Ne parlàvamu a settimana scorsa, stu 31 di ghjennaghju in Brussella, Père Aragonès, presidente di a Generalitat di Catalunya, Iñigo Urkullu, u Lehendakari, presidente di u Guvernu Bascu, è Gilles Simeoni, presidente di l’Esecutivu di a Cullettività di Corsica, èranu inseme, à u parlamentu aurupeu, per parlà di fronte à deputati aurupei, rispunsèvuli di partiti naziunalisti, esperti, di u drittu à l’autodeterminazione di e nazioni senza statu. Un mumentu cum’è mai omu l’averia pensatu solu cinque anni fà. A sala era compia per campà stu mumentu sulenne. Conturesu.
Le Caucus Self Determination (1) a été créé en 2021 par des députés européens qui défendent le droit à l’autodétermination des peuples et nations sans État d’Europe. Les députés ALE y sont pleinement partie prenante et particulièrement actifs. L’initiative d’une revendication de « mécanisme de clarté démocratique »espère aboutir sur un règlement européen pour régler les conflits de souveraineté au sein de l’Union, sur la base des principes et valeurs qui l’ont fondée. Il pourrait même inspirer d’autres besoins de résolution de conflits dans le monde.
La question de l’élargissement intérieur de l’Union européenne est posée depuis plusieurs années, avec le cas de l’Écosse, mais surtout, depuis la violente répression qui s’y est abattue, celui de la Catalogne, dont l’aspiration légitime et pacifique à l’indépendance est contestée par l’Espagne. Il s’agit, par des principes établis, de permettre la prise en compte de cette demande légitime de citoyens européens qui s’appuient sur les valeurs de liberté, de diversité, et de subsidiarité, qui fondent les institutions européennes.
Les trois partis nationalistes (2) soutenant le processus d’autonomie de la Corse ont été conviés à cet évènement. L’occasion aussi d’organiser en marge, une réunion d’information sur les avancées de ce processus (lire en p 11).
François Alfonsi pour le Caucus Self Determination introduisait l’événement au nom des députés corse, basques, catalans, irlandais issus des groupes The Left, Verts-ALE et Renew, qui se sont investis ces quatre dernières années au sein du Caucus. « Notre objectif est d’apporter une réflexion sur les processus politiques et juridiques à mettre en œuvre au niveau de l’Europe pour faire en sorte que les conflits territoriaux liés au principe du droit à l’autodétermination, puissent être appréhendés par des procédures de dialogue, de compromis et de respect du fait démocratique ».
Des experts universitaires ont été sollicités pour en « proposer une traduction rigoureuse à travers un projet de règlement européen juridiquement solide » a dit l’eurodéputé de la Corse.
« Le Parlement européen est garant de la liberté de tous les citoyens européens. Le droit à l’autodétermination reconnu dans de nombreux textes internationaux doit pouvoir se déployer en toute liberté pour tout peuple européen » a surenchéri Jordi Solé, vice-président du groupe ALE, dénonçant la violation par l’Espagne des « valeurs de pluralisme, de liberté, de respect des minorités qui doivent pouvoir s’exercer pour les citoyens catalans de manière apaisée ».
Pour le basque de Bildu, Pernando Barrena, ancien eurodéputé membre du Caucus, il s’agit de « trouver la voie sur le plan juridique et politique pour résoudre les différends territoriaux de façon pacifique, en nous basant sur les principes démocratiques et un engagement européen clair qui renforce l’un des piliers de l’Union européenne : la paix ».
Différents experts étudiant la résolution de conflits en Europe ont travaillé sur les mécanismes politiques, juridiques et techniques qui pourraient garantir cette « clarté démocratique ». Les Traités protègent les citoyens européens qui doivent pouvoir compter sur l’UE. « Il doit y avoir des procédures définies internes à l’UE. Il faut sélectionner l’instrument juridique idoine pour cela » a expliqué Elisenda Casenas pour le groupe d’experts du Caucus.
