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Natios les travaux d’Hercule ?

Max Simeoni
Max Simeoni
Il était notre aîné… l’un, sinon le, pionnier qui a initié la renaissance d’une conscience nationale et la voie de l’autonomie pour écrire l’histoire du nationalisme contemporain. Il n’a cessé tout au long de sa vie militante de tracer le chemin, en appelant amicalement ses frères de lutte « les natios » pour tenter de les convaincre à ses analyses… Voici l’un de ses éditos, écrit en février 2017, deux ans après la prise de responsabilité, et quelques mois avant une nouvelle victoire électorale, cette fois à la majorité absolue.

 

 

Natios les travaux d’Hercule ? Tableau et perspectives

par Max Simeoni

 

 

Le tableau est dessiné depuis longtemps, encore faut-il ne négliger aucune de ses composantes, celles d’un Peuple avec sa terre et sa langue. Les natios sont rassurés dans la mesure où plus personne ne conteste ouvertement leur affirmation.

La contestation n’en existe pas moins. Elle est camouflée ou proportionnée à la perception du danger de disparition qu’ils agitent.

Il y a ceux de bonne foi, qui pensent que la disparition du Peuple corse est pour plus tard et qu’on aura toujours le temps de réagir, que la Corse a toujours fabriqué des Corses et cela continuera… Ou qui y voit une évolution naturelle et non une rupture et donc s’en accommoder… Ou fatalistes accepter et puis on verra…

Il y a ceux qui ne sont pas favorables et qui sapent avec des arguments indirects par calculs ou par intérêts. Certains font la part du feu, ils demandent l’inscription de la Corse dans la Constitution pour rendre possible des mesures de circonstances, sans la reconnaissance de l’existence du Peuple corse ? Sans une coofficialité légalisée ni statut de résident ou de pouvoir fiscal réel pour un développement durable ? Ils comptent sur le pouvoir central pour brider ces mesures, en rester à une autonomie de gestion et éviter la reconnaissance juridique du Peuple corse et de ses droits.

 

Il y a ceux qui sont réticents par méconnaissance, ceux qui sont hostiles par idéologie, par intérêt ou sans foi ni loi. Le renoncement à la violence clandestine du FLNC ne leur facilite pas le jeu.

Quelques-uns laissent croire qu’on peut les persuader mais ils veillent à ce que les mesures prises restent insuffisantes : pas de coofficialité pour la langue qui permettrait une politique sur le long terme de sauvetage et de promotion, en rester au facultatif dans l’enseignement ou la vie sociale, seule obligation le français pour s’intégrer dans l’égalitarisme républicain et… disparaître.

Pas de statut de résident car il est un début de reconnaissance du lien de l’homme avec la terre, une première haie contre sa marchandisation et la spéculation dévoreuse de terrains agricoles, de sites, et pourvoyeuse de délinquance en tout genre (cols blancs, politique mafiosante, et sociétale), un pouvoir fiscal limité, contrôlé par Paris afin d’entretenir la dépendance des élus courtisans et leur donner les moyens du clientélisme, en fait entretenir l’illusion de leur utilité ou celle d’avancer à petits pas la sébile en mains. Il maintiendra le vertige du vide sans le soutien de Paris, chì fà ? chi ci si pò fà ?…

 

Si l’analyse des natios est vraie, quand ils disent que la France n’a jamais eu besoin de développer la Corse, qu’elle ne l’a utilisée que comme un réservoir d’hommes qu’elle a vidé pour son Empire et ses guerres, que depuis la fin de la dernière guerre, le tourisme, la marchandisation de la terre et un repeuplement exogène, elle est devenue un espace de spéculations et un débouché grâce à l’enveloppe de continuité territoriale pour les productions extérieures étouffant toute velléité de développement auto-centré et fortifiant la dépendance clientéliste et sociale (plus de 20.000 pauvres !). Les perspectives pour les natios sont celles des travaux d’Hercule : comment passer d’une Corse « historique » agropastorale à bout de souffle à une Corse « moderne » développée durablement sans perdre son âme ? Comment continuer à être un Peuple solidaire sur sa terre capable d’y vivre, d’en vivre tout en la préservant des prédateurs, en l’ouvrant au monde par des échanges équilibrés, donnant-donnant, en en faisant un espace d’innovation, de liberté, de dignité, de responsabilité civique ?

Ce basculement est presque de l’ordre du miracle. Les natios doivent avoir une vue réaliste du tableau et des perspectives, la foi et la détermination pour cette entreprise historique qui stoppe le déclin et prépare un avenir de Peuple. Le statut actuel de gestion ou tout autre de même nature fût-il baptisé de particulier, ne résoudra rien sur le fond. Ils y sont majoritaires et peuvent boucher quelques voies d’eau, sans plus. Mieux que rien ? Sans doute. Un statut efficace est totalement incompatible avec le dogme de la République jacobine. Il faut une rupture. Un changement complet de système.

L’erreur serait de croire que sans pouvoir législatif, sans une réelle autonomie on pourrait déboucher à petits pas, obtenir par la négociation secteur par secteur, un statut de fait équivalent in fine à une véritable souveraineté d’autonomie. Il faut vaincre le jacobinisme pour que la loi donne le droit à un Peuple d’exister et lui permette d’être responsable de son devenir. C’est ce désir puissant en toute lucidité qui compte et qui doit être majoritaire. Ajouter des voix sans que cette aspiration s’étende et se renforce, c’est perdre du temps et il est compté. Les jeux électoralistes sont dérisoires au regard de la nécessité d’augmenter le nombre des convaincus déterminés et lucides. Des votants par déception dans le marasme politique de la République et des clans qui ressemble à une crise de régime peut accroître l’impression qu’on se rapproche du but. Erreur, un Peuple ne peut pas survivre par hasard ou par procuration.

 

Le début de la Révolution natios a commencé. La transparence démocratique pour être convaincant, pour inspirer confiance, pour être crédible, pour être pédagogue, pour rester humble devant la gravité et l’importance du devoir historique qui est initié.

Il faut parler avec son cœur, agir avec toute sa tête, toujours plus ensemble, afficher son espérance et sa détermination pour les rendre irrésistibles. •