’instant mais c’est peut-être le signe d’une colère des plus jeunes qui sont mal à l’aise et déçus par les stratégies à plus long terme. Sont-ils conseillés par des politiques plus âgés ?

 

La deuxième ligne rouge est un refus d’un statut de résident pour les autochtones ce qui en fait pourrait fermer la porte à une reconnaissance de l’existence d’un peuple corse. L’État n’accepterait pas de légaliser ce lien puissant et affectif qu’un Corse a avec la terre de ses aïeux. C’est le scénario du Schéma d’aménagement de la Corse de l’Hudson Institute dévoilé par l’ARC en 1974 mais qui avait été voté en Conseil des ministres et que toute la Corse avait honnis !

Il bat son plein avec le principe du Tourisme moteur du développement économique !

Les chiffres officiels l’attestent. Ils ont été publiés dans Arritti à plusieurs reprises.

Plus de 97 % de tout ce que nous consommons, aliments, constructions, vêtements…, sont importés et jouissent d’une DSP.

En contraste, les investissements faits sur l’île représentent 6 à 7 %. Comme ceux des régions les plus touristiques de l’Hexagone et 20 % du PIB est dû au tourisme. Ce chiffre en regard de celui des autres régions touristiques est énorme, sans rapport avec ces dernières.

Cela s’explique par l’absence d’une structure économique capable de produire et d’échanger.

Un marché donc captif exploité pour le développement touristique de type colonial. Qui peut donner une autre explication ?

Certes cette colonisation s’est faite par assimilation. Les autochtones insulaires ont servi l’Empire républicain pour le maintenir. Ils étaient fiers en première ligne d’amener les valeurs universelles d’une République puissante civilisatrice, fiers d’être les colons du progrès.

Ils étaient valorisés. Ils étaient convaincus que leur Île était un beau rocher dans la mer mais totalement stérile.

Le réservoir vidé par l’exode et les saignées de guerre, ils se trouvent vieillissant dans leurs villages avec de maigres pensions militaires ou administratives.

De nos jours, la Corse est une des plus pauvres des régions de France. Elle compte 60.000 précaires et autant en train de le devenir.

C’est une des toutes dernières colonies.

Elle enrichit les plateformes productives du continent et la grande distribution.

L’université de Corti à son mot à dire, s’il plaît à Dieu !

De toutes façons, l’effort à faire est surtout pédagogique pour expliquer et contrer cette forme de colonisation. Le tourisme c’est évident, mais maîtrisé au profit aussi d’un peuple sur sa terre. •