Dialogue Corse/État

Un seul débat valable : l’autonomie !

Max Simeoni
par Max Simeoni
Lecture rapide et critique de « l’entretien exclusif » accordé par Gérald Darmanin à Corse-Matin du vendredi 22 juillet, « Je me sens comme le ministre de la Corse », étalé sur les pages 2 et 3. Il se veut confiant, à l’écoute, prêt à avancer « face à l’espoir qui s’est levé »… dans le cadre de négociations au long court… l’État et la Corse dialoguent…

 

Le ton est donné. La journaliste, Anne-C. Chabanon, lui demande si les 16 attentats revendiqués par le FLNC ont entamé sa détermination. Non, elle est intacte. Le retard vient des élections (présidentielles, législatives).

Promesses tenues : le rapprochement des détenus, rapport sur ce qui s’est passé à la prison d’Arles à la Première Ministre prochainement et ce cycle sur la question institutionnelle mais aussi l’économie, le logement, l’environnement, les déchets qui sont essentiels.

La 2e question d’Anne-C. Chabanon est pour s’assurer que le Président Macron a le même point de vue sur cet aspect de la pression. Il affirme que l’échange avec le Président est régulier. Il n’y a aucun hiatus. M. Corse et ministre de la Corse, tout est sans ombre. Il négociera avec des élus dans un cadre républicain, démocratique. Il ne répondra pas aux provocations. « Le gouvernement est ouvert, prêt à un dialogue sans tabou ».

 

Question : « Gilles Simeoni reste-il l’interlocuteur privilégié ? » N’a-t-il pas été désigné démocratiquement par les Corses ? Les élus participeront à la discussion (les parlementaires, les groupes de l’Assemblée de Corse, les maires d’Aiacciu et de Bastia, les présidents des maires de Haute-Corse et de Corse-du-Sud).

Question : « Les règles devraient être établies d’emblée ? » La méthode pour le constat, une réunion toutes les 6 semaines sur un sujet. Le ministre estime qu’il faudra une « petite » année pour la mettre au point. Un groupe d’experts pour les aspects techniques pour réaliser des études et non pour décider politiquement. Les études seront rendues publiques. À chaque venue en Corse, j’en rendrai compte.

 

Question : « Rien que de la transparence ? » Un débat démocratique et qui devra intéresser les Corses.

Un examen donc par bloc de compétences ? « Tout à fait !  » Quant au calendrier, la fin de l’année, décembre 2022 pour y voir plus clair sur le problème institutionnel n’est-ce pas trop court ? Le ministre dit que cela est du ressort du Président de la République et du Parlement, et non du sien.

Question : « L’autonomie, avez-vous débroussaillé ? »  On doit envisager toutes les conséquences = sécu, assurance chômage, retraite, fiscalité, crime organisé…

Question : le président de l’Exécutif parle d’une solution globale mais É. Borne parle, elle, de cas par cas ? « Mon mandat est large mais deux lignes rouges sont connues : la Corse dans la République / pas deux types de citoyens sur le même sol. »

Question : les forces insulaires varient de l’autonomie à l’indépendance ? Diversité certes, mais le Gouvernement est uni par ma voix ! Localement, certains n’ont pas soutenu à la Présidentielle le Président Macron contre Marine Le Pen. Des divergences sont apparues. Que veulent les Corses in fine ? Se loger, trouver un travail. C’est ce qui m’importe.

Question : Gilles Simeoni, même problématique ente la Corse et l’Outre-Mer, mais le sénateur Panunzi il y a danger ? La Corse n’est pas un territoire ultra-marin et vice versa. C’est le ministre de l’Intérieur qui en a la charge, le n°3 du Gouvernement et c’est une garantie. « Je me sens ministre de la Corse ».

Question : beaucoup de fronts insulaires cela risque de diluer ? Non je suis aidé, trois ministres, des équipes… l’élargissement est un signe de confiance du Président et de la Première Ministre.

 

Question : Les mots de coofficialité, de statut de résident, de reconnaissance de peuple corse… ne sont-ils pas des lignes rouges ? Je suis un jeune ministre capable de ne pas ressasser le passé…

Question : Alain Ferrandi et Pierre Alessandri ramenés à la prison de Borgu voient leur demande de demi-liberté refusée par le parquet anti-terroriste national ? Cela relève de l’autorité judiciaire en vertu de la séparation des pouvoirs !

Question : quid de la vérité sur la mort d’Yvan Colonna ? La semaine prochaine la Première Ministre recevra le rapport des services de la Justice.

Question : renforcement « très important » de l’État en Corse contre le crime organisé avez-vous dit ? Depuis six mois, des enquêtes démantèlent des circuits de trafics de stupéfiants, des saisies d’argents, de biens ont lieu… et plus de moyens aux préfets pour le contrôle des marchés publics frauduleux. L’immobilier et la spéculation qui l’accompagne, autre sujet de même… Mais le territoire corse risque de devenir une plaque tournante de la drogue.

 

Question : Gilles Simeoni va organiser une session spéciale à l’Assemblée de Corse sur le phénomène mafieux. L’État est prêt à l’accompagné ? Oui.

Une deuxième visite sur le territoire insulaire pour ? Voir gendarmes, maires, entrepreneurs… « mais surtout aller à la rencontre de la société civile, entendre et comprendre. »

Question : « parler aux tripes » ? L’empathie, l’écoute permettent une compréhension mutuelle… « il faut qu’on se fasse confiance même si on n’est pas d’accord sur tout » !

 

Conclusion : le vendredi 22 juillet, le ministre de l’Intérieur a survolé toutes les problématiques qui nous concerne. Il l’a fait avec lucidité et habilité. Il a voulu nous convaincre de sa bonne foi, du « sans tabou » pour le dialogue qui va s’ouvrir, de sa détermination sans faille. Son service de communication a fait un bon travail : large publication qui sera répétitive, photo la plus grande illustrant sa concentration dans l’écoute, annonce d’un va-et-vient tous les six mois (sauf impondérables, comme la guerre bizarre d’Ukraine, ou les difficultés économiques qu’elle occasionne dans un monde de plus en plus globalisé…). Les communicants du ministre lui ont-ils fait souligner par lui-même « sa jeunesse » ? Elle saute aux yeux ! Bizarre !

 

« Tant que je serai ministre », c’est là le problème ! J’ai eu à discuter, assez peu avec Defferre, puis plus longuement avec Joxe, du problème corse. J’avais pu imposer la reconnaissance du peuple corse dans les attendus du projet Joxe, vite balayé par Badinter, président du Conseil constitutionnel, qui s’en était vanté. Les ministres passent, aussi vite que les feuilles mortes avec le Libecciu. Leurs promesses « sincères », quand ils les formulent en poste, ne sont en rien une garantie d’exécution. Qui pourrait miser sa tête sur la promesse de tout un gouvernement ? Or, c’est ce qui nous est demandé de faire pour notre peuple. Oui, encore une fois, il nous manque l’outil de la garantie d’un combat historique, celui d’un peuple uni en permanence, dans sa tour. Il faudra bien parler de ça un jour… •