Le 23 juin 2008, Edmond Simeoni était interrogé par notre confrère Alta Frequenza sur l’avenir de la langue corse. L’Assemblée nationale venait de voter une demande de modification de la Constitution permettant la reconnaissance des langues régionales par la ratification de la Charte européenne des Langues régionales ou minoritaires ; provoquant l’ire de l’Académie française, gardienne du « temple de la défense de la langue française », puis celle du Sénat, pour s’opposer à cette modification. Éternelle situation où tous les rouages du jacobinisme jouent de leurs prérogatives institutionnelles pour faire barrage à la diversité culturelle de la France. Cum’ella hè longa a strada !
Aussi, Edmond Simeoni se serait certainement passionné de la période actuelle où, à la faveur de nos progressions politiques, les coups de boutoir de nos députés à l’Assemblée nationale (groupe Libertés et Territoires, lire ici), et les initiatives du terrain pour créer des alternatives, comme à Biguglia et Bastia (lire ici), des portes s’ouvrent pour tenter de contourner le rempart jacobin.
Edmond était très attaché à notre langue, ciment de notre peuple, il aurait aimé s’investir dans de tels challenges.
«D’abord les langues sont minoritaires et en particulier dans un pays comme la France, tout simplement parce que l’État a organisé séculairement leur marginalisation, et que la langue corse en particulier n’a même pas bénéficié de la petite loi Deixonne de 1951. Ensuite quand il y a eu cette évolution dans toute l’Europe en faveur des langues régionales, l’État français a vu le danger, et qu’est-ce qu’il a fait ? Il a introduit dans sa Constitution un article pour rendre impossible la ratification de la Charte des langues minoritaires en Europe. La France a signé la charte et ne l’a pas ratifiée. Et je crois que c’est dans ce prolongement logique qu’on a vu cette assemblée, certainement compétente en la matière, l’Académie Française, dire non, puisqu’elle est le temple de la défense de la langue française. Par contre je ne suis pas surpris du Sénat, parce que je n’oublie jamais que en 1969 le Général De Gaulle avait voulu les renvoyer à leurs chères études, et que cette assemblée de notables vieillis avait préféré que De Gaulle s’en aille plutôt que d’accepter la disparition d’une institution qui n’a pas de raison d’être. Le Sénat est un organisme conservateur. C’est un organisme qui ne sert pratiquement à rien, sauf à caser un certain nombre de personnalités politiques. Malheureusement il est enraciné dans une réalité sociologiques de la France des 36.000 communes et c’est un pouvoir qui compte. Je crois tout de même – j’espère en tout cas – que l’Assemblée Nationale, avec ses parlementaires et sans doute par le biais des commissions mixtes, arriveront à trouver une solution qui permettra à la France de ratifier la Charte des langues minoritaires.
(…) J’espère en tous cas que l’Assemblée Nationale va permettre à la langue corse d’avoir droit de cité chez elle. » •