Elle cite le cas du Brexit où des citoyens ont perdu leurs droits contre leur volonté. Le Caucus s’est attelé à ce travail d’identification et de définition des droits, avant de s’attaquer à la modification des traités, « la base c’est la non-discrimination du fait de la nationalité ».
Pour Marc Sanjaumé du groupe d’experts : « Ces aspirations considérées comme des « questions nationales » ont des conséquences internationales. L’idée est de trouver une façon de règlementer la question entre « national » et « international » et mettre en cohérence les pratiques en fonction des valeurs qui doivent prévaloir ».
Un tel règlement européen pourrait soutenir l’effort d’intégration de l’UE qui doit « promouvoir la paix et le bienêtre de ses peuples, fondés sur les valeurs qu’elle promeut. Elle n’a pas de règlement pour les garantir en son sein, c’est un paradoxe. Notre proposition vient combler cette lacune ».
Le principe fondamental de subsidiarité prône une grande proximité avec les citoyens, et celui de proportionnalité les protège. La proposition du Caucus s’appuie sur les mécanismes de protection de cette citoyenneté européenne énoncée dans les traités.
« Je suis un nationaliste corse au sens patriote, c’est-à-dire un Peuple corse, communauté vivante, et sa capacité à se projeter dans un projet politique avec une Autonomie de plein droit et de plein exercice. » Gilles Simeoni
On ne peut rejeter le droit à l’autodétermination sur la base de la simple conviction d’une institution ou d’un État, expose Mario Zubiaga. L’Europe est légitimée à agir par le traité sur le fonctionnement de l’UE qui pose l’interdiction des discriminations en fonction de la nationalité, le respect des droits humains et le principe de la démocratie représentative et des droits des citoyens.
« Il faut offrir une sécurité juridique à toutes les parties, en définissant les droits et obligations de chacune d’elles » appuie un autre expert Zelai Nikolas. Les principes et valeurs à respecter permettant l’exercice du droit à l’autodétermination sont nombreux dans les traités : démocratie, pluralisme, respect de la diversité, principe de souveraineté, respect des droits de l’homme et des droits des minorités, interdiction de l’usage de la violence, principe de coopération, principe de subsidiarité… De là découlent les garanties à accorder aux communautés sous-étatiques : droit à réviser les statuts dans le respect des principes et valeurs de l’Union, dialogue, négociations et accord hors de toute contrainte, solution politique basée sur la volonté démocratique et le respect fondamental des règles de droit, pluralisme politique, principe de clarté, base juridique claire, garantie mutuelle et mécanismes de médiation…
De sorte, les États-membres ne pourront pas émettre des réserves et seront obligés d’appliquer cette règle de « clarté démocratique ». Le document garantit l’implication légitime des citoyens et l’égalité de toutes les parties. Il prévoit la possibilité de revoir une décision comme de réitérer la procédure. Et « si un État-membre n’agit pas de bonne foi, le règlement permet l’intervention des institutions européennes qui pourront prendre en compte la déclaration unilatérale de la demande ».
Le règlement prévoit un régime de transition entre la notification de la demande et la modification du traité. Tous les États-membres seront tenus dans ce temps intermédiaire de respecter le potentiel futur État membre. Les institutions européennes deviennent des observateurs garants de cette procédure pouvant intervenir en cas de conflit.
La proposition était rehaussée de l’appui des trois présidents de nations sans État, Père Aragonès, Iñigo Urkullu et Gilles Simeoni, accompagnés en tribune par Izaskun Bilbao Barandica, eurodéputée basque d’EAJ-PNV, membre du Caucus Self Determination.
« Il y a un chemin juridique pour répondre à ce problème fondamentalement politique pour les peuples et nations sans État d’Europe » a introduit Gilles Simeoni.
Ce document traduit « notre attachement à la démocratie en tant que citoyen européen mais aussi notre attachement à l’idéal européen ».
