Territuriale 2017

Les trompettes de Jéricho !

Notre militant, Lucien Alfonsi, il y a plus de 40 ans, pour dire notre volonté et notre foi en la Corse, citait volontiers dans les meetings cet épisode de la Bible : les hébreux au XIIIe siècle avant Jésus-Christ firent le tour de la ville 7 fois avec leurs trompettes et les remparts s’effondrèrent…

 

La victoire électorale est éclatante, elle ne souffre aucun doute et ce n’est pas les arguties sur le chiffre des abstentions qui peut l’amoindrir.

Nous avons progressé fortement en voies. Plus de 56 % des « votants », dans les abstentions il y a ceux qui ne votent jamais (20 à 25 % pour les meilleures participations des « inscrits »), et tout le paquet de droite ou de gauche déçus par leurs formations et après le 1er tour que l’élection étant pliée, inutile d’insister…

l’argument est bidon, on peut se demander s’il n’est pas tant avancé pour rassurer leur dernier carré que pour se trouver une excuse d’avoir été si peu représentatifs. De nouvelles têtes plus jeunes ont dans ces circonstances historiques fait office de Ripolin sur les poutres vermoulues du clan qui s’est effondré…

 

Le FLNC, en déposant les armes, a permis cette envolée dans la voie démocratique.

Il ne faut pas perdre de vue que « l’égalitarisme » selon la doctrine de la République des jacobins, de toute la classe politique, de toute son administration «déconcentrée » et non pas « décentralisée » refuse les différences. Il est par là antidémocratique.

L’Europe est celle des États et non des peuples. Le couple franco-allemand reste essentiel mais la France est centraliste jacobine à l’égalitarisme qui nie les différences, l’Allemagne est une fédération. Tant qu’il en sera ainsi, l’Europe ne pourra en rien nous aider ouvertement.

L’exemple catalan en a fait la démonstration.

La crise de régime française a propulsé Macron, il est seul sans opposition valable pour le moment, un peu sur un fil de funambule, bien malin qui peut dire comment cette crise va évoluer.

Il cherche à enraciner son nouveau parti, LREM. Dans cette situation, il aura tendance à tenir en main toutes les cordes du pouvoir, à ne rien lâcher.

Néanmoins réaliste, il est obligé de tenir compte qu’il n’a devant lui dans l’île, que le seul interlocuteur natio après que son gouvernement ait tenté de tout faire pour qu’il n’en soit pas ainsi. Les relations Corse/Paris doivent être revues.

Suite aux déclarations sur un pacte girondin, l’État va-t-il atténuer réellement son système centralisé et dans quelle mesure?

 

Le Premier Ministre, après les résultats, est prêt à recevoir nos élus. Oui, réaliste ai-je dit, mais la base de départ des discussions a été fixée avant les élections : pas de coofficialité pour la langue, pas de statut de résident… enfin rien mais on va discuter.

À nous à ne pas nous laisser rouler dans la farine. Il clair que le but est d’aboutir à une autonomie complète législative et financière. Il est évident que pour passer de la situation de pauvreté et de dépendance dans laquelle on se trouve et qui ne doit rien au hasard à une gouvernance autonome, il faudra une période transitoire pour une sortie en sifflet à négocier avec le pouvoir central.

 

Il faut discuter certes, mais à notre tour ne rien lâcher du minimum qui a permis le vote de l’Assemblée de Corse antérieure, ce Padduc que nos adversaires ont proposé de réformer lors de la campagne électorale.

Tout en affirmant que la prochaine étape est l’autonomie.

C’est un bras de fer. Les jacobins espèrent l’usure accélérée des natios. En trois ans, il leur faut définir les compétences, obtenir les moyens financiers pour l’Assemblée unique, mettre en place les territoires avec les fonctionnaires et faire le rodage de cet énième statut insuffisant puisqu’il n’est pas autonomiste. On veut faire de nous des Shadocks.

Pour tenir la rampe, il faut le soutien grandissant du peuple. En premier lieu sa confiance par une transparence totale et une démarche démocratique exemplaire.

Quand une cause est celle d’une injustice à redresser, la clarté s’impose et elle permet de prendre le peuple à témoin sur les causes de la situation qui viennent de loin, de plus de deux siècles d’empoisonnement par le jacobinisme et de la cure de désintoxication qu’elle nécessite.

La clarté peut alors être un atout de pédagogie. Elle gêne les manœuvres obliques, les coups de Jarnac…

 

Les plus démunis, nos pauvres et nos précaires, sont une urgence. Ils doivent sentir notre volonté de les aider fraternellement et commencer à la mesurer. Sinon comment peut-on parler d’un peuple corse ?

Notre nationalisme n’est pas fait que pour des nantis, les plus compétitifs… bien mieux, ils doivent ensemble sortir les autres des fossés. Commencer l’effort en ce sens ne peut qu’accroître la cohérence du peuple pour un avenir, pour son avenir, celui digne de tous. Utopie diront certains, la tête bien claire certes, une volonté d’acier mais aussi comme le poète l’a dit : « frappe toi le cœur, c’est là qu’est le génie ». Il n’y a pas de grande cause sans les tripes et le cœur.

Un espoir très grand a été soulevé.

On a été les seuls contre tous et nous voilà seuls pour entamer une nouvelle étape sur la route de l’émancipation du peuple corse. Nous aurons des adversaires de bonne ou de mauvaise foi mais nous devons faire les premiers pas du chemin en portant tout le fardeau. Les besoins de la gestion immédiate sont énormes et nous n’avons pas les moyens de changer les processus néfastes car nous ne pouvons pas changer les lois qui les provoquent sans le pouvoir de légiférer par nous-mêmes et quand nous l’aurons, il faudra avoir des projets précis, les voter après débats, leur mise en place et leurs effets demanderont du temps. Des améliorations sont déjà possibles mais le sauvetage et l’émancipation de notre peuple reste l’affaire de quelques générations.

 

La droite claironne que c’est l’entreprise qui crée des emplois, pourquoi depuis des années il en manque encore plus ? Pour la gauche c’est le « service public » qui est la garantie. Nous avons deux départements et un grand nombre de fonctionnaires territoriaux sans plus de résultats.

Les clans, à tapis, gloussent sur les mérites de la « proximité », le risque d’un centralisme insulaire par l’Assemblée Unique, comique eux qui ne sont que les relais du centralisme de l’État jacobin.

De vrais démocrates en somme avec des pratiques de viols du suffrage universel (listes gonflées, votes par correspondances bourrant les urnes, puis les procurations trafiquées, sans parler des pressions sur certains électeurs, etc.). Nos premiers combats nous les avons menés pour protéger les urnes contre ces délinquants.

 

Pour mesurer notre difficulté, j’invoquerai la réponse qu’un brave homme âgé a faite hier à un journaliste continental qui tendait le micro pour connaître les réactions de passants dans la rue d’Aiacciu : « je suis né corse et français, je veux mourir corse et français. » C’est ce que je croyais au début de ma vie d’étudiant sur le continent. De retour dans l’île, j’ai vite compris que le système politique de l’État nous obligeait à choisir entre être de plus en plus français et de moins en moins Corse. La question à poser à ce brave homme: «est-il certain que ses arrières petits enfants seront encore des Corses comme lui ? » Oui si les natios gagnent, non s’ils perdent la partie. À l’État français de corriger son injustice, nous demandons des actes et non de la repentance.

Max Simeoni.