« Monsieur le Ministre,
Le Collectif Pour Que Vivent Nos Langues regroupe la plupart des associations qui œuvrent pour les langues régionales, notamment celles que sont impliquées dans l’enseignement des langues régionales, dans les différentes filières, publique, privée et associative. Il s’est créé le 12 septembre 2019, alors qu’entrait en vigueur la réforme du baccalauréat qui porte votre nom.
D’emblée nous avions compris que cette réforme serait très pénalisante pour l’enseignement des langues régionales. Le 30 novembre 2019, notre manifestation d’un millier de participants près de votre Ministère a permis qu’une délégation soit reçue par vos collaborateurs directs.
Depuis, nous avons multiplié les demandes pour de nouveaux échanges. Toutes sont restées sans suite, malgré nos relances répétées, et malgré la promesse qui nous en a été faite le 21 août 2020 par l’Élysée que nous avions saisi de nos protestations.
En octobre 2020, nous avons manifesté à nouveau, notamment devant de nombreux rectorats, sur les différents territoires concernés par l’enseignement des langues régionales. Plusieurs recteurs ont reçu des délégations, mais votre Ministère, que nous avons à nouveau saisi d’une demande d’audience, n’a pas réagi à cette nouvelle opportunité de dialogue.
Six mois plus tard, vous n’avez toujours pas donné suite à nos demandes.
Depuis lors, les parlementaires, députés et sénateurs, se sont saisi de cette question des langues régionales à travers leurs débats sur la Proposition de Loi déposée par le député Paul Molac. Durant ces débats, au Sénat puis à l’Assemblée nationale, la nécessité de développer leur enseignement a été soutenue par le vote d’une large majorité d’élus, issue de différents groupes des deux Assemblées. La proposition de loi Molac a été adoptée le 8 avril dernier par l’Assemblée nationale, en termes conformes avec ceux votés par le Sénat, malgré vos réserves sur plusieurs articles et les consignes de vote que vous aviez données.
Compte tenu de ce sentiment majoritaire exprimé par la représentation élue du pays, nous vous demandons à nouveau d’accepter de recevoir une délégation de notre collectif.
Car les chiffres sont désormais connus, et ils montrent bien l’impact négatif de votre réforme sur la place des langues régionales dans l’Éducation nationale.
Votre réforme, concernant les enseignements optionnels au lycée, a prévu une exception dans son application à propos des langues anciennes qui ont gardé leur coefficient antérieur pour le baccalauréat, et auxquelles les élèves peuvent encore s’inscrire sans concurrence avec d’autres matières. Elle a en revanche marginalisé la situation des langues régionales qui n’est aucunement compensée par les quelques dizaines d’élèves ayant choisi l’enseignement de spécialité.
Baisse des effectifs, fermeture de sites, chute du nombre des candidats aux épreuves du baccalauréat : tous les indicateurs sont là pour attester d’une situation gravissime.
Nous vous demandons instamment, dès la rentrée 2021, d’aligner le statut de l’enseignement des langues régionales sur celui accordé aux langues anciennes, pour l’option facultative (coefficient, caractère bonifiant, possibilité d’une deuxième option) et l’enseignement de spécialité afin qu’il soit spécifique, autonome, cumulable avec tout autre enseignement de spécialité notamment de langue vivante étrangère.
Nous demandons également d’inclure le flamand occidental, le picard et le franco-provençal dans l’offre de formation de l’Éducation Nationale.
La démonstration a été faite que notre demande est appuyée par une large majorité politique dans le pays. Nous vous rappelons également que l’inscription dans la Constitution de ce patrimoine des langues régionales est intervenue en 2008, et que cela n’existe pour aucun autre des enseignements optionnels proposés par l’Éducation Nationale.
Nous restons attachés à pouvoir nouer un véritable dialogue avec votre Ministère. Mais tout dialogue exige deux partenaires. Aussi, nous réitérons notre demande de pouvoir tenir au plus tôt la réunion que nous vous avons demandée et dont la Présidence de la République a validé le principe.
Dans l’attente de votre réponse, que nous espérons positive, nous vous prions d’agréer, Monsieur le Ministre, l’expression de nos sentiments les meilleurs. » •