« L’UE qui est la construction la plus aboutie d’un point de vue de l’idéal démocratique, qui exporte volontiers son savoir-faire, s’est montrée jusqu’à aujourd’hui largement impuissante à concevoir les voies et moyens pour prendre en compte des aspirations légitimes » a dit le président de la Collectivité de Corse. Il cite le cas de la Catalogne et « le silence assourdissant de toutes les grandes démocraties européennes et de l’UE. Il nous faut dépasser par les moyens de la démocratie ce type de situation, pour que l’Europe ne soit pas seulement l’Europe des États-membres, mais l’Europe des peuples et de tous les citoyens ».
Il faut aussi penser le Droit à l’autodétermination à « géométrie variable » pour nous adapter aux différentes situations, nouvel État-membre ou collectivité autonome pleinement reconnue au sein d’un État-membre comme l’aspire la Corse. « Je suis un nationaliste corse au sens patriote, c’est-à-dire un Peuple corse, communauté vivante, et sa capacité à se projeter dans un projet politique avec une Autonomie de plein droit et de plein exercice » a réaffirmé Gilles Simeoni, déplorant les difficultés de l’île à se faire entendre, malgré trois élections successives et une représentation électorale de 70 %.
Pour Père Aragonès, « la liberté de nos peuples repose uniquement sur la volonté de nos peuples. C’est ça l’autodétermination ! Dans le cadre d’un projet européen qui interpelle tous les peuples de l’UE mais aussi des Nations sans État comme les nôtres, il ne s’agit pas uniquement d’avoir des règles du jeu pour régler les conflits de souveraineté, nous sommes ici pour renforcer le projet européen » affirme le président de la Generalitat de Catalunya.
Ce débat est pour lui l’occasion à saisir pour une Europe intégrée, plus cohérente d’un point de vue social, « pour un avenir meilleur pour tous les peuples européens et leur permettre d’affronter les défis qui se posent ».
« Nous ferons toujours partie de l’Europe, mais sur la base de notre citoyenneté européenne. Nous voulons des règles partagées, un cadre commun, une « clarté démocratique » qui nous permettent d’exercer notre droit à l’autodétermination et notre place dans le projet européen. La solution c’est la démocratie. Nous avons toujours parié sur la démocratie, nous l’avons fait en octobre 2017 ; nous le referons. La persévérance et le renforcement démocratique de nos institutions pourra rendre l’impossible possible » a conclu le président catalan.
Pour le lehendakari, Iñigo Urkullu, Ukraine, montée des extrêmes droites… les fondements mêmes de l’Union sont ébranlés. « Face à autant de défis l’UE réagit par le biais de seules mesures macroéconomiques. Il faut travailler à plus d’intégration, veiller au respect des valeurs communes… mettre les gens au cœur de l’Union », travailler aux « transitions sociales et écologiques, et à un développement durable pour l’humain ».
« L’UE doit affirmer son rôle de dirigeant vis-à-vis des États membres pour faire tomber toutes les résistances qui ne prennent pas en compte la diversité territoriale, dans le domaine par exemple de la santé. L’UE doit pouvoir agir en tenant compte de la pluralité des nations qui la compose » dit encore Iñigo Urkullu. « Nous voulons une Europe de valeurs et de souveraineté partagées. Il faut pouvoir donner droit à la volonté de nos institutions d’affirmer leur indépendance ou leur autonomie. Nos institutions doivent pouvoir consulter leurs citoyens et faire valoir leur volonté de décider. Ce texte est une contribution positive, un bon point de départ pour un débat apaisé » dit encore le président basque.
« Construire l’Europe ça veut dire défendre ses principes et valeurs dans chacun des États-membres. L’UE doit trouver des voies de dialogue et de solution. Elle ne peut pas tourner le dos en disant c’est aux États-membres de régler ce problème ».
Cette proposition de « clarté démocratique » sera un point fort des prochaines élections européennes pour les Nations sans État. •
Fabiana Giovannini.
- Lire Arritti n°2827 : “Conférence avec Gilles Simeoni”
- François Martinetti et Lisa Volpei pour Femu a Corsica, Pascal Zagnoli pour le PNC, Paul Félix Benedetti et Olivier Sauli pour Core in Fronte.